Du plus loin que je me souvienne, je ne pense pas m'être un jour éloignée autant du droit chemin qu'en ce moment. Certes, j'ai posé des actes sur bien des coups de tête, tout au long de ma vie. Mais aucun que j'aie pu regretter. Parce que dépenser tout mon argent pour aller faire le tour du monde, ou faire trente heures de bénévolat pendant une semaine au lieu de faire un travail rémunéré, ce ne sont pas des actes qui se regrettent. Ou qui peuvent être jugés de mauvais, de mal. Ce sont de bonnes choses. De belles choses.
Mais de prendre un verre à presque tous les soirs de la semaine, y mêler quelques lignes de cocaïne et beaucoup de sexe avec des inconnus, ça, ce n'était pas bien. Si mes parents me voyaient, ils auraient une sacrée honte scotchée au visage. Moi-même j'avais honte de mon comportement. Certaines personnes que je considérais être des amis dans mon entourage, ne me voulaient pas de bien, c'était maintenant une évidence. Ils m'emmenaient au fond du gouffre avec eux.

Il fallait que je me réveille, avant qu'il ne soit trop tard. Il fallait que je me tienne droite devant eux, et que je leur dise non. Non, je ne veux pas vous suivre dans vos conneries, non, ce ne seront pas ces conneries qui me donneront un sentiment d'appartenance envers vous. Mais pour me donner ce courage, mais surtout pour qu'on me réveille un peu, parce que par moi-même je n'y arrivais pas parfaitement, il fallait que je rende visite à mon meilleur ami.

Un vrai meilleur ami. Celui qui fera toujours ce qu'il y a de mieux pour vous, celui qui vous remettra toujours sur le droit chemin, qui vous fera la leçon si c'est pour votre bien, celui qui est toujours là pour vous. Peu importe le coup de blues que vous filez, peu importe la dernière connerie que vous avez réalisée. Il était près de deux heures du matin, mais je savais qu'il me recevrait quand même dans sa chambre. Même si ça allait le faire chier et qu'il allait me le reprocher pour le prochain mois, il ne me laisserait pas pourrir dehors avec mes remords et mes incertitudes.

Je marchai donc jusqu'à la maison de confrérie des Thêta, je visualisai dans la noirceur l'emplacement de sa fenêtre de chambre qui se trouvait au deuxième, j'attrapai un paquet de roche, et je commençai à les envoyer contre la vitre. Tic. Tac. Toc. Trois petits bruits suffirent à le réveiller et à attirer son attention jusqu'à l'extérieur. Je vis les fenêtres s'ouvrirent et sa tête sortir dans la pénombre. « Klay ! Je suis pas devenue folle et j'suis pas somnambule non plus, mais j'ai vraiment .. vraiment besoin de toi. » Ça ne m'arrivait pratiquement jamais de péter les plombs contre moi-même comme ça. Il fallait donc me pardonner pour ce léger écart de conduite. Klay me fit signe de monter silencieusement, et sans plus tarder, je m'accrochai à la gouttière et avec difficulté et en prenant appui sur tout ce que je pouvais trouver qui ressortait de ce mur, je me hissai jusqu'à lui. Ce n'était pas si haut, mais quand même. Arrivée à sa hauteur, je tendis ma main vers mon meilleur ami, qui l'attrapa et qui m'aida à franchir les derniers décimètres de ma course en me tirant jusqu'à l'intérieur de son dortoir. Nous nous étendirent de long en large sur le sol en retombant de l'autre côté, sur le plancher. Je rigolai doucement, puis redevint sérieuse en le regardant, toujours allongée sur lui. « Merci beaucoup. Et je te promets que ce n'est pas le début d'une mauvaise habitude que je prendrai ... mais je n'arrivais pas à dormir, et j'avais vraiment envie de te voir, de te parler ... »