Flash-back.

« Tu me promets que jamais on ne nous séparera ? » Questionna-t-elle, ses prunelles brillant d’une flemme qu’elle n’avait jamais connue auparavant.
« Je te le promets ! » Répondit-il en capturant ses lèvres, un pincement au cœur.

Il connaissait son passé, il savait ce qu’elle avait enduré pour en arriver là, il la connaissait mieux que personne et le fait qu’elle lui pose cette question prouvait qu’elle était fragile. Cela prouvait aussi à quel point elle s’attendait toujours au pire. Il aurait tant voulu lui prouver que la vie pouvait être merveilleuse malgré ce qu’elle pensait, il aurait voulu qu’elle voit la vie à travers ses yeux à lui, cela l’aurait surement apaisé quand à ses craintes par rapport au futur, à leur futur ensemble. Cependant, il n’y pouvait rien, tout ce dont il était capable était de la rassurer du mieux qu’il le pouvait et d’être toujours présent pour elle.

Fin du flash-back.

Assise devant la fenêtre qui donnait sur une partie de la ville, la jolie grecque repensait à sa vie d’avant, à sa vie à New York. Même si la vie avait été dure, elle n’en restait pas moins merveilleuse à cette époque là. Duncan lui manquait, son homme lui manquait et même si le temps avait réussi à la guérir de certaines blessures cela n’en restait pas moins douloureux. Elle se souvenait de cette journée comme si elle venait de la vivre. Ils s’étaient pris deux jours et avaient quitté la ville pour se retrouver en tête à tête, loin de tous leurs problèmes. Tout avait été parfait, tout avait toujours été parfait avec lui. Son portable sonna lui annonçant qu’elle venait de recevoir un nouveau message la sortit de ses pensées. Le lisant, un sourire apparut sur ses lèvres avant de répondre. Aleyna était une jeune femme qui avait connu le même drame qu’elle, elle l’avait rencontré chez les Sigma. Remarquant de suite son comportement et se reconnaissant en elle à son arrivée à Berkeley, Esme n’avait pu s’empêcher d’aller la trouver et lui proposer son aide afin de surmonter cette épreuve. Elle connaissait mieux que personne cette sensation d’être perdue, de ne pas savoir où allait, ni quoi faire. Etant elle-même passée par là, elle ne voulait pas que la brunette s’isole, cela pouvait s’avérer très dangereux et sortir de cette infernale spirale n’était pas un jeu d’enfant, loin de là.

Repartit à la contemplation de la ville, ses pensées virèrent vers un autre homme, une autre vie. Dom n’était pas Duncan mais, tous deux l’aimaient. Esmeralda avait su faire son deuil afin de continuer à avancer, c’état ce qu’aurait voulu son fiancé. Malheureusement, les choses ne se passaient pas vraiment comme elle l’aurait espéré. Elle ne semblait ne plus avoir le contrôle de sa propre vie. Cela ne la dérangeait pas pour autant. Enfin, cela ne la dérangeait pas aujourd’hui. Elle s’était octroyé un peu de temps pour elle-même afin de faire le point sur sa vie. Et aujourd’hui, elle avait décidé que ses problèmes de cœur et de garçons allaient devoir attendre.

« Je veux bien te croire même si j’ai une préférence pour les voitures et la vitesse ! » Répondit-elle un sourire radieux aux lèvres tout en étreignant la jeune femme.

La vitesse lui permettait de faire le vide dans son esprit et à ne penser à rien. Dès qu’elle avait le moral à zéro, elle prenait sa voiture et sortait de la ville, elle empruntait les routes où la circulation était moindre afin de rouler assez vite.

« Tu ne vas nulle part, je t’ai déjà dit que tu ne me dérangeais jamais. Entre, je t’en prie ! »

S’il y avait bien une chose qu’Esme détestait c’était bien de voir les personnes qu’elle appréciait aller mal. Elle n’aimait pas voir de la tristesse dans leurs yeux et de la souffrance sur leurs visages. Et Aleyna ne faisait pas exception à cela. La conduisant au salon, là où elles seraient plus à l’aise pour discuter, la présidente des Sigma eut un pincement au cœur en entendant les paroles de son amie.

« Ma chérie ! Je sais bien que ça fait mal mais, tu verras, un jour tout ira pour le mieux, tu arriveras à penser à lui sans avoir autant mal… En as-tu déjà parlé à quelqu’un ? Je veux dire, c’est difficile d’en parler et tu ne pourras faire ton deuil que si tu arrives à en parler. »

A New York, les personnes qui avaient connu son père se plaisaient à croire que la fille et le père étaient semblables, ils aimaient à associer l’image de cet homme sans cœur à celle de sa fille. Ce n’était pas évident de se défaire de cette image ou de se faire à cette vie où la plupart des gens la jugeaient de par son passé et ses origines. Seulement, Duncan avait changé cette vision à la seconde où il avait posé les yeux sur elle. Ce nouveau regard sur elle l’avait d’abord surpris avant que cela ne la ravisse. Enfin de compte, la vie n’était pas si déprimante qu’elle en avait l’air de premier abord. Il était devenu son pilier dans la vie de tous les jours, son épaule sur laquelle elle pleurait quand tout allait mal, sa famille.

« Tu as bien eu raison, je ne voudrais pas qu’il t’arrive quelque chose à cause d’un excès de vitesse ! »

Lorsqu’il s’agissait de ses amis, la présidente des Sigma était beaucoup plus prudente. Elle n’aurait jamais accepté que Aleyna prenne le volant dans son état, cela aurait été tout simplement dangereux. Elle était passée par là quelques années plutôt et contrairement à sa petite protégée, jouer la carte de la prudence ne faisait pas partie de ses priorités à l’époque. Elle préférait de loin la vitesse et flirter avec la mort, cela était bien plus jouissif et la faisait se sentir vivante. Elle avait tellement perdu que la mort elle-même ne lui faisait pas peur. De quoi aurait-elle eu peur ? La vie ne pouvait rien reprendre à une personne qui ne possédait plus rien. C’était ainsi qu’elle voyait les choses, pas la meilleure des visions et elle tenait absolument à éviter à la Sigma d’atteindre ce gouffre. Esme proposa à son invitée de prendre place dans le salon. « Je te sers quoi à boire ma belle ? » Lâcha-t-elle tandis qu’elle prenait le chemin de la cuisine qui donnait sur le salon. Ramenant les boissons avec elle, la jolie grecque s’assit à côté de la brunette, un sourire rassurant sur les lèvres. Combien de fois s’était-elle sentie perdue après la mort de Duncan ? Combien de fois avait-elle ressentit le besoin de tout plaquer pour recommencer sa vie dans une ville où personne ne la connaîtrait ? Beaucoup plus qu’elle n’aurait pu les compter. Et voir le désarroi s’installer élire domicile dans le joli regard de Aleyna lui brisait le cœur. Cette fille méritait tout le bonheur du monde, elle ne méritait pas de porter un tel poids sur les épaules.

« Il n’y a pas de bonnes manières de parler de ce que tu as vécu ma chérie, c’est difficile d’en parler, ça le sera toujours en quelque sorte…Mais, c’est inévitable si tu veux aller mieux… » Elle prit sa main dans la sienne avant de continuer. « Tu sais ma chérie, quand on vit une tragédie comme la tienne, on essaye par tous les moyens de garder la tête hors de l’eau, on clame haut et fort qu’on a besoin de personne mais, c’est faux…Si tu savais le nombre de fois où j’ai envoyé balader mon psy. Maintenant, rien ne t’oblige à en consulter un mais, t’enfoncer dans ton mutisme te fera plus de mal que de bien et il ne l’aurait pas voulu, il voudrait que tu vives ta vie et que tu sois heureuse ! »

Aussi difficile que cela puisse paraître, vider son cœur et parler du vécu restait la meilleure thérapie. Parler d’une partie de sa vie que l’on désirait seulement oublier, déballer sa vie à un étranger ou à un proche n’était pas ce qu’il y avait de plus plaisant. Esme en avait mis du temps avant de faire son deuil, d’abord se renfermant sur elle-même en feignant la bonne humeur et la joie de vivre, elle s’était très vite rendu compte que cette tactique ne servait à rien d’autre qu’à la transformer en cette personne qu’elle n’était pas. L’ombre d’elle-même, voilà ce qu’elle devenait en se terrant dans son silence. Aleyna ne devait pas emprunter le même chemin même si la jolie grecque soupçonnait que cette étape du deuil semblait nécessaire pour réussir un jour à se reconstruire.

« Ca va faire un an que tu arrives à le surmonter, un an que tu réussis à te lever le matin en continuant à vivre, un an que cette douleur te rend plus forte, ça va faire un an que tu continues à vivre malgré ce drame et ce n’est pas rien…On ne sort jamais indemne de ça mais, on est toujours plus fort qu’avant… »