« P'tain ! Les mecs, les caleçons sales vont dans le bac à linges sales ! Bordel de merde. Je ne suis pas votre bonne, compris bande de macaques empaillés ? ». Les joies de la colocation. Allongé, regard fixant le plafond et écouteurs dans les oreilles, j'ignore totalement les remarques de l'autre hystérique. Elle ne fait que brailler et n'a pas de bouton pause. La seule solution que j'ai trouvé pour qu'elle cesse de me les briser, c'est de mettre à fond de la musique. Plus efficace que les boules quies, je ne fais plus attention à elle. Elle reste un bout de femme sympathique, mais c'est une vraie chieuse. J'ai un tempérament calme, mais il ne faut pas m'embêter. Qu'elle me laisse tranquille, dans mon coin et il n'y aura aucun problème. J'ai espéré qu'elle comprenne, sauf qu'elle semble butée à me faire chier aujourd'hui. Seul garçon présent au dortoir, me voilà transformé en son punching-ball . « Ohoh ! Tu m'écoutes toi là ? ». Rester neutre, ne pas l'ouvrir et surtout, garder son calme. Sauf que je sens son regard insisté sur ma personne. Elle attend de toute évidence une réaction de ma part. Mais je ne veux pas lui faire le plaisir de lui prêter un tant soit peu d'attention. Qu'elle retourne à la laverie s'occuper ou qu'elle aille récurer les chiottes. Cela aurait été trop beau pour être vrai qu'elle s'exécute. Je sens sa présence à mes côtés, debout, près de mon lit et les bras croisés. Que veux-elle de moi ? Impossible d'avoir dix minutes de repos et d'être seul. Agacé de la sentir s'impatienter, je craque. Ôtant mes écouteurs, balançant mon ipod sur ma table basse, je m'assieds sur mon pieu pour que mon regard, au passage plutôt froissé, croise le sien. « Tu me veux quoi ? Que je ramasse mon caleçon ? Et bien voilà ! Ramassé ! ». Dis-je en alignant les gestes à la parole. Je me suis saisi du caleçon en question, que j'ai balancé sur le lit de la demoiselle. Ce n'est sûrement pas la bonne manière de créer une bonne ambiance de chambré, mais lorsqu'on me tape ainsi sur le système, il ne faut pas s'étonner de me voir riposter. Je sens son regard outré se poser sur moi. Elle semble choquée, décontenancée et elle en perd ses mots. Revenant à sa hauteur, je ne lui adresse pas un regard, empoigne mon ipod et quitte les lieux. Ainsi elle va comprendre qu'à certains moments, il faut simplement se taire et me laisser tranquille. Je suis un gentil garçon, mais j'ai besoin de mes moments de détentes pour me ressourcer. On en a tous besoin. Sortant des dortoirs, j'atterris face à plusieurs bâtiments. Sur le campus depuis peu, je ne connais pas encore parfaitement les lieux. Lorsque je ne sais pas où aller, je vais au feeling et découvre chaque jour, de nouveaux endroits. Avec de nouveau mes écouteurs aux oreilles, j'avance, je découvre et j'admire la beauté des bâtiments qui me font face. BCU est ... impressionnant. Pour le petit banlieusard que je suis, c'est du changement. Continuant ma balade, finalement j'aperçois au loin une étendue de verdure. Sûrement une sorte de parc ou de pelouse où se poser. Je décide donc de m'y rendre. Tout en prenant mon temps, car je ne suis pas pressé, j'arrive sur les lieux. Le temps est agréable, la température moyenne, le temps californien est agréable. Aux antipodes des températures à Paris à cette période de l'année. Cela me change d'être habillé d'un jean, t-shirt et d'une simple petite veste. Connaissant encore peu de monde, je décide de rester en mode solitaire et je me pose tranquillement sur un coin d'herbe. Allongé, tête dans les nuages, je suis plongé dans un semi-sommeil et me mets à rêver de toutes sortes de choses. À mon arrivée à BCU, l'ambiance qui y règne, les personnes rencontrées (...) puis soudain je sors de mon état comateux. Le temps a défilé à une allure folle, je ne m'en suis pas rendu compte. Sur les coups de vingt heures, il n'y a quasiment plus personne, et la nuit a commencé à pointer le bout de son nez. Émergeant, je finis par me lever. On va mettre ça sur le compte du décalage horaire. La tête encore dans le pâté, je remonte petit à petit le parc. Sauf qu'une voix interpelle mon attention. Un groupe de filles vient de me passer sous le nez et même de dos, je la reconnais. Je reste bloqué quelques secondes avant de les rattraper. Sans réfléchir, je pose ma main sur son épaule en lançant un : « Hé ! ». Me sentant rapidement débile de cette approche, je me secoue légèrement la tête comme si cela allait éclaircir mes idées. « Je veux dire ... salut ! ». Elles se retournent toutes vers moi, et me dévisagent, sauf que mon regard se pose sur une et je ne la quitte pas des yeux. D'un côté elle a changé, grandi et d'un autre, pas du tout. Je suis posté comme un con devant elles et n'ose ajouter quoi ce soit. Ma surprise est si dense que je suis comme paralysé. Mais rajoute quelque chose espèce de crétin. « Tu es jolie .. ». Ses copines à côté pouffent de rire, mais elle, ne dit rien. Elle reste me fixer de son petit regard de cocker. Quel idiot je fais.