Ses doigts fermement entrelacés à ceux d'Aislynn, Zachariah pénètre avec la jeune femme dans la salle de réception à la suite de la demande du doyen. Il est intrigué par rapport à la surprise dont Fredericksen a parlé. Avec lui, elles ne sont généralement pas des plus joyeuses. Cependant, le La Tour Dubois ne s'en préoccupe pas outre mesure car il est bien trop ancré dans son bonheur d'avoir retrouvé sa belle. Il adresse un regard fier à l'assemblée et cherche du coup de l'oeil le fameux Mark afin de lui signifier que sa présence est désormais indésirable et qu'il peut partir dans la minute qui suit. Il ne sert strictement à rien. Remarque, il n'a jamais servi à quelque chose sinon à faire tâche dans le champ de vision de l'ancien doyen omega. Ils se faufilent tous les deux à travers les tables et Zachariah finit par apercevoir sa sœur en compagnie de son italien. Il n'en faut pas plus au jeune homme pour deviner qu'ils vont tous partager la même table. Il conduit Aislynn jusqu'à eux et ils arrivent en même temps que son meilleur ami et Manon. La soirée promet d'être riche en émotion car les voilà tous réunis. La touche finale est l'arrivée de Camélia et Jayan. Zachariah trouve que Constance est bien proche d'Augusto et il ne se prive pas de lui lancer un sourire narquois et un regard qui veut dire « toi tu as des choses à me raconter ». Regard qu'elle lui rend bien. Le sourire en moins. Boh, au pire ce n'est pas très grave, Zachariah sourit pour deux. La remarque de sa sœur le fait lentement rire tandis que Manon ne prend pas forcément la blague. Elle n'est pas drôle Manon, vraiment pas drôle.
« Je suis partageur Manon, je te le prête pour la soirée. » Ajoute-t-il pour coordonner les dires de Constance. Il ne sait pas trop comment la Petrov-Versier va réagir mais d'ici à ce qu'ils aient le droit à une crise de jalousie … Ils n'en sont pas loin à tous les coups. Involontairement, il va foutre Adriel dans une merde pas possible mais il sait déjà que le flegme de son ami parviendra à canaliser la folie excessive de sa compagne. Il libère la main de la blonde pour qu'elle puisse aller saluer Constance tandis que lui fait un tour de table. Ses yeux se plissent pour lancer des éclairs dès qu'il aperçoit le nom de Mark accolé à celui d'Aislynn. Forcément, il est venu avec elle alors Fredericksen a jugé bon de le placer à côté d'elle durant le repas. Il attrape Adriel par l'épaule pour l'attirer avec lui.
« Vire-moi ce mécréant sinon je sens que ma bonne humeur va être saccagée. » Maugrée Zachariah tout en tout en soulevant le carton où le nom de Mark est inscrit pour le déchirer en deux et le mettre ensuite dans la poche intérieure de sa veste de costume. Allez Adriel, fais-moi plaisir et envoie valser l'assiette de ce guignol à travers la salle. Zachariah imagine déjà la scène : Mark passer le reste de sa soirée à chercher vainement sa place pour s'asseoir et déguster son repas. Priceless. Il lève ses prunelles pour rencontrer celles de sa blonde favorite. Il lui adresse un léger sourire innocent mais au fond, il sait bien qu'Aislynn est loin d'être stupide et qu'elle a compris son manège. Maintenant, reste à savoir si elle l'approuve ou non. On leur demande de s'installer et c'est ainsi que Zachariah s'assoit à côté de l'ancienne iota et que la conversation démarre sur les chapeaux de roues avec un Augusto qui porte un toast général. Les voilà tous en train de lever leurs verres pour ensuite boire une gorgée en s’autoproclamant table star du mariage. Le doyen éclate alors leur bulle en commençant un discours ennuyeux à souhait et qui laisse une trace étonné sur l'ensemble des visages des convives. Fredericksen qui offre un présent à ses anciens élèves ? Il y a de quoi frisonner. Zachariah se prépare mentalement à se foutre royalement de la tronche de son ancien doyen d'université qu'il risque de découvrir à travers des photos ou vidéos peu flatteuses. Les lumières se font tamisées et l'écran blanc style cinéma s'illumine alors pour laisser apparaître un visage … Le sien. Ses yeux s'écarquillent d'horreur car il reconnaît immédiatement cette vidéo. Il s'agit de sa capsule. Celle faite en 2013 peu après la rentrée. Celle qui est censée être dévoilée bien des années plus tard. Ses doigts jusque-là agrippés à sa coupe de champagne, glissent mollement pour atteindre la table dans un bruit sourd. Il se remémore vaguement tout ce qu'il a pu dire dans cette vidéo. Des conneries. Des montagnes de conneries intenses. Puis des paroles plus sérieux et vraies. Des paroles qui reflétaient sa pensée. Des paroles que personne ici ne devaient entendre. Pour l'une des premières fois de sa vie, Zachariah est gêné. Il ne regarde ni Aislynn, ni Constance car ils parlent des deux dans sa capsule et il a peur de leurs réactions. Cependant, il ne peut rien faire pour empêcher l'inévitable de se produire …
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Rentrée 2013 ; Zachariah La Tour Dubois entre dans une pièce. Ni grande ni petite. Un homme est assis derrière une caméra et semble l'attendre de pied. Alors c'est ici qu'il va devoir répondre à toutes les questions. Même les plus indiscrètes si l'on en croit les rumeurs qui courent. Ceux qui sont déjà passés se sont fait un plaisir de colporter quelques ragots. Lui s'en fout. Il n'a rien à cacher. Un tabouret trône au milieu de la salle et il s'installe avant même qu'on le lui ait demandé. Pas fier pour deux sous le Zachariah. Il croise les bras et il voit qu'une lumière rouge est déjà activée. Signe que toute son entrée a été enregistrée. Bien, très bien. Ainsi, on ne va pas perdre de temps et passer directement dans le vif du sujet. Le mec lui demande de se présenter. Purée, on dirait qu'il passe un entretien d'embauche. C'est si solennel. Il émet un léger sourire et débute sa capsule.
« Alors moi c'est Zachariah La Tour Dubois. Je suis arrivé à Berkeley, le 14 février 2012 chez les Sigma. Je suis étudiant en musique. En Histoire de la Musique & Composition et écriture de chansons pour être plus précis. Je pratique la photographie également. Mais plus en amateur. J'ai quitté les Sigma pour intégrer les omega où je suis le doyen. Je me sens comme un poisson dans l'eau et ce, même si ma confrérie est l'une des pestiférée du campus. » Sa voix est claire, le ton est précis. Il vient de donner les informations les plus basiques sur lui-même. Il en a oublié quelques-unes qui rajoute au compte goutte.
« Je suis né en 90 donc j'ai 23 ans. Célibataire, pas d'enfant. Bref la belle vie. » Une vie de pacha dont il profite à outrance. Il se tait, ne jugeant pas utile de débiter le reste de sa vie. Il reste dans le global pour l'instant car il se doute que les détails vont être désirés d'ici peu de temps. Et il ne se trompe pas car il est directement interrogé sur ses ambitions futures. Il baisse la tête et étouffe un rire. Le type avec sa caméra le fait rire. Il est drôle. Il fait un peu penser aux adultes qui te posent la question fatidique quand tu es jeune : Tu veux faire quoi quand tu seras grand ? Dieu qu'il détestait qu'on le titille à ce propos. Et encore aujourd'hui, ce n'est pas sa tasse de thé. Il est jeune, il veut profiter. Voir le monde, l'explorer, en goûter chaque facette et ensuite se poser à l'endroit qui lui paraîtra le plus chaleureux.
« Dans le meilleur des cas, je veux continuer la musique. En solo, en groupe, dans un orchestre peu importe. Je veux composer des mélodies et les faire découvrir aux autres. Apprendre aux gosses à jouer du piano, faire éclater leurs talents, leur faire découvrir les vibrations et les sensations qui nous habitent quand on joue. » Zachariah n'est pas bien difficile. On lui donne un piano et tout va bien. Sur le plan professionnel, voilà ses rêves. Vivre de sa musique. Cela demande des efforts colossaux, peu d'artistes peuvent se vanter de réussir mais lui espère qu'il fera partie de cette poignée de chanceux. Forcément, en plus du plan professionnel, il faut s'exprimer sur le plan personnel. Et là, tout devient beaucoup moins clair dans sa tête. Il se racle la gorge en cherchant ses mots.
« J'aimerais bien être papa avant mes trente ans. Je crois que je serai un bon père. Peut-être pas le meilleur mais je ferai tout pour être le plus aimant. Quant à la mère … Je ne peux pas donner de nom car j'en ai pas en tête. Enfin si, j'en ai un mais c'est vraiment stupide. » Dit-il en émettant un faible rire étranglé. Oui il a bien un prénom qui lui trotte dans la tête. Celui d'une blonde qui lui ravage le cerveau et le cœur. Il voit l'homme se décaler de sa caméra pour oser un sourcil dans sa direction. Du genre, allez mon gars balance le tout parce qu'on va pas coucher ici. Décide-toi et parle.
« C'est une iota … Je m'imagine bien avec elle mais c'est stupide. Un béguin. Voilà ce que c'est. Un béguin post adolescent. Bref, on s'en fout. Question suivante ! » Qu'il s'exclame dans l'espoir que l'autre ne le pousse pas plus. Il laisse tomber la suite. Ce qu'il souhaite garder ou non dans le futur ? Il lève les yeux au ciel et fait signe qu'il ne répondra pas. Il n'arrive déjà pas à s'imaginer correctement lui-même dans quelques années alors réfléchir à qui ou ce qu'il veut à ses côtés par la suite, c'est l'ennuyer profondément. De plus, sur le « qui », il suffit de déchiffrer sa réponse précédente pour comprendre. La suite n'est guère plus réjouissante mais au moins, il a de la matière pour communiquer au sujet des regrets qu'il pourrait avoir.
« Je regrette de m'être fait virer de différents lycées et de l'université de Moscou car pour mes parents adoptifs qui m'ont toujours aidé, j'ai bousillé leur confiance. Cependant, je ne changerai pas le passé parce qu'il a fait de moi ce que je suis aujourd'hui. Pas parfait et avec des défauts immense mais je suis quelqu'un de bien malgré tout. » Et il le pense vraiment. Des erreurs, il en a commis des dizaines et toutes plus grosses les unes que les autres mais Zachariah est un homme de valeur et de confiance. Il écoute attentivement le sujet suivant en fronçant des sourcils. Décidément, il en veut l'autre avec son futur.
« Je dirai aux générations futures de profiter de la vie et de s'amuser. D'en faire baver à Fredericksen. Quoi que lorsqu'ils regarderont cette vidéo, papi sera sûrement six pieds sous terre mais bon. C'est l'idée quoi. Il ne faut pas vivre pour s'amuser mais s'amuser pour vivre. » Il adresse un clin d'oeil à la caméra. Fredo si tu entends Zachariah, sans rancune.Les questions se poursuivent et ne ressemblent pas. On lui demande à présent de parler sur sa famille. Sa famille. Rien que ce mot lui donne envie de rire fortement. Depuis son adolescence, Zachariah se considère un peu comme un SFF : Sans Famille Fixe. Il fixe la caméra et cherche à décrire ce qu'il ressent quand on évoque les membres d'une famille quasi inexistante pour lui. Puis les mots sortent d'eux-mêmes. Un flot continu qu'il ne peut plus arrêter.
« J'ai été adopté. Mon père est mort sans que je ne le connaisse, ma mère est … inexistante. Morte ou vivante, qu'est-ce que j'en sais moi. » Dit-il en levant les mains en signe d'impuissance. Il ne sait même pas à quoi elle ressemble. Est-ce qu'elle est grande, petite, ronde ou svelte ? Belle ou ordinaire ? Est-ce qu'il lui ressemble un peu ? Ces questions, il se les pose sans cesse depuis des années mais il n'aura jamais de réponses. Et il a fini par se faire à cette pénible idée.
« Mes parents adoptifs sont en Russie et ici j'ai … J'ai juste Constance car sa … enfin notre sœur est décédée dans une fusillade. Elle non plus, je ne l'ai jamais connu. » Il prend alors conscience que sa seule et unique se résume désormais à une personne : Constance Sarah La Tour Dubois. Et ce constat n'est pas bien glorieux quand on sait les relations tendues que ces deux-là entretiennent. L'homme derrière la caméra le pousse à poursuivre d'un geste de la main. Zachariah se tortille sur sa chaise, mal à l'aise. Eh bien quoi, qu'est-ce qu'il veut savoir de plus lui ? Franchement, le jeune homme ne voit pas quoi d'autre ajouter. Bon, peut-être que si, peut-être que …
« Je crois qu'elle ne m'aime pas. » Dit-il le plus honnêtement du monde un brin déçu de ne pas être plus accepté. Il a beau être chez les omega et faire parti de ceux que l'on voit comme des cancres, Zachariah est bien loin d'avoir un petit pois à la place du cerveau.
« Je crois que je fais tâche dans son monde parfait. Pas assez bien fringué, pas assez arrogant, trop je m'en foutiste. Elle me voit plus comme un boulet qu'autre chose. » Voilà ( selon lui ) ce que pense Constance de sa personne. Ce n'est pas très glorieux mais il n'est pas dans le faux. Constance se croit beaucoup mieux que lui et n'hésite pas à le faire savoir. De toutes les manières possibles.
« Je vais pas dire que ça me mine le moral parce que c'est pas vrai. Faut pas croire, elle n'est pas sans défaut. Trop pète sec, trop diva avec ses grandes phrases moralisatrices, franchement, elle n'est pas drôle à vivre. » Cette vidéo ne sera jamais diffusée donc il en profite pour déblatérer tout ce qu'il a sur le cœur. Que ce soit bon ou mauvais. Il se souvient du verbe de l'interrogation principale : ressentir. Qu'est-ce qu'il ressent au juste pour Constance ? Oui juste Constance parce que pour ses parents, on a bien compris qu'il s'en fiche comme de l'an quarante. Mais sa sœur ? Il contemple pendant un bref instant le mur avant qu'une risette égaye ses traits.
« Je crois que je l'aime bien. Attention, je ne lui voue pas une affection sans borne proche de la dévotion non. Elle n'est pas assez fun. Mais je l'aime bien ma sœur. Même si on ne se parle pas tous les jours, ça me suffit de savoir qu'elle va bien. Je ne suis pas doué pour les sentiments fraternels mais je sais que je ne supporterai pas de la voir malheureuse. Donc ouais … Je crois que j'aime bien Constance. » Déclare-t-il surpris lui-même d'en arriver à une telle conclusion. Sur son visage, son étonnement doit se remarquer car l'homme derrière la caméra cache maladroitement un rire. Il pense avoir fait le tour de la question familial et donc il demande à ce que l'on enchaîne. Et c'est ce qu'ils font. En parlant maintenant des personnes qui manquent dans sa vie. Alors là … trou noir. Il y a des dizaines de personnes qui ne font plus partie de sa vie et certainement pour des raisons bien spécifiques mais de là à ce qu'il ait un message à leur faire passer … On lui en demande beaucoup. Surtout que ce fameux message, ils n'en auront jamais conscience puisqu'ils ne le verront jamais. Action inutile. Merci Fredericksen et tes questions à la con.
« Je dirai à Tyler qu'elle me manque mais je comprends son envie d'être auprès de sa famille en Angleterre. » Finit-il par énoncer, peu convaincu de la portée de sa tirade. Son amie d'enfance lui manque c'est un fait indéniable mais elle n'est pas morte ni rien. Il lui est toujours possible de communiquer avec elle. Le bonhomme derrière la caméra lui ordonne de fermer les yeux et de lui donner le prénom de la personne à laquelle il va immédiatement penser. Celle dont le visage va automatiquement s'afficher dans son esprit. De bonne grâce, l'omega se prête à l'exercice et l'instant suivant, ses paupières recouvrent ses prunelles. Il n'a pas besoin de réfléchir bien longtemps car une frimousse s'impose d'elle-même. Cette même bouille qui le hante depuis des mois. Tandis que ses iris redécouvrent la lumière du jour, il se racle consciencieusement la gorge avant de répondre à voix haute, de manière distincte.
« Aislynn. » Il ne sait pas trop s'il doit expliciter son choix ou bien si l'autre va passer à la question suivante. Il se laisse tomber contre le siège et attend de savoir à quelle sauce il va être mangé. Il espère sincèrement ne pas avoir à faire étalage de tout ce que lui inspire la jolie blonde. Sinon, ce sera bien la première fois de sa vie qu'il devra se prendre au sérieux et ne plus faire d'humour au sujet d'Aislynn. Est-il prêt pour cela ? Il va bientôt le découvrir car la voix de son interlocuteur retentit à nouveau dans la pièce vide de toute présence, à part des leurs. Il doit parler de la jeune femme et décrire leur relation. Et déblatérer sur le pourquoi du comment, elle a un impact si important dans sa vie actuelle. Mal à l'aise, le jeune homme se met à éviter la caméra et ses yeux se posent intentionnellement sur des points imaginaires au fond de la salle. Face au silence de l'homme, il comprend qu'il n'a pas le droit de sauter la question. Alors il se lance. Après tout, la vidéo sera enterrée pour les décennies à venir, que risque-t-il ? Rien.
« Je ne sais pas trop par où commencer. Je ne suis même pas sûr qu'on puisse dire qu'il existe une relation entre elle et moi. » Il hausse les épaules et son mouvement démontre tout le fatalisme qui l'habite. Avec Aislynn c'est toujours la même ritournelle : Il ne sait jamais sur quel pied danser.
« Cela fait à peu près un an que nous jouons au chat et à la souris. Je crois qu'elle me considère toujours comme l'omega qui passe son temps à faire la bringue et qui ne va pas en cours car c'est une perte de temps. Elle ne voit pas que je lui cours après depuis un an. En fait, elle ne voit pas à quel point je tiens à elle. » Finit-il par avouer en baissant son regard vers le carrelage de la pièce. Même s'il se confie à une caméra, ce n'est pas de gaieté de cœur d'admettre qu'une fille n'en a rien à faire de vous. Pire. Cela fait plus mal qu'il ne l'avait songé au prime abord. Puis il se souvient que la deuxième partie de l'interrogation porte sur l'impact qu'elle a dans sa vie. Alors il se remet à parler.
« Elle a un impact positif. Elle me donne envie d'être plus posé tout en lui faisant faire des choses folles. J'ai envie de devenir meilleur pour être digne d'elle. » En prononçant ces derniers mots, ses iris se fixent intensément sur le point rouge de la caméra comme s'il souhaitait qu'Aislynn parvienne à l'entendre. Impossible sachant que sa capsule ne sera visible que pour les générations à venir. Et dieu seul sait où il sera dans une cinquantaine d'années. Loin sûrement. En parlant des générations futures, le voilà qui doit s'adresser directement à eux.
« Ils doivent juste retenir qu'il faut se battre pour obtenir ne serait-ce qu'un regard de la personne à laquelle on tient. Ne jamais baisser les bras. Rien n'est facile entre Aislynn et moi car nous sommes diamétralement opposés. Mais je changerai pour rien au monde les moments que je passe avec elle. » Il offre à la caméra l'un de ses sourires en coin dont il a le secret et qui le ferait presque passer pour un timide au grand cœur. Il pense en avoir fini avec les questions de mauvais goûts mais l'homme qui le filme lui en pose une nouvelle. Il soupire un peu avant de prendre le temps pour établir sa réflexion. Toujours et encore le futur. Comme s'il pouvait prédire comment tout allait se terminer.
« Je sais pas … Du bonheur. Aussi bien professionnellement parlant que sentimentalement. Heureuse avec un homme qui la mérite. Peut-être moi ? Non, je sais pas. On coupe cette séquence au montage ? Non ? Bon ... » Et cela l'enquiquine vraiment de ne pas savoir. Au fond de lui-même, il a admis qu'il aimerait être l'homme à ses côtés dans le futur. Et il l'a avoué à demi mots. Tout s'embrouille dans sa tête et quand on lui annonce que maintenant, il lui reste quelques minutes pour terminer sa vidéo avec des « dédicaces », il s'empresse de recommencer à piailler. Cette distraction offerte sur un plateau d'argent lui permet de ne plus penser à ses réponses précédentes.
« Aislynn, je n'étais peut-être pas très sobre cette nuit-là à la plage mais j'avais tellement attendu notre premier baiser que je ne regrette rien. Et je … 'Fin bref, tu vois. Mes sentiments sont réels. » Bon maintenant stop. Il se doit d'arrêter de penser et de parler d'Aislynn à tout va parce qu'il se rend compte que cela tourne à l'obsession. Il secoue la tête pour chasser le blonde de son cerveau. L'omega aurait des dizaines de messages à faire passer. Certains plus sérieux et profonds que d'autres. Cependant, il sait que le temps lui est compté car d'autres étudiants de l'université attendent pour pouvoir s'asseoir sur le fauteuil à sa place et commencer leurs capsules.
« Ah message pour Fredericksen : Tu vois, tes jolies confréries dégradées ? Bah c'est Scott avec mes omega. Et tu sais quoi ? Je suis fier de ce qu'ils ont fait parce que ça t'a emmerdé puissance mille. Je regrette juste de ne pas avoir été le cerveau de toute l'opération. » Allez tant qu'à faire, autant dévoiler tous les méfaits accomplis jusqu'ici. De toute façon, le vieux sera mort et enterré avant de pouvoir regarder la capsules de ses étudiants. Rien à craindre. D'accord, ce n'est pas reluisant de se dire que l'on est le doyen de ceux qui ont commis un tel acte mais ça va, il le vit bien. De plus, ils ont tous eu des confréries flamblantes neuves donc finalement, ils devraient remercier ses plus fidèles alliés. Tiens en parlant d'eux.
« A mes omega ; Être à la tête de notre confrérie est un véritable plaisir chaque jour. » Voilà, une petite dédicace à ses jaunes au passage et on continue sur cette lancée. Une petite pensée pour telle fille avec qui il a partagé une nuit. Une pensée pour les sigmas avec qui il a cohabité quelques mois. Une pensée pour untel et untel. Il termine par parler du meilleur.
« Ma dernière tirade avant de rendre l'antenne sera pour le plus beau, le plus charmant de tous. J'ai nommé Adriel Eynsford-Baxter. Faut que je vous avoue un truc. » Il rapproche le tabouret de la caméra et se penche en avant comme s'il allait confier le secret le plus gros de l'univers.
« Les Eden, Lily-Rose, Manon, Camélia, machines, trucs et bidules, elles sont bien mignonnes mais elles ne m'arrivent pas à la cheville. Eh ouais les filles … Je suis l'homme de la vie d'Adriel. Va falloir s'y faire. » Il le dit avec un aplomb proche de l'affront. Il est bienheureux qu'elles ne puissent pas voir sa capsule sinon, il serait déjà mort.
« Il est mien et je suis sien. » Ponctue-t-il pour terminer en beauté. Il a promis à Adriel de faire et de dire quelques conneries durant sa capsule. Niveau paroles douteuses, il y a la dose. Niveau acte, il lui en reste un. Il se lève et pousse avec vigueur son siège vers le fond de la salle. Puis son visage se retrouve au niveau de la caméra.
« Dernier cadeau pour toutes les filles de Berkeley. » D'une main experte, il déboucle rapidement sa ceinture et fait voler les boutons de son jeans avant de se retrouver en boxer … Et de se mettre à twerker comme la mode l'exige. N'étant pas très bon danseur, il ressemble plus à Baloo qui balance son popotin de droite à gauche mais c'est le geste qui compte comme on dit. L'omega fait mine de vouloir baisser son boxer et c'est un cameraman frôlant l'hystérie que l'on entend crier
« Coupez ! » avant que l'image ne devienne totalement noire …
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Il va mourir de honte. Incessamment sous peu. A vrai dire dès maintenant. Zachariah attrape sa flûte à champagne et la boit d'une seule traite. Tout ce qu'il a dit au sujet d'Aislynn, les trois fois où il a annoncé qu'il aimait bien sa sœur, son aveu concernant la dégradation des confréries, sa blague stupide comme quoi Adriel et lui finiraient ensemble et pour terminer son twerk … Il est au bord de la crise cardiaque. Et le pire, c'est qu'il n'ose plus faire face aux regards des autres. Surtout ceux de sa blonde adorée et de Constance qui doit en ce moment l'insulter de tous les noms. Alors il se tourne vers son salut de toujours : Adriel. Forcément, son compère de la première heure ne va pas lui tenir rigueur de ce flot de débilité. Sauf qu'avec Adriel, il y a Manon. Et elle question humour, elle doit être à peu près au même stade que Constance. Stade zéro. Ras les pâquerettes.
« Prends le couteau de ta copine avant qu'elle ne me l'enfonce dans le crâne. » Dit-il en désignant la main de Manon qu'il trouve bien trop proche de son couteau. Allez Adriel, sauve-moi la vie avant que ta folle n'en finisse avec moi. Finalement, c'est un coup d'oeil circulaire qu'il donne à l'ensemble de la tablée. Il y a ceux qui ont l'air de ne même pas avoir suivi sa capsule et qui donc s'en moquent ( cf Augusto ) et ceux qui le dévisagent avec une attention bien trop prononcée à son goût. Du genre Constance et Aislynn. Il attend que cette dernière réagisse d'une manière quelconque. Positive de préférence. Quant à sa sœur, il se contente de la scruter sans parole. Un sourire ou pas de sourire ? Non pas de sourire parce qu'elle va très probablement lui péter les dents dans deux minutes. Alors on ne sourit. On se prépare au pire. Et à la tempête qui va s'abattre sur lui. Connard de Fredericksen, tu le payeras.