Le défilé c’était bien passé. Avec mes amies top modèles on allait souvent faire la tournée des boîtes de nuit les plus uppées de San Francisco. C’était une sorte de rituel, de tradition. Évidemment, à chaque fois, le champagne coulait à flots, on trinquait beaucoup, 10 ou 15 fois à chaque soirée ; la drogue circulait facilement de mains en mains. Cela fait quelques temps maintenant que moi aussi, je me suis mis dans le moule. Je bois, je fume presque un paquet par jour, et je snife de la coke. Beau tableau n’est-ce pas ? Pourquoi avais-je besoin d’additif pour pouvoir voir la vie plus belle. Avais-je besoin de cette poudre pour apprécier ces soirées de débauches, ses dures journées de cours et ces rudes soirées de défilés ? N’étais-je pas assez forte pour le supporter seule ? Il fallait bien que je me fasse une raison. Me rendre à l’évidence, que non, je n’étais pas assez forte pour assumer tout cela toute seule. Une coupe de champagne à la main je m’assis. J’avais la tête qui tournait un peu. Je n’aurais pas du tant boire.

J’y voyais trouble. Trop de coke, tu la coke. J’avais un peu abusé ce soir apparemment. Sentant un mal de tête arrivé, je regardai ma coupe de champagne d’un air accusateur. Si j’étais dans cet état, c’était de sa faute -entre autre-, et de ses cinq copines que j’avais bu avant elle. Non, je ne tenais pas vraiment l’alcool. Je le savais. Mais alors la cocaïne ajoutée à l’alcool, ça faisait beaucoup. Mais, là, je ne m’étais pas aperçu que j’avais autant bu et en peu de temps je m’étais arrosé de cinq belles coupes de champagne. Sur la piste je sentais que des garçons se collaient à moi. Un homme s’était même beaucoup approché, il m’avait prise contre lui, et il me semble même qu’il m’avait embrassé. Je ne suis pas sûre. Me le suis-je imaginé ou était-ce réellement ce qu’il s’était passé ? C’est tout ce que je me souvins de la soirée d’hier soir.

Je me réveillai assez difficilement. Je plissai les yeux plusieurs fois avant d’ouvrir un œil. Et lorsque j’ouvris enfin mes deux prunelles. Je ne réalisai pas immédiatement. Réaliser quoi au juste ? Ça n’était pas mon lit, ça n’était pas ma chambre, ça n’était pas mes meubles. Là, je me redressai brusquement. Je regardai à droit et à gauche d’un mouvement sec et rapide. Si je n’étais pas chez moi, chez qui donc j’étais, alors ? Je commençais à paniquer. Les yeux plissés, le regard inquiet j’appelai :

« Y a quelqu’un ?? »

Je plaçai le drap blanc du lit sur mes épaules et me levai. Pourquoi je n’étais pas chez moi ? J’entendis la radio qui blablatait seule, semblait-il. Il y avait comme une odeur de café dans l’appartement. Je ne m’éloignai pas trop du lit, de peur de… de je ne savais quoi mais toujours est-il que je restais aux abords du lit. J’entendis des pas arrivait vers le lieu où je me trouvais. La chambre était ouverte sur une autre pièce. Je penchai la tête pour essayer de voir plus loin que je ne pouvais. Je découvris une grande pièce, peut-être le salon. Je ne savais pas. Mes souvenirs de la soirée me revint en tête. Je me souvins du champagne, de la cocaïne, des mecs qui me prenaient pour leur repas du soir et de cet homme qui m’avait embrassé. J’eu un coup de peur, d’un coup. Avais-je passé la nuit avec cet homme ? Ce qui expliquerait pourquoi je me trouvais là…

« Héhooo ? »

Redoublais-je ma demande de plus en plus anxieuse, mais cette fois un peu plus fort. J’attendais encore une réponse. Est-ce qu’il y avait quelqu’un dans cet appartement où étais-je complètement seule ? Toujours le drap sur mes épaules, j’observais ma tenue. J’avais un débardeur et mon pantalon noir tout serré de la veille.

Le drap blanc sur le dos, les cheveux ébouriffé, l’esprit encore ombragé, je me réveillai difficilement. Et Dieu sait que le réveil fut douloureux ce matin. Je ne savais pas où j’étais, chez qui j’étais, ce qui c’était passé durant la nuit, et durant la soirée d’hier soir. Je me rappelai de quelques détails, mais rien de très sûr. Je me souvins que j’étais plutôt bien saoule et j’avais consommé des substances illicites pour accompagner le tout. Je me souvins des morts de faim qui me tournaient autour. Et d’un homme qui m’avait embrassé. Etais-je chez lui ? Avais-je passé la nuit avec ? Je n’en savais rien, et le seul moyen d’être sûre, était de chercher dans l’appartement toute présence humaine. Lorsque je m’étais réveillé j’avais sentis une odeur de café, et les draps sentait le parfum pour homme. L’oreiller sur lequel j’avais eu ma tête posée toute la nuit en était parfumé. Après un « y a quelqu’un » assez timide, je l’avoue, je renforça ma voix en criant un « héhoo » plus soutenu et plus fort. De là, j’entendis quelqu’un chantonner… A la limite entre la chambre et le salon, je vis une couverture et un oreiller près du canapé. Cela me rassura immédiatement. Je vis une tête apparaître au dessus du muret qui délimitait la cuisine avec le salon. J’écarquillais les yeux. Je reconnus immédiatement Alcide C. Van Stexhe. Ce monsieur était professeur à l’université de Bekeley, et un ami de longue date de mon père. Qu’est-ce je faisais chez lui au juste ? L’idée que la soirée avait mal ou faillit mal tourner me vint immédiatement à l’esprit. Est-ce que c’était lui qui m’avait embrassé ?

« Monsieur Van Stexhe ?? »

Je devais sûrement avoir l’air étonné et ma voix en témoignait. « Allez vient, rentre…. Mais fait attention de ne pas te prendre les pieds dans els draps. Je baissai les yeux aussitôt tout en m’avançant vers lui. J’étais maintenant rassuré mais je voulais avoir des détails sur la soirée d’hier soir. « Assied-toi, si tu veux un peu regarder la télé, ne te gène pas… » Avec le mal de tête que je me tapais, c’était hors de question que j’allume la télé. La radio suffisait amplement.

« Non…c’est bon… J’ai très mal à la tête… »

Je plaçai ma main droite sur mon front. M’asseyant sur le canapé assez lassée. Monsieur Van Stexhe ajouta : « J’ai mis la table à la cuisine. Tu aimes le café noir ou tu prends du lait ? » Je tournai ma tête en sa direction et la posa sur le canapé. Ce simple geste me donna des vertiges, j’avais la tête qui tournait.

« Du café, s’il vous plait… Et de l’aspirine, surtout… Si vous en avez »

J’avais toujours vouvoyé Alcide. C’était comme ça depuis toujours. Même si mon père le connaissait très bien, je n’étais pas intime avec lui. Je le connaissais de vue. Je l’avais vu plusieurs fois. Il avait un certain âge et je vouvoyais les grandes personnes. Donc, l’habitude et restée. Je l’avais même croisé deux ou trois fois à la maison, il était passé pour voir mon père. Il avait une grande prestance, un charisme à faire tomber. C’était dur de ne pas lui accorder ce qu’il demandait. Dans les couloirs de l’université, j’entendais beaucoup de bruits sur lui : comme celui qui disait qu’il couchait avec une étudiante de 20 ans sa cadette. J’avais entendu le prénom de cette jeune fille mais je ne m’en souvenais plus. C’était un séducteur invétéré, il charmait toutes les jeunes femmes. Je ne lui connaissais pas de femme. Comme tout séducteur, il n’avait que des conquêtes, mais pas de femme. Il était torse nu, mais avait enfilé une fine robe de chambre noire. Même s’il avait un certain age, physiquement, il était toujours pas mal… Moi par contre, j’étais mal, très mal. Ma tête tournait et je pense que j’aurais du mal à me lever.

« Vous pouvez me dire ce que je fais chez vous…Il s’est passé quoi hier soir ? »

Lui demandais-je gentiment avec une petite voix encore légèrement enrouée. Je voulais qu’il m’explique les choses que je ne me souvenais pas. J’avais besoin de ses explications.

Assise sur le canapé telle une loque, les jambes recroquevillées sous mes fesses je tentais de me réchauffer comme je le pouvais. Alcide m’avait demandé ce que je voulais boire. Je lui avais donc commandé un café et une aspirine. Un petit déjeuner délicieux m’attendait ! « J’en ai, bien sûr. Je vais te préparer ça. Tu veux peut-être aussi quelque chose pour t’aider à digérer ? »

« Non, je vous remercie, je vais me contenter de ça pour l’instant… »

Je venais de me réveiller et comme tout matin, je n’étais pas forcément très bavarde. Mais ce matin était spécial, tout simplement parce que je ne m’étais pas réveillé dans mon lit et chez moi. Il y avait donc quelque chose qui n’était pas normal. Et lorsque j’étais face à un problème inhabituel, je cherchais toujours à connaître le pourquoi du comment. Je lui demandai donc ce que je fichais ici.« Vous pouvez me dire ce que je fais chez vous…Il s’est passé quoi hier soir ? » Lui demandais-je gentiment avec une petite voix encore légèrement enrouée. Je voulais qu’il m’explique les choses que je ne me souvenais pas. J’avais besoin de ses explications. « Le trou noir du lendemain, n’est-ce pas ? » Je confirmai d’un signe de tête. Lui, souriait. Ça me rendait mal à l’aise. « Eh bien, tu étais apparemment en grande forme, hier soir… Tu dansais sans t’arrêter. Puis tes amies se sont éloignées un moment et quelques types se sont approchés de toi. » Je ne réagis pas. En fait, je n’en croyais pas mes oreilles. Des types se seraient un peu trop approchés de moi. Okay, mais que c’était-il passé ensuite. C’était ça qui m’importait et il s’était arrêté.

« …Et ? »

Il m’expliqua qu’il avait trouvé que ces types s’étaient un peu trop rapprochés de moi… Il avait eu peur qu’ils me forcent à les suivre. Il m’avoua qu’il s’était fait passer pour une de mes relations très proches, afin qu’ils me laissent tranquille rapidement… Qu’appelait-il par se faire passer pour une des mes relations proches, d’abord ? Il m’expliqua qu’il avait préféré m’amener chez lui plutôt que chez mon père, sachant d’avance que cette histoire ne lui aurait pas plus.

« Vous avez bien fait, merci »

Il me proposa ensuite de prendre une douche. Il me dit aussi que si je le souhaitais, je pouvais lui piquer quelques vêtements. Je pensais tout de même garder mes vêtements bien que sa proposition soit très gentille. Je ne voulais pas ressembler à une version féminine de Monsieur Van Stexhe. Je souris finalement face à sa pointe d’humour concernant ses caleçons.

« Rassurez-vous je n’y toucherais pas… Mais c’est gentil de m’avoir proposé. »

Je posai sur la table ma tasse de café. Je me levai. Pointant du doigt une direction au hasard j’attendais que l’on m’indique la direction de la salle de bain, que j’ignorais totalement.

« La salle de bain se trouve…. ? »

Alcide m’indiqua la direction de la salle de bain. Je m’y rendis et pris ma douche. Lorsque j’en sortis, je retrouvai Monsieur Van Stexhe. La peau encore humide, je m’assis sur le canapé. Un peu plus détendue que tout à l’heure.