Un enterrement de vie de garçon. Qu'est-ce que c'est ? Je vais vous le dire pour l'avoir déjà vécu une fois. Une soirée faite en l'honneur du futur marié pour lui rappeler les joies du célibat et par conséquent, à quoi il n'aura plus le droit. Oui, dans le fond, c'était comme montrer une fondue au chocolat sous le nez d'une personne qui vient d'apprendre qu'elle est diabétique. Mais à côté de cela, cette soirée a de très bons aspects : plusieurs heures avec les copains, à faire les idiots, à boire comme des trous, filer droit dans un club de striptease, faire la fête, rire à finir par terre et parfois même jusqu'à ne plus avoir envie de passer une alliance au doigt d'une femme. Et c'est ce qui allait se passer. À la fin du mois, j'allais me marier avec Maria O'Berkeley, promue au poste de directrice d'une des plus grandes universités du monde. Nous allions célébrer notre amour par un mariage civile. En effet, la brunette étant juive et moi chrétien, nous trouvions plus judicieux de mettre à part nos religions respectives pour nous marier devant un maire. Nous allions nous dire oui, ici même, dans cette commune irlandaise, à 15 minutes à peine de Dublin, la capitale.

Nos proches étaient bien évidemment conviés. Et parmi eux Alcide, Cooper, Byron et Ezéckiel, venus tout droit de San Francisco pour cet événement. Ils ont même décidé de venir quelques jours avant pour faire mon enterrement de vie de garçon. La maison de mes parents allait rapidement finir en véritable squat. Heureusement qu'ils ont eu une famille nombreuse et donc que la demeure est assez grande pour caser quelques personnes dans telle ou telle pièce. Ainsi, quand j'ai vu débarquer mes quatre amis un beau matin, je n'ai pas pu m'empêcher d'exprimer ma joie en leur sautant dessus. Ça me faisait clairement plaisir qu'ils se trouvent là, en Irlande, pour Maria et moi. Pour assister à notre mariage.

Nous nous trouvions à un petit quart d'heure en voiture de Dublin. Qui dit Dublin, dit pub à gogo, Whisky, Guiness et autres boissons alcoolisées coulant à flots. De quoi les mettre de bonne humeur et désireux de faire la fête. Je n'avais pas vraiment prévu un enterrement de vie de garçon dans la mesure où j'en ai déjà eu le droit à un lorsque je me suis marié à Sarah, la mère de mes enfants. Mais c'était sans compter sur Alcide qui semblait déjà avoir un programme bien précis pour un soirée de folie que personne ne semblerait oublier. Ainsi je le laissais faire. On connaît mes penchants pour les soirées, je n'allais donc pas faire une quelconque objection.

Puis vint cette fameuse soirée. Nous sortions à peine de table et nous trouvions juste en face de la porte de la maison de mes parents, à l'extérieur. Alcide, Ezéckiel et moi fumions une cigarette alors que Byron et Cooper étaient tout de même présents. « Allez ! Laissez moi venir avec vous ! » Elle, c'est Alice, ma petite sœur. En fait, nous avons un an et demi de différence. Nous avons été élevé comme des jumeaux. Une charmante brune aux yeux bleus et je fusillais déjà Van Stexhe du regard. Hors de question qu'il touche à ma petite sœur, même si elle du genre fêtarde, tête brûlée et surtout, célibataire à ses heures perdues. Au niveau de la personnalité, c'est moi. Oui, moi, mais avec un vagin et une poitrine. Bon, et un physique différent aussi, je vous l'accorde. Elle me piqua ma cigarette pour tirer dessus. « Non Alice, c'est une soirée entre hommes. »

Théoriquement, il n’y avait aucune raison d’enterrer la vie de garçon d’Edward O’Malley. Ce n’était pas parce qu’un homme se remariait que l’on enterrait forcément sa vie de garçon. Mais bon, au fond, pourquoi pas ? c’était une occasion de faire la fête et sans que Maria ne puisse rien dire, cette fois, elle qui détestait tant savoir son futur époux en compagnie d’un si mauvais ami qu’Alcide, cette fois-ci, elle n’avait pas voix au chapitre. Et c’était tant mieux.
À vrai dire, van Stexhe avait du mal à comprendre cette femme. Elle ne l’aimait pas parce qu’il entrainait Edward dans des beuveries, ok. Mais avait-elle le même dégoût, alors, pour Cooper, Byron et Ezéckiel qui n’étaient pas les derniers dans le domaine ? au fond, c’était peut-être juste de la jalousie mal placée… parce que depuis qu’il avait Elyott à sa charge, Alcide sortait beaucoup moins et donc entraînait aussi bien moins souvent son frère de bière avec lui.
Mais bon, il y a toujours des questions qu’il vaut mieux éviter de se poser et les raisons qu’ont les femmes de ne pas vous apprécier à votre juste valeur en font partie. Rien que parce qu’il savait qu’il devrait faire bonne figure durant tout le temps que durerait la cérémonie des épousailles – encore heureux qu’il n’y ait pas de cérémonie religieuse, car ça, c’était généralement beaucoup plus long – van Stexhe avait hésité à répondre positivement à l’invitation. Il n’aimait pas devoir faire semblant d’être quelqu’un d’autre et la présence de Maria le poussait pourtant à endosser la peau d’un homme sérieux. La poisse.

Bref. S’il n’y avait pas d’autre raison que celle de faire la fête et de s’éclater ensemble outre-Atlantique, dans le pays natal d’O’Malley, dans ce pays longtemps déchiré par des querelles religieuses entre catholiques et protestants, cela semblait tout de même être une raison valable. Et puis, une fois marié, Edward aurait la corde au cou, en quelque sorte. Et Maria serait plus castratrice que jamais. Brrrrr, rien que d’y penser, ça donnait froid dans le dos !
Parfois, Alcide se demandait ce qu’aurait pu être sa vie s’il s’était marié avec une femme qu’il aimait. Que ce soit Annaëlle, Ana, Lucie ou Eileen… mais jamais ça n’était arrivé et il ne pouvait qu’émettre des hypothèses. La seule et unique fois qu’il avait dit « Oui » à une femme dans le cadre d’un mariage, c’était devant Elvis, à Las Vegas… et dès le lendemain, Brooke et lui avaient fait annuler leur mariage, parce que ça n’avait pas lieu d’être… mais bon sang, rien que pour la nuit de noces, van Stexhe était prêt à se marier encore et encore ! Cependant, lui, il tenait à avoir une cérémonie religieuse. Et pas une simple bénédiction, non, il lui fallait la totale du sacrement. Éducation catholique oblige, à cinquante ans, il y avait des choses qu’on n’oubliait pas, surtout si on en rêvait depuis longtemps. Eileen accepterait-elle de se marier devant un curé ? L’homme n’en savait rien du tout. Il ne savait même pas si elle l’aimait vraiment. Alors, à quoi bon se poser la question ?

Après tout, il était ici, comme les autres, pour s’amuser et pour faire sa fête à son pote irlandais. Renseignements pris sur l’Internet, Al savait à peu près ce qu’il y avait à savoir sur Dublin et ses pubs. Il avait relevé quelques adresses et avait planché, avec les autres compères, sur un programme qui resterait gravé dans les annales. Bon, évidemment, tous ceux qui connaissent bien Alcide savent qu’il avait prévu des petits extras par rapport au programme de base… mais c’était tant mieux dans ces circonstances.

Dehors de la propriété O’Malley, fumant tranquillement une clope en regardant l’horizon comme s’il contenait une promesse à laquelle se raccrocher, van Stexhe assistait aux insistantes demandes d’Alice, la petite sœur d’Edward, qui semblait vouloir accompagner la troupe masculine pour faire la fête. Elle n’était pas mal du tout, la soeurette d’Ed. Des hanches bien faites, une poitrine qui n’avait rien à envier à celles qu’Alcide avait connues jusque là… et des yeux d’un bleu intense, un peu comme ceux d’Edward… Van Stexhe ne pouvait s’empêcher de lui lancer des regards, mais son frère de bière avait eu tôt fait de lui faire les gros yeux, prenant d’emblée la défense de sa cadette… comme Alcide l’aurait sans doute fait si un salaud tel que lui s’était approché de sa propre sœur. Normal.

"Désolé Alice, mais Edward a raison. Tu devrais peut-être en profiter pour chercher de quoi faire l’enterrement de vie de jeune fille de la future mariée… ça se fait aussi très bien, ça… il y a quelques années, j’étais allé faire un strip-tease pour l’enterrement de vie de jeune fille d’une amie… C’était excellent, mais je bandais comme un cheval pendant toute la soirée et à la fin, je dois reconnaître que ça faisait un peu mal quand même…"

Quoi ? il n’était pas obligé de raconter ça ? Non, c’est vrai… mais il ne pouvait pas faire autrement. Il fallait bien donner quelques idées à Alice si elle se lançait dans l’organisation de l’enterrement de Maria.
En attendant, maintenant qu’il avait fini sa clope, le professeur belge rentra deux minutes pour aller chercher un sac de sport qu’il avait apporté et qu’il jeta aux pieds d’Edward.

"C’est la tradition. Tu dois te changer, Edward. Il y a tout ce qu’il faut là-dedans. Nous on reste comme on est, mais toi, t’es le roi de la soirée, alors il faut que tout le monde te voie bien…"

Dans le sac se trouvait le déguisement de vache qu’O’Malley avait porté un certain soir, mais aussi un costume de Cupidon, le genre petit ange avec des grosses fesses, un arc et des flèches… et d’autres ravissantes surprises du même acabit. De toute manière, il était prévu que l’Irlandais doive se changer plusieurs fois durant la soirée. Et les autres compères avaient chacun un sac à dos contenant quelques surprises.
De sa poche, Alcide sortit deux dés qu’Edward connaissait déjà et les fit rouler dans la paume de sa main.

"Bon, à partir de maintenant, Edward, tu ne bois que ce qu’on te donne et tu restes cool. On fera gaffe à tes fesses, mais tu te laisses aller."

Un mariage, voilà un évènement auquel Cooper n’avait que très peu assisté. Non pas qu’il n’aimait pas cela, mais lui-même n’y croyait pas du tout. Il n’avait jamais eu cette image de parents mariés, s’aimant sans condition, ou ce genre de tableaux que l’on sert parfois aux petites filles. Ah bah la princesse finit toujours mariée au prince, donc oui on parle de mariage très tôt aux enfants. Tu m’étonnes qu’aucuns petits garçons ne veuillent regarder les dessins animés de princesses ! Les deux seuls mariages auxquels il avait assisté étaient celui de sa secrétaire qui l’y avait convié et avec qui il s’entendait parfaitement bien et l’autre, était celui d’un couple qu’il avait aidé en justice et qui l’avait invité pour le remercier. La seule chose positive pour les deux furent qu’il avait ramassé un grand nombre de numéro de téléphone, que ça soit pour les hommes ou les femmes et qu’il avait même pû coucher pendant les cérémonies avec une fille d’honneur ou le meilleur ami du marié. Après tout un mariage c’est fait pour faire la fête, non ? Alors autant que les invités eux aussi s’amusent et pour ça, Cooper devait avouer que la tâché était accomplie.

Pour le futur mariage O’Berkeley-O’Malley, il n’avait pas hésité à y aller. Non pas qu’il était proche des deux futurs mariés, mais il était encore une fois seul. En effet, son petit ami, Seth était partit à Cancun, voyage organisé par sa confrérie et lui ne faisait que travailler. Il se disait donc que finalement une pause ne serait pas plus mal. Acceptant donc l’invitation, il se rendit tout ce même compte qu’après avoir embrassé Maria, il ne l’avait pas revu. Il comptait donc passer cela sous silence, ne voulant pas s’attirer les foudres du futur pendu. Oui, parce qu’il allait se faire passer la corde au cou et quand on connaît le caractère de la dame, il faut parfois savoir courir vite. Bref, Cooper pû faire ses valises, partant donc pour le pays natal de l’homme et se retrouvant également avec d’autres hommes qu’il connaissait. Les amis du futur marié, Alcide, Byron et Ezéckiel. L’avocat remarque d’ailleurs qu’Ezéckiel était encore nouveau et qu’il n’avait pas passé assez de temps avec lui. Une chose à laquelle il comptait bien y remédier. Evidemment, il y avait une arrière pensée là-dessous, mais il savait aussi faire attention pour ne pas paraître trop collant. Puis, il finit par faire la connaissance de la famille O’Malley. Famille fort sympathique, il devait bien l’avouer. Il devait également avouer que la gente féminine n’était pas déplaisante du tout. En parlant de cela, alors qu’ils étaient dehors, Cooper regardait un peu la propriété où il se trouvait avant d’entendre la sœur d’Edward demander à venir avec eux. Ne pouvait s’empêcher de sourire, il se disait que l’irlandais avait intérêt à faire en sorte qu’elle reste dans la maison, parce que sinon elle pourrait découvrir des choses sur son frère qui ne lui plairait sans doute pas. Gardant son sourire, il restait à côté des autres hommes, Alcide et Edward fumant et seul Byron et lui ne le faisait pas.

Seulement, Coop dû cacher son rire quand Alcide prit la parole. Il y avait sans aucun doute certaines choses qui n’avaient pas besoin d’être mentionné. Tentant de reprendre son sérieux, il fronça les sourcils, mais ne pû s’empêcher de sourire toujours autant. Voyant finalement un sac atterrir aux pieds de l’irlandais, Coop se demandait ce que le belge avait bien pû prévoir. L’écoutant parler, Cooper devait avouer qu’il attendait avec impatience de voir le sous-fifre débarquer dans une tenue plus que ridicule. Ecoutant à nouveau le belge, Cooper devait avouer que cette soirée risquait d’être très intéressantes. Cependant Cooper ne dit rien et laissa Alcide prendre les choses en main.

En plus de la famille, Maria et moi avions souhaité convier à notre mariage nos amis, comme nos collègues proches. Alcide apparaissait bien rapidement sur la liste des invités, tout comme Ezéckiel qui se voyaient être deux de mes meilleurs amis. L'un comme l'autre sont très importants à mes yeux. Et autre le côté fêtard, je suis lié avec chacun d'eux d'une grande complicité. Oui, Van Stexhe et Litovski m'aidaient à me sentir davantage chez moi dans ce pays que je n'apprécie pas vraiment : les États-Unis d'Amérique. Puis il y avait Cooper. Ce collègue que Maria et moi apprécions, mais également cet avocat qui nous a grandement aidé à obtenir la garde d'Ambre Harrison, cette fillette orpheline. Orpheline de mère d'ailleurs, car depuis peu, nous avons appris que son père biologique n'était autre que Samuel Salaun. J'ai sérieusement pensé à mettre cette ''Vie de Merde'' sur internet. Et enfin, se trouvait à nos côtés, Byron. Le petit nouveau. Byby, pour les intimes. Nous ne nous connaissons pas depuis bien longtemps. Pourtant, je ne peux nier la complicité qui nous unit. C'est un très bon ami, même si je sais que nous avons encore beaucoup de choses à apprendre l'un de l'autre. En sommes, tous les cinq, nous étions le pot pourri de nationalités de l'université de Berkeley. En effet, on y trouvait de tout. Un Australien, un Polonais, un Belge, un Anglais et un Irlandais. Et je me plaisais à croire que ce cercle s'agrandirait encore d'ici l'année scolaire prochaine, c'est à dire, dans moins d'un mois.

Heureusement, mes parents avaient été d'accord pour héberger les nouveaux arrivants dans leur maison. Maison importante en vue de la famille, dans la mesure où nous étions, à l'époque, six enfants. Cela faisait donc un petit paquet de pièces à disposition de quelques invités. Mes parents sont très cools, également fêtards, l'esprit ouvert, et très tolérants. Mon père est mon portrait craché, avec beaucoup plus de rides. Sinon, nous avons exactement la même tête. Quant à Alice, elle tient beaucoup plus de ma mère. D'ailleurs, je fusillais Alcide du regard quand il s'adressa à ma petite sœur. Il aurait pu éviter ce genre d'anecdote. Certes, ma jumelle – nous nous sommes toujours considérés comme tel, même si cela est faux, en vue de notre très forte complicité – est adulte et est probablement experte dans le domaine du sexe, mais je n'avais pas envie qu'elle tombe dans les griffes d'un homme comme Van Stexhe. Non mais il n'y a qu'à voir. Dans ''Van Stexhe'', il y a le mot ''Sexe''. Et ça, ça en dit déjà long. Cependant, je ne répondais rien à cela. Mon regard noir fut plus utile.

Soudain, Alcide rentra dans la maison quelques minutes à peine. J'en profitais pour terminer ma cigarette et écraser le mégot dans le cendrier prévu à cet effet, sur le rebord d'une fenêtre. Soudain, un sac de sport tomba à mes pieds. « C’est la tradition. Tu dois te changer, Edward. Il y a tout ce qu’il faut là-dedans. » Oh non, je sentais déjà les conneries arriver... ! « Je suis vraiment obligé ? J'ai déjà fait un enterrement de vie de garçon il y a plusieurs années. », tentais-je. Bien évidemment, cela ne porta pas ses fruits. Je ne fis pas attention à Byron qui s'éloignait pour rejoindre ma sœur, restant avec Cooper, Al' et Ezy. Je me penchais donc, ouvrais le sac et en premier lieu, mes yeux se posèrent sur le déguisement de vachette. « Oh ! Marguerite va être de retour ! », lançais-je en riant. Bon, puisque je n'avais pas le choix, je sortais la tenue et l'enfilais dehors, sans grande gêne.

Puis Byron revint. Je posais mon attention sur lui. Que faisait-il avait ma sœur ? Je fronçais les sourcils, bien que je ne fus pas très crédible avec ce déguisement de vache – déjà porté lors d'une soirée trop arrosé avec Alcide, soit dit en passant –. « C'est terrifiant de voir à quel point ce costume te va à ravir, Edward... » Je passais ma patte sur mes mamelles, très fier. « Que crois-tu ? Et encore, tu n'as jamais vu Al' en lapin. Ça aussi, ça lui allait bien ! Bon allez, j'vous suis ! »

Aux yeux d’Alcide, le principe de base d’un enterrement de vie de garçon était certes de s’amuser, mais aussi, outre l’habituelle tradition de montrer au futur marié ce sur quoi il faisait une croix en choisissant l’amour, de retracer un peu d’histoire, au risque de se trouver là dans un cheminement qui n’avait pas grand-chose de spirituel. Pas question d’aller méditer dans un ashram, mais rien n’interdisait de se rendre sur les lieux importants pour le futur marié, durant son enfance et sa jeunesse. Une sorte de pèlerinage pour lequel il était nécessaire de se renseigner auprès des proches, des parents, des frères et des sœurs du marié pour obtenir quelques informations compromettantes… le genre qu’on ne raconte pas d’emblée à ses amis, si vous voyez ce que je veux dire, des trucs compromettants qu’on a pu faire quand on était gosse et qu’on voudrait à tout prix pouvoir oublier… le genre de trucs, aussi, qui se retrouve sur un diaporama le soir du mariage, quand votre meilleur ami – et très souvent témoin – s’est amusé à vous préparer cette surprise qui vous fait mourir de honte en public.
Tout cela, très peu pour Alcide, merci. Il n’avait pas vraiment fait de recherches en ce sens, peut-être parce qu’il préférait simplement se contenter de fêter un Edward O’Malley qui était tel qu’il le connaissait. Peu importait son passé, c’était l’homme qu’il était à présent qui avait gagné l’amitié du Belge.

Ne connaissant pas Alice, van Stexhe avait eu l’air relativement intéressé par la jeune femme. Mais, par respect pour son frère de bière, il était évident pour lui qu’il ne ferait rien qui puisse être mal perçu. A part en étant lui-même, mais ça, il ne pouvait pas changer. Au moins, il n’avait pas collé la main aux fesses de la soeurette et avait même essayé de la pousser à organiser quelque chose pour Maria, avec les amies de celle-ci. Rien qu’à imaginer la tête d’Andrew Holden si Cheyenne était de la partie, avec des délires typiquement féminins et des chippendales sexy, ça pouvait donner dans le mythique ! Bon, bien sûr, Al aurait pu dire autre chose que cette vieille histoire de strip-tease… mais dans le genre, ça avait été mémorable et il avait tellement crevé de douleur que ça l’avait marqué à vie, moralement parlant.
Le regard noir et glacial d’O’Malley était suffisamment éloquent : c’était un regard qui signifiait très clairement « Touche pas à ma sœur ou je te fais avaler tes couilles ». Par instinct de préservation, mieux valait éviter la fureur du frère quand on approchait sa soeur. D’ailleurs, oui, c’était amplement compréhensible qu’un grand frère protège sa jeune sœur. Alcide avait toujours fait la même chose pour sa cadette.

Comme le professeur belge était parti et revenu quelques minutes plus tard à peine, il avait balancé aux pieds de son pote irlandais le sac contenant quelques costumes, sous les regards à la fois intéressés et intrigués de Cooper et de Byron. Van Stexhe annonçait le début des réjouissances et Edward en découvrant le déguisement de vache, un sourire immense peint sur le visage. Très vite, l’historien se retrouva en caleçon, occupé à revêtir son costume. C’était un déguisement qui rappelait pas mal de souvenirs… bons et moins bons, d’ailleurs, puisque lors de cette soirée-là, Edward et Alcide s’étaient engueulés comme jamais. Mais l’amitié avait été plus forte et van Stexhe avait fait la promesse à O’Malley de veiller sur lui lors de soirées bien arrosées. C’était le sens des paroles du professeur de psycho lorsqu’il avait dit qu’ils feraient gaffe aux fesses d’Edward.

Une fois le costume revêtu, Callahan approuva totalement, soulignant même le fait que la mode vachette seyait à ravir à l’Irlandais. Ce qui n’était pas faux, soit dit en passant. Et le geste d’Ed sur son pis ne put que faire rire Alcide, surtout quand il ajouta quelques mots.

"Te touche pas les mamelles comme ça, Edounet, tu m’excites… Tu vas finir par réveiller le lapin qui sommeille en moi…" Le ton était, bien sûr, éminemment ironique.

"Bon, les mecs, let’s go ?"

Le regard qu’Alcide venait de lancer à Ezéckiel, Byron et Cooper voulait tout dire : les festivités allaient commencer, maintenant qu’Edward était prêt. L’homme tendit à Ed les deux dés qu’il n’avait cessé de faire rouler dans sa main. "Tu connais le principe… c’est pour te mettre en condition, Marguerite."

Pour ceux qui l’ignoreraient, les deux dés étaient assez particuliers. L’un portait des chiffres sur chacune de ses faces, l’autre comportait uniquement des gommettes de couleur. Le principe était très simple : il suffisait de lancer le dé chiffré pour savoir le nombre de verres qu’Ed allait devoir boire, et il fallait lancer le dé de couleur pour savoir quel liquide il allait devoir avaler. La différence par rapport au barathon, c’était que cette fois, il y avait deux boissons minimum par couleur. Et Alcide avait prévu de glisser quelques softs de temps en temps, histoire de ne pas rendre Edward ivre mort trop rapidement.
Pour cet événement qu’était l’enterrement de vie de garçon, il fallait transporter pas mal de choses. Et, outre les sacs à dos que portait chaque mec du groupe, il y avait un caddy de supermarché pour pouvoir se déplacer « facilement ». Comprenez par là : Ezy, Byron, Cooper et Alcide dans le caddy… avec une vache pour les pousser ou les tirer. Le ridicule ne tuait pas, et encore heureux !

Pour le premier jet de dés, ce fut O’Malley qui put le faire lui-même. Privilège du début, car par la suite, les quatre autres compères allaient se relayer pour cela. Dès qu’ils en auraient envie, il suffisait de dire « Alea jacta est » et le groupe allait s’arrêter, lancer les dés et faire boire Edward. C’était convenu ainsi.

Heureusement que Maria ne venait pas. Cooper devait avouer qu’au vu des hommes présents, Edward allait réellement vivre un enterrement de vie de garçon dans les règles. Evidemment, il y aurait des photos, comme souvenirs des bons moments passés ce soir, mais il ne fallait pas que ça passe par les mains de n’importe qui et en l’occurrence, celles de Maria. La future mariée n’avait sans aucun doute pas besoin de voir ce genre de choses à quelques jours de son mariage. Mais pourquoi pas faire tourner auprès d’autres personnes, où alors par le plus grand des hasards, en sélectionner quelques unes à passer le jour du mariage, juste pour mettre Edward mal à l’aise, mais en même temps commenté les photos et faire en sorte de prouver l’ami qu’il est devenu pour chacun d’entre nous. Puis le belge prit les choses en mains. Un sac lancé aux pieds de l’irlandais et ce dernier devait aller se changer. C’était la tradition et elle se devait d’être respectée. Regardant donc simplement ce qui se passait, Cooper ne préféra pas regarder vers Alice, sachant parfaitement que le grand frère en Edward allait sinon lui faire comprendre de quel bois il se chauffait. De plus, Alcide avec ces propos avait déjà eu le droit un regard qui en disait long. Restant donc à l’écart de la fameuse petite sœur, Cooper se concentra sur le sac aux mille surprises. Enfin en tout cas aux surprises, vu le costume que Edward eu ensuite sur le dos. Ah oui quand même ! L’avocat ne l’avait jamais vu habillé ainsi et il devait avouer que ça allait plutôt bien l’irlandais. Cooper écouta Byron parler et il devait avouer qu’il était tout à fait d’accord. Edward était magnifique. Hochant simplement la tête quand Alcide donna le top départ, il le laissa faire, tout en écoutant attentivement. Puis les dés furent amenés et Cooper se mit à sourire de plus belle. Les choses devenaient déjà beaucoup plus sérieuses et le regard de l’Australien se porta sur l’irlandais.

Bonne chance.

Souriant en coin, il fixa le futur marié pour qui il était temps de commencer à se chauffer la gorge avec un verre, mais pas n’importe lequel. Qu’allait-il boire ? Il fallait attendre qu’il lance les dés et Cooper se demandait ce qu’Alcide avait décidé au niveau boissons, pour aller avec les couleurs.

« Te touche pas les mamelles comme ça, Edounet, tu m’excites… Tu vas finir par réveiller le lapin qui sommeille en moi… » Mes sourcils se haussèrent à plusieurs reprises dans un geste ma foi très pervers. Cette soirée s'annonçait mouvementée et bien évidemment, Maria semblait déjà fortement exaspérée qu'Alcide soit de la partie. Après tout, elle savait comment ça dégénérait à chaque fois. Mais nous n'avons qu'une vie et à ce que je sache, la mienne s'annonçait beaucoup plus courte que celle de mes compères. Donc oui, j'en profitais. Je n'ai jamais été ce garçon sage qui n'enfreins aucune règle. Et ce n'était pas avec mes 37 bougies fraîchement soufflées que ça allait changer.

Puis nous commençâmes à marcher, tous les cinq. Je restais assez sceptique, notamment en voyant le caddie qu'Alcide emportait avec nous. Mais ce n'était rien à côté du regard que les gens nous lançaient. Ah ! Ça, ça puait pour moi. Jusqu'à ce qu'Alcide décide de me tendre des dés. « Tu connais le principe… c’est pour te mettre en condition, Marguerite. » Je ne pus m'empêcher de rire en voyant cela. J'attrapais les cubes et les faisaient sauter dans ma main, dans un geste habile. Enfin dans ma main... disons plutôt dans la moufle noire qui me servait de sabot. « Tu sais que la dernière fois qu'on les a utiliser, tu as vomis sur le bord d'une route et c'est comme ça qu'on a déniché les déguisements de vache et de lapin ? » Quelle soirée ! Nous avions fait un véritable barathon ce soir là. Bon, ça s'était un peu terminé en prise de tête dans la mesure où j'avais fait une blague à Alcide en lui faisant croire que je m'étais tapé une nana rencontrée dans un bar. Et il s'en était réjoui, m'avait même proposé une sorte d'orgie en fait. Et j'avais enfin dû lui expliquer que j'attendais d'un ami comme lui une sorte de protection. Si je devais être ivre à ne plus savoir me contrôler, je voulais qu'il m'empêche de commettre l'irréparable en trompant Maria. Pas qu'il me pousse justement à aller voir ailleurs.

C'était à moi de jeter les dés. J'avalais difficilement ma salive, notamment quand Cooper m'adressa un « Bonne chance. » qui en disait long sur ce qui m'attendait. Oui, le dé des couleurs signifiait ''mélange d'alcool'' et qui dit ''mélange d'alcool'', dit '' gros mal de crâne de lendemain matin''. Mais nous allions bien rigoler. « And the winner is... ? » Je me tournais vers Byby. « Je sens que toi, t'as envie de te venger de notre petit bizutage. », lui lançais-je avec un sourire amusé et un tantinet sadique. Nous lui en avions fait bavé, notamment quand Alcide, Cooper et moi nous l'avons porté jusqu'à le faire tomber dans une benne à ordures. Ah ! Que de bons souvenirs !

« Attention... ! » Je lançais les dés. Le premier : les chiffres. Outch. « Quatre... » Je me mordillais la lèvre inférieure, soufflais dans ma main, et lançais le second dé. « Mh... rouge ! » Je tournais la tête vers Alcide avec un sourcil arqué. « Me dis pas que j'dois me taper quatre verres de vin... »