Juin deux mille seize ; Une douce mélodie flotte dans les airs et il faut suivre ce son pour découvrir le salon privé de Zachariah La Tour Dubois. Lieu où lui seul ( et quelques rares privilégiés ) peut se réfugier dès que l'envie lui prend. En cette matinée agréable, le pianiste est en train de s'exercer car il doit donner plusieurs représentations dans tous les Etats-Unis dans les semaines à venir. Autant dire que son rythme de vie est chargé. Moins qu'auparavant parce qu'il avait fait une croix sur sa carrière européenne.  Toutefois, dès que des mains douces viennent se poser sur ses épaules endolories à force de les contracter, il ne peut s'empêcher de s'arrêter de jouer. De bonne grâce, il prend une pause. Se tournant vers celle qui le fait sourire chaque jour qu'il vit, le jeune homme attrape avec légèrement Aislynn pour l'asseoir sur ses genoux. Tendrement, il dépose un baiser sur le bout de son nez. Il l'aime comme au premier jour et il remercie volontiers le destin de l'avoir placé sur son chemin et de donner envie de faire quelque chose de vie. Sans elle et ce qu'elle lui apporte, il ne serait pas l'homme qu'il est aujourd'hui. « Tu ferais bien de te préparer. N'oublie pas que tu déjeunes avec Adriel ce midi. » Lui rappelle sa compagne sur un ton de reproche gentillet. Le sous-entendu est clair : Va prendre une douche, mets des habits et pas des pulls déformés comme tu le fais pour traîner dans le loft et cours rejoindre ton meilleur ami parce qu'il ne va pas t'attendre toute la sainte journée. Zachariah a déjà usé et abusé de la patience de son dridri fétiche et il sait bien qu'il ne faut pas trop tirer sur la corde sinon elle lâche. De plus, ce qu'il a à annoncer ( et à demander également ) à son ami est tellement énorme qu'il ne faut pas le mettre dès le début dans de mauvaises conditions ni de mauvaise humeur. Néanmoins, il est peu ravi de devoir quitter sa composition en plein milieu. Aislynn lui rappelle que c'est pour la bonne cause et il n'y a qu'à voir le sourire béat du La Tour Dubois pour comprendre que c'est effectivement le cas. « A vos ordres mon capitaine. » Réplique-t-il taquin tout en esquissant un petit salut militaire. Ils rient tous les deux de la bêtise de Zachariah. Celui-ci se décide enfin à écouter la jolie blonde et il la soulève avant de la déposer sur le sol pour se lever à son tour. Elle a raison. Il doit mettre toutes ses chances de côté pour convaincre Adriel. Moins d'une heure plus tard, il est prêt à partir. D'un pas enjoué, il saute dans un taxi qui doit l'emmener dans un petit resto au plein cœur de Manhattan. Malgré la bonhomie que les traits de son visage affichent, au fond de lui, une petite angoisse l'étreint à chaque kilomètres parcouru. Il réalise que tout est soudain, tout paraît irréel et tout peut se renverser en une fraction de seconde. Il a prévu chaque détail, à condition d'avoir l'accord d'Adriel dans ce « projet » et dieu sait qu'il n'est pas forcément aisé de persuader son meilleur ami. Surtout face à une situation de cette taille. Cependant, un espoir est à concevoir : son acolyte ne l'a jamais déçu par le passé et il y a peu de chances pour que cela commence aujourd'hui. Les bouchons à cette heure de pointe le font maronner sur la banquette arrière. Finalement si, il risque bien d'être en retard. Il prend son mal en patience mais finit tout de même par payer le chauffeur en avance pour terminer à pied. Il ne reste que quelques centaines de mètres à parcourir et vu qu'il connaît un peu les lieux, il n'est pas perdu. Le jeune homme croise un marchand ambulant de roses et il lui en achète une au passage. Une idée bien farfelue à la Zachariah lui a traversé l'esprit et il compte bien la mettre en œuvre. Au détour de la rue, il voit son meilleur ami attablé à une terrasse. Il presse sa marche et se poste face à lui. « Je sais, je ne suis pas à l'heure mais ce n'est pas de ma faute. » Pour une fois, c'est bien vrai. La responsabilité de la circulation à New-York à cette heure de la journée ne lui incombe pas. D'accord, il aurait pu partir plus tôt mais ça, personne n'est censé le savoir. Avec un geste théâtral, il sort la fleur qu'il cachait derrière son dos pour la déposer sur la table face à Adriel. « Pour ma princesse afin qu'elle me pardonne pour ce fâcheux contretemps. » Dit-il avec l'art et la manière de se donner en spectacle. Oh, un jour, lui et ses conneries finiront pas tuer Adriel. Peut-être qu'aujourd'hui, il est encore plus gamin que d'habitude parce qu'il a une boule de stress qui l'obstrue. Ou bien, c'est naturel. Ce qui est possible également avec lui. Zachariah ne s'arrêtera jamais dans ses conneries monumentales qui font de lui l'être que l'on apprécie ( ou pas ). Il s'installe et commande un verre à boire. Puis, pour une fois, il reste silencieux. Il sait bien que c'est lui qui a plus ou moins provoqué cette réunion mais maintenant qu'il est face à ses responsabilités, il ne sait pas par quel bout commencer. Le musicien lève son nez et ses yeux vers le ciel histoire de le commenter. « Beau temps aujourd'hui. » Bien sûr, il a limite réquisitionné Adriel pour lui parler de la pluie, du soleil, de la température ambiante et du bulletin météo de la ville. Comme si son ami allait gober un pareil mensonge.

- Hey, you guys wanna see something funny ? - If this is where you lift your shirt up and make your belly button sing, no thank you.

« .Tu lui as dit que j'étais ton assistante. » « .Théa, tu es mon assistante. » « .Et toi t'es qu'un salopard. » Et elle a raccroché, après une dizaine de minutes à tergiverser sur le pourquoi du comment, et a tourner en rond sans qu'il comprenne ce qu'il pouvait bien avoir pu faire à Théa pour l'avoir mise dans un état pareil. Bien sûr, il comprenait que l'appellation '' assistante '' pouvait paraître fade, presque offensive compte tenu de leur relation actuelle. Elle l'était tout autant pour lui qui avait hésité en présentant Théa à l'un de ses collaborateurs, alors qu'il n'hésitait généralement jamais, sous aucun prétexte. Techniquement, elle était toujours son assistante, et aucun retournement de situation n'apparaissait dans leur horizon pour le moment. Tant que Théa travaillerait pour il, il refuserait de la considérer comme sa compagne et plus encore de le faire de vive voix. Sans l'avouer, il en était incapable pour le moment, malgré qu'elle ait une emprise certaine sur lui. Décrétant que sa beauté profane n'aurait aucunement raison de son professionnalisme, mais qu'il lui devait au moins de s'accrocher, Adriel chercha de nouveau son numéro dans son répertoire et tenta de la rappeler. Une telle bonne volonté, qui lui ressemblait si peu, tout ça pour tomber directement sur la messagerie. Loin de se fourvoyer, il ne fut pas difficile pour lui de deviner qu'elle allait lui faire payer grassement cet écart de conduite, si vraiment s'en était un. « .Merde. » grommela-t-il, résigné à la laisser se calmer le temps qu'il puisse rattraper le temps perdu autour d'un verre, voir plusieurs compte tenu de sa situation, avec Zachariah. Tout en téléphonant, il s'était rendu au point de rendez-vous fixé, et ce sans s'en rendre compte. La conversation animée l'avait occupé assez pour qu'il se rende à peine compte du retard de son ami, et le préoccupait encore bien trop pour qu'il puisse se refuser une cigarette, l'une de ses plus grandes faiblesses lorsqu'on le contrariait. Il poussa un soupir, conscient que la situation avec Théa, déjà particulièrement ambiguë, se compliquait maintenant que l'envie d'officialiser s'insinuait vicieusement en eux. Loin de pouvoir, et surtout de vouloir, se refuser une cigarette, c'est lorsqu'il extirpa le paquet de sa poche que Zachariah fit son apparition. « .Il pleuvra des mannequins de Victoria's Secret le jour où tu seras à l'heure. » marmonna-t-il, une cigarette éteinte dansant entre ses lèvres. Pitié qu'il soit un jour ponctuel, songea-t-il, délecté à l'idée de voir des bombes sexuelles tomber du ciel. Un briquet dans la main, c'est tout en allumant sa cigarette qu'il remarqua le cinéma de Zachariah. Regard en biais, soupir, première volute de fumée. Mais quel con, pensa-t-il, tout en levant les yeux au ciel. Il y a des choses qui ne changeraient jamais, et celle-ci en faisait largement partie. Il jeta un regard exaspéré à la fleur, et jugea judicieux d'éluder les regards. « .Ça te fait rire en plus ! Espèce de connard dégénéré, gros trou du cul ambulant, putain d'idiot du village, bourricot que t'es. » déclara-t-il dans un français parfait, d'un ton assez posé pour qu'il n'y comprenne rien, et ne puisse pas cerner l'aigreur de ses mots. Un rictus mesquin, l’équivalent d'un sourire béat pour Adriel, vint ourler ses lèvres. « .Ça veut dire que ça me fait plaisir, grande folle. » En gros. Posé, et attendant avec grande impatience un double bourbon avec glace, Adriel poussa un soupir et arriva, en constatant avec plus ou moins de plaisir que son illustre compère ne changeait pas de son côté, à se détendre. La clope aidant aussi à l'amélioration de son humeur, de toute évidence. Il savait que fumer était mal, surtout pour son image (ce même si ce petit détail le rendait encore plus diaboliquement sexy), mais là résidait une mauvaise habitude trop bien ancrée en lui pour qu'il s'en débarrasse. Il fumait dès qu'il était tracassé, voir énervé. Et Théa était une excellente raison de fumer à ses yeux. En cherchant un cendrier, il manqua de mettre le feu à la précieuse fleur de Zachariah. « .Moi qui pensais que tu t'arrangerais avec l'âge. » soupira-t-il, résigné à avoir un gosse pour meilleur ami jusqu'à l'éternité. Ou au moins jusqu'à ce que la mort les sépare. Attendant patiemment de savoir ce pourquoi l'ancien oméga lui avait fixé un rendez-vous, important avait-il dit au téléphone, Adriel déchanta devant son bulletin météo. Affichant une moue contrite, il le jaugea du regard un moment, avant de lancer : « .Tu veux une baffe ? Dépêche-toi de me dire ce que tu me veux. » d'un ton assez ferme pour qu'il comprenne qu'il devait se grouiller. Adriel n'aimait pas les surprises, ni le suspense et Zachariah, tout meilleur ami qu'il était, le savait pertinemment. Et en jouait, évidemment. « .Ou bien je raconte à Aislynn que c'est toi qui a pissé dans son tiroir à chaussettes le soir du bal de promo. » C'est Scott, en fait. Mais qui du très sérieux Adriel, et du beaucoup moins sérieux et toujours très alcoolisé à l'époque de l'Université, Zachariah, Mademoiselle Woobleforth déciderait-elle de croire ? Il fit comprendre son petit manège à Zachariah d'un regard appuyé, avant de reprendre : « .Si tu es là pour me demander un mariage, ou quelque chose de ce style, la réponse est toujours non. » Et elle l'était d'autant plus maintenant qu'il s'envoyait la plus grande bombe sexuelle qu'il ait pu se dégotter dans tout New York. Pas qu'il veuille se marier avec Théa. Plutôt que si elle s'énervait lorsqu'il avait le malheur de l'appeler son assistante, ce qu'elle est, n'est-ce pas, alors une demande en mariage.

L'humour et Adriel font deux. Sa remarque ironique et un brin cinglante envers Zachariah ne le fait même pas sourciller. A force, il a l'habitude. Ses lèvres se plissent en un rictus légèrement amusé. Ou pas. Il a beau ne pas comprendre tous les mots que vient de débiter Adriel, il n'en reste pas moins qu'il a saisi le sens général de la phrase et qu'on est bien loin du compliment de base comme peut l'affirmer son ami. « Ma sœur est française et elle adorait me traiter de dégénéré qui n'aurait jamais dû être un La Tour Dubois dans sa langue natale. Figure-toi que je connais quelques notions. » Certes, sans être un champion dans la langue de Molière. Loin de là. Il patauge avec la conjugaison et n'arrive pas à accorder correctement ses phrases malgré les tentatives de Constance à lui faire apprendre quelques phrases d'usage. Elle ne le prend pas pour un inculte mais presque. Quoi qu'il en soit, il n'est pas né de la dernière pluie et sans comprendre le sens véritable de la tirade d'Adriel, il n'y a rien de glorieux pour lui dedans. Il marmonne un vague hmm hmm peu convaincant quand à l'idée de s'améliorer avec l'âge. Si seulement il savait … d'ici quelques mois, il n'aura plus le choix que celui d'être exemplaire en tous points. D'essayer en tout cas. Réussir est une autre paire de manche. « Ce que tu peux être rigide parfois. » Dit Zachariah en lui balançant un long soupir de désappointement au visage. Limite pas drôle même. Donner une baffe à son meilleur ami alors que celui-ci sacrifierait sa vie entière pour lui … Quel remerciement. Le musicien se donne plus ou moins en spectacle pour ne pas avoir à dire le pourquoi du comment qui lui donne des sueurs froides. Toutefois, il va lui être difficile de tourner autour du pot indéfiniment quand on connaît Adriel et son manque de patience légendaire. Zach' n'a qu'à bien se tenir parce qu'il est clair que son compère va lui faire cracher le morceau d'ici peu. « Eh oh, j'ai rien fait du tout ! » S'exclame-t-il en grimaçant au souvenir du cri perçant que sa petite amie avait poussé lors de la découverte qui fut franchement immonde. Bien évidemment, de base, il aurait eu envie de lui dire qu'Aislynn ne l'aurait jamais cru coupable d'un tel fait néfaste envers elle … Cependant sa réputation de l'époque ne joue pas en sa faveur et ce serait tenter le diable en personne que de provoquer Adriel à aller le lui conter. Autant que cette histoire reste dans un coin de leur mémoire et pas ailleurs. Il meurt d'envie de lui faire un bon gros fuck histoire de le remettre à sa place mais il n'oublie pas quelle demande doit avoir lieu dans moins de cinq minutes. Autant mettre toute les chances de son côté plutôt que de jeter de l'huile sur le feu et de se retrouver comme un con avec une réponse négative. A la place, il grommelle dans son coin des inepties à l'encontre de son ami. « Niah, niah, niah. Je vais pas te demander en mariage. De toute façon, je ne t'aime pas assez pour ça. » Faux, faux et archi-faux. Si le mariage de l'amitié existait, Zachariah serait déjà en train de faire la queue pour publier les bans de son mariage avec Eynsford-Baxter. Que cela lui plaise ou non. Malheureusement pour lui, une telle cérémonie n'avait pas ( encore ) vu le jour aux usa. Il comprit que Adriel n'était pas ici pour jouer aux cartes ou pour passer le temps mais bel et bien pour apprendre ce que Zachariah avait à lui annoncer. Il était donc l'heure de passer aux choses sérieuses et de laisser les broutilles de côté. « Bon écoute, t'as le droit de dire non à ce que je vais te proposer. » Zachariah passe du coq à l'âne en une fraction de seconde. Et sa première explication est plus qu'approximative. Il imagine déjà Adriel le dévisager avec cet air qui veut tout dire et principalement un : il m'emmerde ce mec mais il m'emmerde. Mais bon, le musicien n'est déjà pas à l'aise alors si en plus, il doit faire avec les états d'âme de son ami, on ne va pas s'en sortir. « Je vais pas te mentir : ça m'arrangerait que tu dises oui. » Sans broncher si possible ni rechigner à la tâche et il sera le superman de la journée du La Tour Dubois. Sans lui expliquer les faits, cela semble légèrement compromis. Le jeune homme attrape son verre et en boit une gorgée pour se donner un semblant de courage avant que la nouvelle vienne éclater. « Aislynn est enceinte … » Et ça pour être une nouvelle, c'est la plus grosse qu'il ne puisse offrir à Adriel. Lui qui pensait qu'il allait le demander en mariage … Eh bien non, raté. Il laisse planer un silence, de quoi faire son effet. Pour une fois, qu'il ne s'amuse à être le parfait idiot, il en profite. « Je vais être papa 'Dri.' » Et là, Adriel comme n'importe quel humain doté d'un minimum de bon sens peut percevoir la tension qui règne dans la voix de Zachariah. Parce qu'il a beau faire son fanfaron, il n'en reste pas moins qu'il est terriblement apeuré à l'idée de ne pas être à la hauteur dans cette vie qui s'offre à lui et qui l'enchaîne pour les vingt prochaines années. « Et ce serait cool si … » Il s'arrête, reprend son verre pour la seconde fois en un laps de temps ultra court avant de le reposer sans en avoir bu une goutte. Ses prunelles se plantent dans celles d'Adriel. « Tu es mon meilleur ami alors j'ai pensé que t'aimerais bien être le parrain de mon enfant. Moi j'aimerais que tu le sois. » Affirme la jeune homme le plus honnêtement du monde. Des hommes qui ne sont que des connaissances dans sa vie ou bien dans la vie d'Aislynn, il en existe des dizaines. Ces derniers auraient sûrement aimé prendre cette place si désirée à la naissance d'un bébé. Des dizaines de mecs en ce vaste monde. Un seul Adriel qui orne de sa présence la vie de Zachariah depuis des années. Une seule amitié aussi solide de la leur alors qu'ils sont si foncièrement disparates. Un seul oui pour sceller une union quasi familiale.

« .Quelques notions, mais rien qui puisse même te rapprocher de ce que je viens de dire, j'en ai bien peur. » rétorqua-t-il, régalé par sa propre prestation. Zachariah pourrait bien se vanter d'avoir quelques notions autant de temps qu'il le voudrait, lui possédait tout un langage à disposition, dont beaucoup d'expressions que l'américain croisé russe ne pourrait jamais comprendre le sens. Satisfait et incroyablement délecté d'avoir enfin expérimenté le jeu inventé il y a des années par Constance et Manon (consistant à parler exclusivement français en la présence d'un certain italien) sur Zachariah, Adriel opta pour l'habituelle attitude blasée qui lui allait si bien, afin d'aborder la suite. Parfois rigide ? Parfois  ? Il était sévère, et intraitable tous les jours, à chaque instant de ses journées, non pas parfois, et le vivait plutôt bien. Les seuls malheureux instants où il se détendait, et offrait un peu plus de souplesse à sa personnalité peu engageante, se résumait aux quelques fois où il n'avait pas su boire, et s'était retrouvé ivre (ou drogué, remerciement de circonstance largement décernés à un certain Scott). Et bien sûr, le fait que Zachariah eut assisté à chacun de ces moments faisait et ferait toujours bien son infortune. Voilà maintenant que l'ancien Doyen des Omégas avait pris l'habitude de cette euphorie grotesque qui l'étreignait à chaque fois qu'ils abusaient des stocks d'un bar, et maronnait devant l'Adriel de tous les jours. « .Comme si tu ne le savais pas. » soupira-t-il, en haussant les épaules. Pas tous le monde possédait l'énergie d'être un lutin heureux en permanence, prêt à répondre la joie et le beau temps. Lui en tout cas n'avait pas le temps pour ce genre de balivernes, ni l'énergie d'ailleurs et probablement pas l'humour non plus. Ni la patience… ni rien. Assis et attendant patiemment son scotch double, Adriel laissa son regard flirter avec le cadeau parfumé (et complètement ridicule) que Zachariah s'était empressé de lui offrir, aussi fier qu'on puisse l'être. D'un geste de la main, il l'envoya balader sur son meilleur ami, qui souriait encore jusqu'aux oreilles de son indescriptible connerie. Ah oui, il ne l'aimait pas assez ? Come on. Personne ne pourrait jamais croire ça. « .Menteur. » rétorqua-t-il, l'ombre d'un sourire sur les lèvres. « .C'est probablement toi qui m'aime le plus au monde. » True Story. Plus que d'être probable, ça devait probablement être vrai, et largement vérifiable. Surtout en ce moment, puisque tout célibataire qu'il était, personne ne pouvait prétendre pouvoir faire concurrence au La Tour Dubois. Charlotte devait bien l'aimer de façon inconditionnelle aussi, mais ne soutiendrait jamais la comparaison avec Zach'. Si tant est que quelqu'un le puisse un jour, ce dont il doutait. « .Et je suis presque sûr qu'Aislynn doit se demander si tu ne m'aimes pas plus qu'elle. » plaisanta-t-il, caustique comme toujours. Mais l'heure n'étant pas au pronostique sur qui aimait qui le plus, Adriel se concentra sur son verre fraîchement servi et sur la divine serveuse qui s'occupait de leur table, et lui avait adressé un sourire en passant. Le verre sur les lèvres, il posa un regard distrait sur Zachariah qui, comme à son habitude, ne ménageait pas le suspense. Bla bla bla, talk faster goddammit, pensa-t-il, rarement patient lorsqu'il s'agissait d'assouvir sa curiosité. Une gorgée, et Zachariah blablatait encore. Une seconde et… tiens… il progresse. Poussant un soupir, et devinant, plus ou moins bien, où Zach' voulait en venir, Adriel poussa un soupir. « .Ça sent le mariage, ton truc. Ne fait pas ça Zach', le mariage n'est rien de plus qu'un piège de bonne femme. Je refuse d'être tém... » ...oin de pareille atrocité. Bien sûr, le moindre de ses respects s'envolèrent vers Aislynn, qu'il appréciait malgré tout et bénissait chaque jour de supporter Zachariah La Tour Dubois, et de le faire avec le sourire. Toutefois, il fut coupé dans son marasme par la nouvelle, la vraie. « .Enceinte ? Ew. » grimaça-t-il, écœuré par l'image même d'un enfant. Pire que le mariage : les enfants. Doué dans l'art de fuir tout ce qui touchait de prêt ou de loin à une relation sérieuse, Adriel nourrissait une aversion particulière pour les enfants, et l'idée qu'il puisse en avoir et ainsi être lié à vie avec quelqu'un. Il eut l'étrange, et atroce, sensation d'être devenu Manon pour son '' Ew '' grossier, et complètement hors limite. Réalisant son comportement, et combien il n'avait pas le droit de bouder le bonheur de son meilleur ami (et surtout qu'il n'était pas celui qui allait avoir des enfants, dieu merci), Adriel décida de se reprendre. « .Attends, on la refait. » Wait for it. « .Enceinte ?! Félicitations !. » s'exclama-t-il, assénant une bonne tape sur l'épaule de Zach', et une autre droit dans la tronche. Un rare sourire fit son apparition sur ses lèvres et tout en s'enfonçant de nouveau dans son siège, il contempla son petit connard de meilleur ami qui devenait grand et mâture. Coup de vieux monumental à prévoir. « .Mon dieu, tu vas vraiment être le meilleur père qu'un gosse puisse espérer. » qu'il déclare, le ton assuré. « .Et le plus irresponsable aussi. Me choisir moi comme parrain, pire décision possible. Tu ne sais pas dans quoi tu t'engages, franchement. » Lui confier cette responsabilité, à lui, qui détestait les enfants et les étiquettes, relevait de l'inconscient. Pourtant il se doutait qu'il l'avait longuement envisagé, et si Aislynn avait donné son accord… soit ils étaient sûrs de leur coup et de leur confiance en lui (ce qui le touchait plus qu'il ne voulut l'admettre), soit ils étaient aussi cinglés l'un que l'autre. Possible. « .Je fais déjà un piètre petit ami, alors un parrain ? Pauvre gosse. » Théa pourrait le confirmer. Tout comme Ellie, Charlotte, Eden et Manon. Parfait gentleman, petit ami médiocre. « .C'est d'accord. » finit-il par concéder, spontanément. Pourquoi ? Parce que s'il se retrouvait dans la situation de Zachariah, et s'apprêtait à être père, Zachariah serait son premier choix et celui qui serait non négociable. « .T'es content ? T'as planté ta graine dans la capitaine des cheerleaders. Bien joué. » Le capitaine des ivrognes de Berkeley et la capitaine des cheerlearders, magnifique cliché, qui fonctionnait du feu de dieu. Ce gamin, fille ou garçon, serait sans conteste une rock star en grandissant. « .Je me souviens encore du jour où vous vous êtes rencon'… Oh attends. Mais non, en fait je ne m'en souviens pas du tout, j'étais drogué par ta faute. » Il avait si peu de souvenirs de cette soirée. Il savait s'y être rendu, avoir beaucoup picolé, mais le reste n'était qu'un nuage bien trouble, bien dense. « .Et maintenant vous allez avoir un bébé. » Who knew.

Il balance un vague grognement en direction de son ami tout en agitant la main comme pour le faire taire. Évidemment qu'il n'est pas bilingue avec une langue telle que le français et toutes les subtilités qui en regorgent. Néanmoins, il a parfaitement le sens de la phrase. Même si certains mots ont échappé à sa compréhension. De plus avec les expressions faciales d'Adriel et sa gestuelle, Zachariah sait pertinemment qu'il en a pris pour son grade. Ce qui le laisse passablement froid car il a bien d'autres soucis en tête. Comme celui de trouver les bons mots pour le convaincre d'accepter sa proposition. Alors en soit, Adriel peut bien dire ce qu'il veut, rien n'est plus important aux yeux du La Tour Dubois que l'annonce qu'il va avoir à faire d'ici quelques minutes. « Si je le savais mais j'avais le stupide optimisme qu'avec le temps tu t'améliorerais. » dit-il avec l'envie irrépressible de lui tirer la langue comme un gosse. Ce qu'il ne fit pas. Preuve que mine de rien, avec les années, ce joyeux ancien omega avait tiré les leçons de son passé et s'était un tant soit peu assagi pour le bien de tous. Peut-être pas assez aux yeux de son compère, certes. Mais bon, on ne peut pas radicalement changer du jour au lendemain, c'est juste impossible. Puis, Zachariah est connu pour être un bout en train. S'il devenait aussi ennuyeux que la pluie, il y avait fort à parier qu'Adriel ne l'apprécie plus autant. Peu ressemblants, ces deux-là se complétaient dans leurs façons d'être. De bonne grâce, le musicien émit un rire. « Je plaide coupable. » finit-il par dire avec bonhomie. Il reprit cependant bien vite, un semblant de sérieux. « Quoi que si on prend Manon, Eden, Charlotte, ton assistante sexy et toutes les autres dont le nom et le souvenir m'échappent … il y a fort à parier que j'ai de la rivalité question amour pour le merveilleux Adriel qui fait battre tous les cœurs qu'il rencontre. » il y a dans le son de sa voix, une sorte de raillerie qui pourrait presque passer pour de la jalousie. Presque. Mais bon, il sait bien que malgré leurs nombreuses chamailleries et le nombre incalculables de soupirs que poussent Adriel à cause de lui, son ami le chérit tout autant que lui. Sauf qu'il le montre moins. Ah les hommes et leur pudeur à ne pas dévoiler leurs sentiments, quel gâchis. Le jeune homme se renverse sur le dossier de sa chaise devant tant d'assurance. Non Aislynn ne se pose pas ce genre de question, dieu merci. Elle sait bien que Zachariah éprouve une affection sans borne pour son acolyte mais de là à songer au fait qu'elle passe au second plan … Non, il n'y a aucune chance pour que ce genre de choses arrive un jour. « Ne t'inquiète pas pour elle, je m'occupe de lui prouver ma préférence à chaque fois que je le peux. » clin d'oeil coquin à l'appui. Il n'entre pas dans les détails mais Adriel n'a pas besoin de cela pour deviner à quoi ce grand dadais fait référence. Il n'est pas né de la dernière pluie. Il trempe ses lèvres pour goûter le liquide qui envahit sa bouche tout en jouant avec les nerfs de son ami. Dans moins d'une minute, il l'aura agacé pour de bon et lui aura envie de se taper un fou rire en voyant son dridri ronger son frein pour ne pas lui hurler dessus. Le musicien tente quelques explications peu rigoureuses et au final, il se fait pratiquement coupé dans son élan par un Adriel qui pense avoir découvert le pot aux roses. Sauf qu'il est bien loin de la vérité. Ceci dit, un mariage aurait été possible mais pas pour le moment. Zach' a bien d'autres choses à penser en ce moment. Organiser un mariage sera pour plus tard. Dans quelques mois … Ou années, il verra. « Je ne vais pas me marier, ne suffoque pas. » Lâche le jeune homme très sérieusement face à la réaction d'Adriel. Vu son dégoût apparent à l'idée de faire passer la bague au doigt et plus précisément la corde au cou, il est clair qu'il n'est pas prêt d'assister au mariage de son meilleur ami. Dans la foulée, il lui annonce alors que sa compagne est enceinte. Inutile de faire durer le suspens plus longtemps parce qu'il est clairement en train de perdre Adriel dans ses suppositions plus farfelues les unes que les autres. Surpris et volontiers un brin boudeur face à l'exclamation qui suit sa révélation, Zachariah croise les bras contre son torse, toute trace de rire et de joie envolée. [color=cornflowerblue]« Ew ? » Moyen moyen comme réaction, il s'attendait à mieux. Pour une fois, c'est lui qui soupire face à l'attitude de son compère qui fait mine de revenir en arrière et de reprendre contenance en effaçant sa piètre démonstration de bonheur pour lui. Forcément le musicien n'est pas du tout convaincu et ses traits restent soucieux. Étant donné ce qu'il a à demander par la suite à Adriel, il se trouve un peu désemparé. Peut-être que finalement son choix premier n'était pas le bon et qu'il va se faire remballer splendidement. Sceptique, il laisse Adriel le couvrir de compliments. « Meilleur j'en doute. Je vais déjà commencer par essayer d'être un bon père … Sans commettre trop d'irresponsabilités. » sur ce point là, Zachariah est tout sauf sûr de lui en la matière. Il n'a pas de référence paternelle ( ou si peu ) donc il devra s'en sortir au feeling en croisant les doigts pour éviter au maximum les impairs. Le connaissant, il existe des risques certains pour que tout ne se passe pas comme prévu mais Aislynn lui a assuré que tout se passerait pour le mieux. Alors il lui fait confiance. Un peu nerveux en attendant la réponse, il se dandine les fesses sur le siège en s'amusant avec son verre. Dieu que Adriel est long à lui dire si c'est oui ou non. Lorsqu'il accepta, Zachariah étouffa un petit cri de joie. Non, il y avait mieux à faire. Bien mieux qu'un vaste cri qui se perdrait dans la masse de la population new-yorkaise. Il se leva et attrapa Adriel avant de lui faire un smack sans que ce dernier ne puisse réagir et se défaire de son étreinte. « Il a dit oui ! Il a accepté ! Vous avez entendu ? Il a dit ouiiiiiiiiii ! » qu'il s'écrie avec une conviction proche de l'extase en levant les bras tel un fou. Forcément qu'ils attirent l'attention. Pire, ils passent pour un couple de gay. Le comble pour celui qui est considéré par toutes les filles comme le prince charmant. De quoi se venger un minimum de son peu d'entrain face à l'idée de la grossesse d'Aislynn. Satisfait de lui et de sa petite prestation, le jeune homme se rassoit à sa place tout en continuant d'aborder un sourire débordant d'énergie. « Oui je suis content. Pour mon bébé et pour cette petite scène. » Provocante à souhait comme le déteste tout particulièrement son meilleur ami. Il se réjouit intérieurement. Zachariah boit une nouvelle gorgée avant de hausser les épaules, se sentant peu concerné par le problème évoqué. Depuis le temps que tout ceci s'est passé, il y a prescription. A vrai dire, il n'est pas directement l'instigateur de tout le bordel qui a eu lieu la fameuse soirée entre les iota et omega de Berkeley. Mais pour Adriel, le coupable tout désigné était sa petite personne. « Scott était à l'origine de tout ceci. Je n'ai fait que suivre le mouvement. » Ce n'est pas totalement un mensonge. Disons qu'il était, à cette époque, facilement manipulable et bon public pour faire des bêtises trois fois plus grosses que lui. « Et tu vas être parrain. » Lui rappelle avec énergie le musicien. Une petite piqûre de rappel histoire que dridri comprenne bien son importance dans l'histoire.