Sydney était une fêtarde accomplie du haut de ses 21 ans. Before, after, etc., elle était de toutes les fêtes de la plus chic à la plus trash tant qu'elle arrivait à s'amuser. Rendue au point où elle arrivait tout de même à travailler correctement même avec une gueule de bois de débutante, la belle blonde avait rapidement fait le tour des endroits les plus fréquentés de San Francisco pour savoir à peu près où elle pouvait s'amuser et dans quelles conditions… voilà pourquoi ses pas l'avaient menée tout droit à l'Absinthe Bar ce soir.
Agressions, menaces, intimidation, lettres et appels anonymes… l'égyptienne subissait de forts moyens de pression destinés à la faire craquer pour une raison encore obscure de la part d'un homme apparemment déterminé à la faire craquer. Pour l'heure, seules quelques rares personnes comme Stephen - l'artiste qui l'avait récemment sauvée un soir - étaient au courant des déboires qu'elle devait endurer. Selon elle, moins les gens seraient au courant, mieux cela vaudrait : ils ne seront donc nullement visés ou intégrés dans cette sordide histoire, elle aurait culpabilisé que des innocents soient touchés de près comme de loin à ce qu'elle se coltinait.
Vous vous doutez bien qu'avec un tel programme peu réjouissant ces dernières semaines, elle cherchait un moyen de s'évader pour ne pas craquer. Rien qu'aujourd'hui, elle avait reçu 5 appels du même style que les précédents. Menaces de mort ou de viol avec une voix on ne peut plus terrifiante. Solution made in Sydney pour outrepasser ces ennuis ? Une bonne fête sans la moindre inhibition.

A peine mit-elle un pied à l'intérieur du bar que la douce odeur de l'alcool parvint à ses narines… elle en ferma les yeux et soupira de bonheur. Ses soucis venaient d'être relégués à l'entrée du bar et elle n'y pensait déjà presque plus… encore moins lorsqu'elle vit une tête on ne peut plus familière. L'un des rares hommes avec qui elle était absolument certaine de savoir comment la soirée allait se terminer… ce qui était paradoxal dans le sens où elle ne savait pas dans quel état elle allait finir. Tout ce qu'elle savait, c'est qu'il serait son meilleur compagnon fêtard pour ce soir.
D'un pas félin et excentrique, elle traversa le bar sans se soucier des regards intéressés qui se posaient déjà sur elle. Il faut dire que même déprimée ou stressée, son goût pour la mode se voyait clairement sur son corps de déesse : une petite robe rouge jusqu'à mi-cuisses, une paire de talons aiguilles noirs avec quelques bijoux dans les mêmes tons et une coiffure relâchée pour une touche de laisser-aller. Un maquillage léger histoire de passer la soirée dans de bonnes conditions… rouge et noir, elle était sûre de pouvoir allumer tout ce qui lui passerait devant le nez.
Arrivée près du jeune homme seul - pour le moment - qu'elle avait repéré, Sydney lui prit des mains le verre qu'il allait porter à sa bouche et le descendit cul-sec sous ses yeux, sans se soucier d'éventuelles protestations ou d'une forme quelconque de surprise. La fashionista reposa le verre vide sur le comptoir et adressa un clin d'œil à sa "cible".

"Marvin… première consommation offerte, tu es vraiment trop galant. Commandes-moi une deuxième et là tu seras adorable !"

Marvin, c'était l'un de ses meilleurs amis pour faire la fête… mais ensemble, il s'agissait de fêtes "no limit". Ce dont ils étaient souvent sûrs, c'est qu'ils finissaient au lit pour des parties mémorables ensemble… mais où et dans quel état, c'était toujours l'inconnue de cette équation récurrente. Elle se hissa sur un tabouret puis croisa ses jambes fines l'une sur l'autre tout en donnant du mouvement à ses cheveux.

"Je ne sais pas si tu avais des plans pour ce soir, mais tu les annules. Voilà le programme : on picole et on se bourre jusqu'à plus soif, on fait la fête n'importe où et on se réveille demain matin en prétendant que tout ceci n'est jamais arrivé et qu'on ne recommencera plus jamais même si on sait tous les deux que c'est faux. Crois-moi, tu vas a-do-rer !"

Sydney avait fait un léger mouvement de sourcils, appréciant silencieusement que Marvin fasse des "exceptions" pour elle quand il s'agissait de faire la fête… il faut dire qu'elle n'avait pas son pareil pour faire preuve de sans gêne dans n'importe quelle situation. L'avantage de faire preuve d'un tel comportement avec une personne comme l'étudiant, c'est qu'il y avait du répondant en face : non seulement il ne se vexait pas ou ne s'offusquait pas de l'excentricité de la jeune femme, mais en prime il y ajoutait son grain de sel pour pimenter un peu tout ça. Un fêtard dans l'âme, un vrai : un homme qui n'a absolument pas peur de se lâcher sans savoir ce qui peut l'attendre au bout de la nuit. C'est exactement ce qu'il lui fallait pour être certaine de profiter à fond de cette soirée sans songer au moindre petit tracas du quotidien.
C'est donc avec un air presque assoiffé malgré la descente du premier verre qu'elle accueillit le second, soudain attentive à la petite remarque de l'Omega. Elle se rapprocha doucement de lui à son tour et se mordilla très sensuellement la lèvre inférieure. "Parce qu'on a déjà eu des limites avant, nous…?" Il faut avouer que le nombre de fois où les deux jeunes gens s'étaient retrouvés entraînés dans des situations toutes plus cocasses et insolites les unes que les autres, Sydney en était même venue à se demander s'ils arriveraient un jour à se fixer des limites ou bien s'ils allaient tout simplement continuer leur train de vie fêtarde jusqu'au jour où ils atteindront d'éventuelles limites. Qu'importe, tout ce qui compte, c'est qu'il soit sur la même longueur d'ondes. Elle descendit ainsi son deuxième verre également et déposa une main sur sa hanche en se cambrant légèrement lorsque le regard du beau brun glissa sur elle avec envie. Aucun doute, l'alcool et l'ambiance y étaient pour quelque chose, mais la fashionista adorait se sentir désirée et convoitée… à plus forte raison lorsqu'il s'agit d'un spécimen aussi bien taillé que Marvin. L'égyptienne le laissa s'approcher d'elle furtivement, ce compliment lui fit rouler les yeux alors qu'elle prenait une posture digne d'un mannequin professionnel. "Je sais… en fait, je dois faire preuve d'un immense contrôle pour ne pas m'arracher moi-même mes vêtements tellement je me trouve sexy…" A-t-on oublié de préciser que le narcissisme était presque devenu une véritable religion chez la jolie blonde ? Boarf, ce défaut comme un autre, on va dire que c'est ce qui fait son charme, après tout. Puis cette sorte d'assurance arrogante avait le don de plaire et d'exciter beaucoup d'hommes alors autant l'exploiter le plus possible.
Mine de rien, elle fit vagabonder son pied le long de la jambe de Marvin en le détaillant à son tour… il avait le chic de porter un rien pour se mettre en valeur. Le genre de tenue qui vous fait forcément rêver à ce qui se trouve en dessous. "J'espère que tu ne tiens pas trop à tes vêtements, tu pourrais ne pas les retrouver ce soir..." Une moue vivement intéressée flotta sur ses traits fins avant qu'elle se rapproche de lui… pour l'heure, la miss Khelos n'en était qu'à son troisième verre. Ce n'est souvent qu'à compter du cinquième qu'elle commence à quitter toutes ses inhibitions (si tant est qu'elle en ait déjà étant sobre). "Et si on faisait faire faillite au bar ? On va faire un jeu : en se déplaçant dans le bar, on vide tous les verres de chaque client qu'on croise, ça te va ?" Vu le nombre de clients présents, l'heure suffisamment avancée pour que chacun ait passé commande et les mélanges impromptus que ce challenge représentait, rien n'indiquait la manière dont ils allaient terminer. "J'ajouterai que tous les moyens sont permis pour obliger un client à céder sa consommation…" lança-t-elle avec un sourire coquin. En gros, c'était soit la cuite du siècle et une folie fêtarde débridée, soit le coma éthylique puis la cellule de dégrisement. La secrétaire de Berkeley se redressa sur son tabouret et prit un port de reine dévergondée. "Je te laisse choisir les enjeux pour le gagnant et le perdant, ça va de soi…"