Une invitation de sa cousine. Presque incrédule, la blonde avait relu dix fois le message avant de forcer un pauvre passant dans la rue à lui faire la lecture à voix haute. Trop surprise, elle lui avait arraché le portable des mains en lui sifflant que s’il ne savait pas lire, il n’avait qu’à retourner en primaire ! Finalement, le temps aidant, elle avait fini par digérer la nouvelle et se préparer…enfin presque. N’oublions pas qu’Aengus, restait toujours fidèle à elle-même. Aussi, elle avait enfilé un débardeur noire, sa veste « Chiller » verte et son pantacourt imprimé. La tenue était parfaite pour crapahuter, chaussures comprises. L’autre avantage n’était pas négligeable. Cet ensemble camouflait parfaitement les divers hématomes présents sur son corps sauf la légère coupure à sa lèvre inférieur et les marques de combat sur ses poings. Bien que personne ne serait étonné par le nombre de ces stigmates, elle préférait éviter toute remarque. Il était bien connu qu’elle demeurait une sacrée kamikaze. Pour couronner cette allure décalée, elle avait teint ses cheveux en rose, histoire d’être mieux vu de tous probablement ou pas pure excentricité.

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Bref, la question du transport se posa assez rapidement. Fainéante pour aujourd’hui et surtout très en retard, elle n’attendait qu’une chose, un véhicule motorisé qui porterait ses petites fesses jusqu’au lieu de rendez vous. Se fut donc après avoir croisé un ami que son sac à dos et son postérieur furent transportés. Aengus pu apercevoir la voiture de James. Elle ne pouvait passer inaperçue. James ne faisait pas parti des hommes à se fondre facilement dans la masse. Son conducteur descendit à son tour de l’engin à deux roues pour reprendre son casque. Il leva la visière pour mieux lui lancer un regard coquin.

« J’aurais le droit à une récompense j’espère. On était collé-serré, c’est excitant. »

Il n’avait pas dû comprendre, pauvre homme, qu’Aengus n’était pas le genre de femme à se laisser approcher. Pinçant les lèvres en signe d’agacement, elle frappa le bas ventre du garçon à l’aide du casque.

« Espèce de… pervers !!! De…Détraqué sexuel ! De… de…mou du bide ! »

Aengus avait toujours des insultes extrêmement colorés et folkloriques. Il n’y avait rien de pire pour la jeune femme que d’être moue du ventre. C’était flasque et écœurant ! Mais l’homme ne sembla pas apprécier les propos et agrippa son casque en protestant.

« T’es complètement barrée comme nana toi ! »

« C’est surtout toi qui va te barrer ouais ! » Grogna Aengus vexée en remontant les bretelles de son sac sur les épaules.

Sans plus un regard pour l’homme qui s’éloignait avec sa moto, elle avança vers l’entrée de la maison. Elle y croisa James et Louna qu’elle salua d’un signe de tête.

« Tu me ramène ce soir. » Déclara t elle à James sans fausse joie.

Non, ce n’était absolument pas une demande et oui, elle s’incrustait. Il n’allait pas la laisser rentrer toute seule, avec tout les détraqués du slip qui trainaient dans la rue ! L’épisode du garçon semblait totalement oublié pour une autre chose plus dérangeante. Alors qu’elle semblait prête à poursuivre, probablement pour être plus polie avec James, elle remarqua les cadeaux et présents que ce dernier faisait porter à Louna ! Esclavagiste ! Mais pire, James avait apporté une superbe bouteille d’un grand cru, vieux et cher faute d’être bon. Aengus n’aimait pas particulièrement le vin. Très peu habituée, elle considérait cette boisson comme une façon d’entacher un repas. Chacun ses goûts après tout. Elle n’aimait pas manger de toute façon. Mais comme si ce n’était pas suffisant, il complétait la panoplie avec d’autres cadeaux que ‘Gus n’avait pas vu mais qu’elle soupçonnait d’être tout aussi délicats et onéreux. Jalouse ? Parfaitement ! Pourquoi ? Et bien, l’explication n’allait pas tarder à tomber. En ouvrant son sac, elle en sorti un « truc » rond recouvert et enveloppé avec soin.

« Bah moi je t’ai fait un gâteau. » Répliqua Aengus en logeant avec violence le paquet contre la poitrine de Blaithin. « Tu peux l’utiliser pour la déco ou le faire tomber par terre. »

La politesse aurait voulu qu’elle attende d’être invitée à entrer mais ‘Gus s’en fichait à présent. Elle passa la porte sans plus de cérémonie. Elle n’était pas prête à entendre quoique se soit gentil ou non. Malheureusement, ou presque, pour James, Louna et Blaithin, ils n’avaient jamais goûté les gâteaux de la Iota. Seul Edouard, lorsqu’il était encore en Irlande, avait eut le privilège de subir les tentatives d’empoisonnement de la blonde. C’était probablement le terme le plus approprié pour parler des confections culinaires de l’étudiante qui confondait souvent le sel et le sucre, sur-dosait l’huile, oubliait la levure ou rajoutait des ingrédients surprises, pour le fun, tels que du piment, du jus de citrouille ou autres petites fantaisie. Certes, la décoration était belle, parfaite et appétissante. Il ne faut pas se fier aux apparences, le propos semblait parfait.

« Alfreeeeeed ! Alfred, Alfred, Alfred ! »
Déboulant à toute allure dans la cuisine, manquant de déraper sur le carrelage, elle ouvre en grand les portes du frigo avant de lui apporter un ingrédient secret. Enfin pas si secret que ça quand on connait Mademoiselle Lou et son addiction au sucre.
« Dis, est-ce qu'on peut mettre ça sur la tarte aux fraises ? »
Avec appétit et gourmandise, elle fixe le gâteau que le majordome finit tout juste de confectionner, ajoutant ça et là les derniers quartiers de fraise qui recouvrent la crème pâtissière. Le vieil homme ne tarde pas à saisir ce que Lou vient d'apporter connaissant également le caractère impatient de la gamine. Une bombe de crème chantilly, rien de plus rien de mois, crème dont elle espérait bien recouvrir toutes les fraises pour leur faire une jolie couverture mousseuse et appétissante. Le vieil homme fronce des sourcils avant de reposer l'objet de la gourmandise enfantine.
« Eh bien, c'est une très bonne idée miss Louna. Mais je pense qu'il serait préférable de l'emporter avec vous pour la servir au dernier moment sinon elle risque de tourner. Mais ...vous devriez filer vous habiller avant que votre père ne voit que vous êtes toujours en pyjama. »
Contente que son idée ait remporté un franc succès, l'enfant tourne aussitôt les talons et s'enfuit en courant dans sa chambre en rigolant. C'est vrai qu'ils devront bientôt partir et qu'elle a préféré continuer à jouer plutôt que de s'occuper de sa tenue qui pourtant représente une source d'inquiétude constante chez la demoiselle. La robe n'est pas compliquée à choisir puisqu'elle y a réfléchi des jours auparavant mais mieux vaudrait dire à Deidi qu'elle a passé une heure à la choisir plutôt que d'avouer qu'elle était trop distraite pour se préparer. Enfilant sa jolie robe crème légèrement satinée, chaussures assorties et le bracelet que lui avait offert Tonton Shannon -ben oui, même si c'était mal parti entre eux, il fallait bien qu'elle se rende à l'évidence qu'il faisait partie de la famille!-, elle redescend en courant dans le salon, toujours un grand sourire aux lèvres. Enfin, elle va retrouver sa tatie adorée et tous les gens qu'elle aime comme tonton Eddie qu'elle n'a pas vu depuis ce qui lui apparaît comme une éternité.
« Deidiiiiii ! Il faut partiiiiir ! »
Surexcitée, elle ne peut s'empêcher de sauter dans tous les sens, incapable de tenir en place ne serait-ce que 5 minutes pour qu'Alfred puisse finir de lui attacher les cheveux. Celui-ci était passé maître dans le tressage de la longue tignasse blonde de la gamine et cela ne lui prenait que quelques minutes … à condition qu'elle se montre coopérative ce qui semblait très très loin d'être le cas.

Enfin arrivée devant chez Tatie Blaith ! Toujours excitée comme une puce, elle bondit hors du véhicule pour prendre dans ses petits bras les fleurs et les chocolats, laissant à la charge de son père le vin et la tarte qu'elle avait confectionné plutôt avec Alfred. Ainsi parés, ils étaient prêts à retrouver toute leur famille même si aucune voiture n'était encore garée devant chez Tatie. La gamine dévale l'allée, loin d'être prudente et risquant de chuter à plusieurs reprises, mais finit par arriver saine et sauve avant de tambouriner à la porte, bientôt rejointe par Deidi et par … Gus qui est arrivée sans même qu'elle ne l'entende, tout ça au moment précis où Blaithin ouvre la porte. Tiens, et Shannon passe aussi la porte. Ca en fait du monde avant qu'elle ne puisse enlacer sa tatie d'amour ! Attendant patiemment -enfin patiemment est un grand mot- son tour, elle tend le bouquet de fleur et la boîte de chocolat à Blaith avant de lui sauter dans les bras pour l'enlacer tendrement.
« T'as vu la tarte, c'est moi qui l'ait fait ! Enfin, Alfred m'a un peu aidé quand même. »

J’étais invité chez Blaithin. Un dîné de famille où James était convié avec sa fille, Aengus également, et bien évidemment, ma famille à moi. Le but ? Qu’O’Griffin et Turner officialisent vraiment leur relation face à nous. Voilà pourquoi j’avais accepté de venir sans trop rechigner. Shannon entrait dans la grande famille irlandaise, donc il se devait d’être bien accueilli. Par ailleurs, le jeune couple devait probablement s’attendre à ce que Maria vienne avec les enfants. Pourtant, ce ne fut pas le cas. J’étais en froid avec mon épouse depuis mars, au point où nous étions en rupture à durée ‘‘limitée’’ si elle se décidait enfin à vouloir me récupérer. Je n’en avais parlé à personne, mis à part à Cheyenne et quelques amis, comme James. Loin de moi l’envie d’étaler ma vie sentimentale pour le moins désastreuse et crier sur tous les toits que j’avais été pris pour un guignol qui tendait presque le bâton pour se faire battre. Voilà pourquoi je vins seul, en compagnie de mes quatre enfants.

« Allez, dépêchez-vous, on est déjà en retard ! » Difficile d’être le père de quatre diablotins, entre Seth, mon aîné de neuf ans, hyperactif ; Jade, sa jumelle casse-cou ; Ambre, six ans, rebellée face à ma rupture avec sa mère ; et Aaron, le petit dernier d’un an et demi, qui, maintenant qu’il savait marcher, était intenable. Il suffisait de détourner le regard une seule seconde pour qu’il soit déjà en route pour le Mexique. Shannon avait eu l’occasion de voir quelques fois mes enfants. Pour Aengus, c’était différent. Depuis son arrivée à San Francisco et l’effort pour la faire entrer à l’université, les évènements qui s’étaient déroulés dans ma vie ne m’avaient pas vraiment donné l’occasion de la revoir. Nous nous croisions, prenions quelques verres ensemble, et aujourd’hui était l’occasion de fêter pour de bon nos retrouvailles.

Pour ma part, j’arrivais chez Blaithin avec un imposant pack de bière. Et oui, on est irlandais ou on ne l’est pas. Et alors que je frappais à la porte, mes enfants traînaient derrière, observant les lieux avec une certaine curiosité. Pourtant, ils étaient déjà venus ici à quelques reprises. Enfin, Shannon vint m’ouvrir. Je lui serrais la main tout en lui adressant un sourire sincère. « Salut beau-frère. » Je lui tapais dans l’épaule, avant de m’avancer. J’embrassais Blaith sur la joue en guise de salutations. « J’ai apporté de la bière. Et ne me regarde pas comme ça. Je suis sûr qu’il n’y en a nul part dans cette maison. » Je lui adressais un clin d’œil avant de tourner la tête vers Aengus. Cette dernière, toujours avec son look excentrique, avait teint ses cheveux en rose. Et la coupure sur sa lèvre ne faisait que traduire son côté garçon manqué. Je venais de déposer le pack de bières sur la table de la cuisine et passais derrière la plus jeune des O’Griffin afin de glisser mes bras autour d’elle et de lui ébouriffer les cheveux, dans un geste taquin. « Salut la môme ! » Déjà, Seth et Jade, mes jumeaux de neuf ans, observaient Aengus avec de grands yeux. « Ils sont trop cools tes cheveux ! »

Mes yeux se portèrent sur le gâteau qu’elle avait apparemment ramené. « Blaith, je te conseille de le faire tomber ‘‘involontairement’’ par terre, par mesure de sécurité. » Je lançais un regard d’ange à Aengus, avant d’enfin me tourner vers James. Mais tout d’abord, je baissais la tête afin de voir Louna. « Oh, mais c’est ma petite princesse ! » Je venais de m’abaisser à sa hauteur afin de la réceptionner dans mes bras et lui faire un gros câlin. Quand je me relevais, j’ébouriffais les cheveux de James. « Ca va le moche ? » Le sourire que je lui adressais prouvait que ce surnom était affectif.