Les vacances prenaient fins. La rentrée s’annonçait agitée. Depuis son retour d’Australie, Lucie ne tenait plus en place. Un mystérieux mail avait chamboulé ses plans, ses révisions et son sommeil. L’ignorance ne pouvait être tolérée. Le savoir, c’est le pouvoir. Tout bon Epsilon savait ça. Dans un grondement d’impatience, la jeune étudiante prit le chemin de la maison que Roman lui laissait squatter. Bientôt, monsieur serait tranquillement de retour dans sa chambre de confrérie, comme elle. En attendant, il devrait supporter le retour de vacances la blonde.

Depuis que Monsieur White avait fait une remontée fulgurante en bourse et retrouvé une place importante sur le marché pharmaceutique, Lucie ne connaissait aucun répit. Ceux qui autrefois lui avaient tournée le dos revenaient vers elle pour mieux retrouver une place auprès de la future chef d’entreprise. Tous. Lucie ne supportait plus de les entendre prétendre connaître et soutenir son père. Tous n’avaient été qu’une bande d’hypocrites. Heureusement, le sourire ne parvenait à se défaire. Maintenant devant le portail de la maison, Lucie espérait trouver refuge chez son aîné.

Roman ne s’étonnerait peut être pas du soudain agglutinement de la presse en bas de chez lui. Tous souhaitaient avoir un commentaire de la fille de Monsieur White, tous désiraient savoir si Monsieur White serait en mesure de diriger « l’empire White » après sa grande dépression. Etait-il guéri ? Alors que la jeune femme tentait de se frayer un chemin vers l’intérieur, les journalistes ne cessaient leurs questions.

« Suit-il toujours un traitement ? »
« A-t-il un plan pour l’avenir de l’entreprise ? Que pense faire votre père des centaines d’emplois en suspend ? »
« Est-ce vraie qu’il fréquente une nouvelle femme ? »

Cette question surprit terriblement Lucie qui manqua de se manger le portail en arrivant. Ne surtout pas répondre. Est-ce que son père avait retrouvé une femme ? En y repensant, il avait un sourire jusqu’aux oreilles dernièrement. Il reprenait de vieilles habitudes, avaient des moments où il ne donnait aucun signe de vie. Voyait-il une femme ? Oh mon dieu, il avait une nouvelle relation.

Soudain, les journalistes semblèrent ne plus exister. La jeune femme poussa le portail avec un peu trop d’agacement. Quelle était cette sensation étrange dans sa poitrine ? Pourquoi est-ce que la colère prenait le dessus ? Dans un geste trop brusque, la jeune femme referma le portail sur le nez d’un journaliste. Certains seraient prêts à tout pour entrer. Heureusement, aucun ne parvînt à ses fins.

Sur le trajet jusqu’à la porte d’entrée, Lucie tenta des milliers de fois d’appeler son paternel. Aucune réponse. Et voici une Lucie toute nouvelle qui venait de faire son entrée dans la maison. Ruminant dans son coin, elle laissa tomber sa valise sans même accorder un bonjour souriant à la femme qui venait chercher ses bagages. Puisque son père ne répondait pas, elle trouverait les informations elle-même. Roman devait avoir un moyen pour dégoter des informations sans avoir à discuter avec les principaux concernés.

« ROMAN ! » Hurla Lucie pour tenter de retrouver son frère.

On n’avait jamais vu une Lucie dans cet état. La jalousie ne lui réussissait pas, visiblement. Ce sentiment, tout nouveau, chamboulait l’ensemble de son caractère. Elle désirait savoir qui était la grognasse qui allait lui piquer son père ! Au mon dieu… et si c’était une pétasse de quelques années de plus qu’elle. Son père ne passerait plus de temps avec elle. Elle devait savoir.

« ROMAAAAAAAAAAAAN ! »

Où était-il quand elle avait besoin de lui ? Pour une fois, il pouvait lui donner un renseignement ! Un conseil de grand frère! Comment devait-elle gérer cette affaire ? Pourquoi angoissait-elle ?
Quand, enfin, la blonde mit la main sur son frère, elle se planta devant lui. Les bras croisés sur sa poitrine, elle exigeait presque.

« Comment tu fais pour avoir une information que quelqu’un ne veut pas te donner ? Mais je la veux maintenant !»

Bonjour ? Ca va ? Tu as passé de bonnes vacances ? Non, non. Lucie n’avait pas le temps avec tout ça. Plus tard ! Pour le moment, elle devait savoir TOUT DE SUITE si son père entretenait une relation intime avec une pétasse ! Le regard déterminé, l’air grognon… L’ange Lucie semblait bien loin. On pourrait même déceler une pointe de haine dans son rictus. Mademoiselle devenait exigeante. L’idée que son père la délaisse ou pire décide de l’abandonner la rendait malade, verte de jalousie et proche de l’animal. Peut-être qu’il ne la considérait plus comme sa fille maintenant qu’elle avait trouvé sa famille biologique. Peut-être désirait-il une nouvelle héritière, un fils même… Et si la nouvelle femme était jeune et fertile, elle pourrait lui offrir un nouvel enfant. Lucie allait se sentir mal. Elle devait faire partir cette femme ! Vite !