Ca y est, la nouvelle année scolaire avait commencé. Les cours ont repris, les vacances sont terminées. Pour certains, c'est une des meilleures nouvelles du moment, pour d'autres c'est le calvaire qui revient. On ne peut pas dire que pour Alice la reprise des cours était synonyme de calvaire, de corvée ni de mauvaise humeur. D'un côté, elle avait voyagé durant deux mois, avec des amis, loin de sa famille et loin de Berkeley. Sa mère a encore trouvé le moyen de claquer l'argent que son père lui a envoyé toute l'année et que la demoiselle avait pris soin d'économiser en prévision des vacances justement. Les parents d'Alice ont divorcé il y a quelques années maintenant. Son père lui envoie de l'argent tous les mois, pour qu'elle puisse s'acheter ce qu'elle veut en vêtements, en disques et autres. Sa mère quant à elle a du mal à joindre les deux bouts, les fins de mois sont toujours extrêmement difficiles, elle reproche donc à sa fille de ne pas l'aider. Elle lui a même reproché d'enter à Berkeley. La Thêta ne se préoccupe plus des remarques incessantes de sa mère, elle sait qu'un jour elle sera fière d'elle. Bref. Alice était entrée dans cette université afin d'étudier les Arts du film, sa passion. Elle entamait d'ailleurs sa deuxième année et espérait la réussir aussi bien (et pourquoi pas mieux) que sa première année. Les emplois du temps avaient été distribués, et Alice savait qu'elle avait deux heures de Théâtre à un moment de la journée, mais elle ne se souvenait pas tellement à quelle heure le cours avait lieu. C'est ça le problème avec la demoiselle, c'est qu'elle n'est pas très assidue. Elle a de bons résultats, elle s'investit un peu, mais pas à fond. C'est dommage car un travail sérieux et une présence régulière en cours lui permettraient d'obtenir d'excellents résultats. Cependant, Alice cherche la réussite, et non la perfection.

Alice s'était réveillée aux alentours de huit heures ce matin-là. Elle n'avait pas cours le matin, mais avait prévu de se promener un peu dans l'enceinte de l'école, histoire de repérer les nouvelles têtes, de revoir certains camarades et de se remémorer un peu la situation géographiques des différentes salles et amphithéâtres. Elle s'était habillée rapidement après avoir pris une bonne douche, ce qu'elle fait chaque matin pour se réveiller. Elle avait donc enfilé un jean et un t shirt, le soleil était encore au rendez-vous, mais pour combien de temps ? Après un petit déjeuner ultra rapide, elle avait quitté son logement à dix heures. Après un petit tour rapide par l'extérieur, la demoiselle avait cherché un amphi dans lequel elle pourrait se poser quelques minutes, au calme. Lorsqu'ils étaient vides, les amphis étaient le refuge de la Thêta. Elle savait que personne ne viendrait la chercher ici, sauf ceux qui avaient l'habitude de la trouver dans ces endroits frais et déserts. Assise sur la première marche de l'escalier, Alice avait sorti son iPod de son sac, avait mis ses écouteurs et avait allumé l'appareil. Elle avait fermé les yeux et s'était mise à fredonner, oubliant le monde qui l'entourait.

Les cours avaient commencé depuis quelques jours déjà. Contrairement à ce qu’il pensait, son intégration ne se faisait pas si mal que cela. De part son passé, Thomas avait énormément appréhendé son retour sur les bancs de l’école. Lui qui jadis fut populaire mais que depuis son grave accident avait perdu non seulement deux de ses amis et aussi et surtout la côte envers les autres... Avant cela, le garçon était connu pour ses talents artistiques, ses extravagances. Il aimait le gout du risque et n’hésitait pas à tenter le diable pour obtenir le cliché le plus original possible. Lorsque la photo était ratée, le jeune homme n’hésitait pas à reproduire l’image désiré à la perfection. La perfection dit on n’existe pas pour les dessins et pourtant… Si l’on ne précisait pas que la toile était faite artisanalement, on pourrait croire à un développage photo sur papier spécialisé. Erzak avait le défaut de ne pas signer ses œuvres. En fait, quand on lui demandait pourquoi, le garçon vous répondait qu’il n’avait pas encore trouvé sa griffe. Et tous maitres qui se respectent en a une unique. Thomas ne voulait pas s’amuser à tester différents styles de signature avant de trouver la bonne. Celle qui lui convenait. Pour lui, ce n’était pas sérieux.

L’intégration du jeune handicapé se faisait discrètement au sein du campus de Berkeley. Jusqu’à présent, le garçon n’avait pas entendu d’insultes à son propos. A moins que les autres étudiants soient trop hypocrites et lâches pour lui faire les remarques en face. Le Natural n’avait pas encore subit de maltraitance. C’était ce qui l’étonnait le plus à vrai dire. Chez les Thêtas, le petit nouveau avait un peu plus de facilité. Swen, le président de la confrérie l’avait pris sous son aile. Ce n’était pas étonnant sachant que les deux garçons se connaissaient depuis très longtemps. A Pacifica, l’un habitait la maison en face de l’autre. Ils étaient très proches. Lors d’une soirée organisée pour la nouvelle année universitaire qui débutait, Turner présenta une certaine Alice à son pote. Thomas la trouvait très jolie. Timide, il n’avait pas trop osé se coller à la fille. De nature assez solitaire, le garçon avait bien vite pris la fuite en prétextant qu’il était fatigué et devait aller se coucher. Aujourd’hui, comme les autres jours depuis qu’il a repris les cours, le jeune handicapé se réfugia dans un des nombreux amphithéâtres. Ne voulant pas imposer sa présence ou la vue de son fauteuil roulant aux autres étudiants, le jeune Erzak préférait se cacher entre deux cours. Cela lui évitait aussi les regards rabaissants sur sa personne. Alors que le garçon relisait un de ses cours, d’un coup il entendit quelqu’un chanter à quelques mètres seulement de lui. Le hasard faisant bien les choses, c’était Alice, sa consœur de la fameuse soirée. Content de la revoir, le garçon roula jusqu’à elle et l’écoutait avec admiration en attendant qu’elle s’aperçoive de sa présence. Thomas ne voulait pas la déranger durant sa pause chanson…