Qui dit dynamisme dit vie. Samuel avait besoin de ça en ce moment, d’une vie. Il venait de perdre sa vie en un clin d’œil. Il était au chômage, il venait de perdre la femme qu’il l’aimait. Cette femme venait de partir avec un homme, cet homme était celui que Samuel avait adopté quelques mois plus tôt et qu’il avait toujours considéré comme son propre fils. Samuel était aujourd’hui au plus bas et il ne savait plus quoi faire. Evidemment la première chose qu’il avait fait après s’être prit la plus grande claque de toute sa vie fut d’aller voir ses placards et d’en sortir toutes les bouteilles d’alcool qu’il pouvait trouver. Seulement il ne voulait pas replonger dans l’alcool. Il savait que ça ferait du mal à Lucie et Antoine et ça il ne le voulait pas. Il voulait plutôt se faire du mal à lui-même. Il voulait que ça ne touche que lui et uniquement lui. Il ne voulait plus faire endurer ça à ses enfants. Il penserait désormais uniquement à lui et il protègerait ses enfants de tout cela. En regardant son horloge, il vit qu’il était 22h. Soupirant, il ne savait vraiment plus quoi faire. Rangeant les bouteilles, il alla prendre une douche. Laissant de l’eau chaude couler sur lui, il serrait la mâchoire pour ne pas craquer. Il devait tenir bon malgré tout ce qu’il était en train de vivre. Il se devait de garder la tête haute. Il n’avait pas le droit de baisser les bras maintenant. Mais c’était trop dur, c’était au-dessus de ses forces. Une fois la douche prise, il alla dans sa chambre, une serviette autour de la taille. Il regarda ses hanches, il pouvait voir encore les coups qu’il avait reçus quelques jours plus tôt quand il s’était battu avec Edward O’Malley. Le lendemain il avait vu Alcide et ils avaient pû parler. Ca avait fait du bien au français de parler avec un ami. Puis deux jours après Caroll avait dit à Samuel qu’elle le quittait parce qu’elle aimait un autre homme.

Samuel n’en pouvait plus et il serra à nouveau la mâchoire. Attrapant un tee-shirt, il l’enfila. Il fit de même avec un caleçon et un jean. Allant prendre sa veste, il décida de sortir. Il ne savait absolument pas ce qu’il allait faire dehors, mais il avait besoin de changer d’air. Il passait presque tout son temps chez lui, il fallait qu’il sorte, qu’il parvienne à respirer. Attrapant ses clés, il ferma la porte de chez lui à clé et regarda sa voiture. Ca serait de la marche pour ce soir. Partant donc à pieds, il mit ses mains dans les poches de sa veste. Il ne savait pas du tout où il allait, mais plus il réfléchissait et plus il avait mal. Essayant donc de penser à autre chose, il pû voir le visage souriant de sa fille Lucie. Cette dernière allait bien ces derniers temps et ça faisait plaisir à Sam. Ne comptant plus les heures, ce fut sur les coups de 22h45 qu’il arriva devant quelques bars. Il marcha face aux différentes devantures et soupirant à tout va. Il savait encore une fois que l’alcool ne lui ferait rien oublier, mais il avait de ne plus supporter toute cette peine qu’il avait en lui. Il voulait surmonter ça, mais il voulait d’abord attendre le fond avant de pouvoir remonter. Il n’était même pas certain d’ailleurs de vouloir remonter. Il l’avait déjà fait avec sa cure de désintoxication et il en avait tellement bavé qu’il ne voulait pas retenter l’expérience. Continuant de marcher, il vit quelques personnes passer à côtés de lui et il bouscula une personne. Se retournant pour s’excuser, il vit qu’il s’agissait d’Edward et qu’il était accompagné d’Alcide. Quelques flashs de leur bagarre arrivèrent en tête de Samuel. Ce dernier trouva alors une idée et se mit à sourire en coin. Il savait qu’Edward ne supportait pas ce sourire. Mais Samuel savait aussi qu’Ed serait du genre à lui foncer dedans après tout ce qu’ils avaient vécus tout les deux et le français ne demandait que ça. Se laisser taper dessus serait tellement jouissif pour l’irlandais et ça ferait tellement de bien au français qu’ils y trouveraient sûrement leurs comptes. Gardant donc son sourire, Sam se concentra sur Edward.

Alors l’irlandais comment vont tes côtes ?

Attaquer directement serait la meilleure chose à faire pour Samuel. Il devait parvenir à énerver Edward. Avec Alcide il ne savait pas trop comment faire pour l’énerver, mais avec Ed il savait et c’est sur lui qu’il devait se concentrer.

Maria a dû jouer les mères de famille avec toi la dernière fois que tu es rentrée.

« Tiens. » Je déposais un café devant Alcide et prenais place à côté de lui sur un des canapés de la salle des professeurs de l'université de Berkeley. Nous avions tous les deux, une petite heure de creux, que nous passions ensemble ici, tranquillement, avec quelques autres collègues. Enfin, c'était calme, jusqu'à ce que... « Ed' ? » Je posais mes yeux bleus azurs sur mon ex-femme, Sarah, qui venait d'entrer dans la salle des professeurs, visiblement pressée, tenant la main à Seth ainsi qu'à Jade, mes deux enfants de huit ans. « Sarah ? Qu'est-ce que tu fais là ? », demandais-je tout en me levant pour me placer face à elle. Et glissa une main dans ses longs cheveux châtains geste qui montrait son désarroi, geste également très sexy à mes yeux. « Écoute... on vient de m'appeler pour passer un entretien d'embauche. Il faut que je prenne le train et... je suis en retard. Je ne peux pas emmener les gosses, donc fais moi plaisir, prends les. » Je haussais les sourcils. Et avant même que je ne réponde, elle plaça ses mains de part et d'autre de mon visage et m'embrassa sur la joue. « Merci, merci, merci ! » Et elle se retournait déjà pour reprendre la route de la sortie. Elle portait une jupe noire, dévoilant ses longues et fines jambes, mises davantage en valeur par ses chaussures à talons. Je m'y perdais un peu, en me remémorant que j'adorerais toujours autant son physique... jusqu'à ce que je sente les soucis arriver. « Hep, hep, hep ! Attends Sarah ! Tu ne peux pas me les laisser, j'ai des cours à donner ! » Elle se retourna vivement, sous le regard amusé des collègues. « Je les ai porté pendant neuf mois ! Ils étaient deux dans ce ventre ! Tu sais ce que ça signifie ? Si tu le savais, crois moi, tu les prendrais en échange, car les avoir là, c'est le Paradis. Sur ce, merci encore ! Je t'appelle ce soir ! Ciao ! » Et elle disparut de la pièce. Un long soupir s'échappa de mes lèvres. Je me retournais vers Alcide qui ne semblait pas être passé à côté de la tenue d'entretien de mon ex-femme. « Retire ces pensées lubriques de ta tête Al. », lançais-je avant de m'approcher de mes gamins qui faisaient déjà les clowns devant les collègues, notamment Seth. Comme d'habitude, ce dernier était surexcité. Une vraie pile électrique. Avoir Jade en cours, ça pouvait aller, je n'avais qu'à lui demander de rester tranquille, elle le ferait. Mais son frère, lui, était un véritable hyperactif. Mon portrait craché quand j'avais son âge, que ça soit physiquement comme mentalement. Oui, encore aujourd'hui, on se ressemble beaucoup. Au moins, on voit bien que Sarah ne m'a pas trompé, que les gosses sont bien de moi.

« C'est vos enfants monsieur ? » Question stupide. « Non, c'est des orphelins que j'ai ramassé sur le bord de la route. » Léger sourire en coin, un tantinet moqueur. Seth fronçait les sourcils, alors qu'il me suivait, en tenant fermement la main à sa sœur, pour être sûr que s'il devait se perdre, il ne serait pas tout seul. Oui, le petit garçon trouvait l'université drôlement grande et pour cause, en étant haut comme trois pommes, tout peu paraître gigantesque. Une journée assez épuisante en somme.

Le soir même, Sarah vint rechercher les gamins après que je les ai faits manger. Je profitais ensuite de voir Alcide quelques heures. Ainsi, à cette heure-ci, nous étions tous les deux dans les rues, en train de parler de tout et de n'importe quoi, tout en nous dirigeant vers un bar, pas nécessairement pour nous saouler, disons plus pour nous retrouver entre mecs. Nous étions tellement pris dans la conversation que je fus surpris en sentant une pression contre mon épaule. On venait de me bousculer. Fronçant légèrement les sourcils, je me retournais. Là, Samuel entra dans mon champs de vision. Je serrais les dents. Ah non ! Pas lui ! Je me souvenais encore de notre bagarre passée, en vue de ma lèvre fendue, de la blessure à l'arrière de ma tête, et d'une douleur aux côtes.

« Alors l’irlandais comment vont tes côtes ? » Je fronçais les sourcils. Est-ce qu'il était en train de me chercher, là ? Alcide était au courant de notre petit différent qui a terminé en coups de poing. Et pourtant, il n'avait pas pris part, ce que, au final, j'appréciais beaucoup. « Maria a dû jouer les mères de famille avec toi la dernière fois que tu es rentrée. » Ok, il l'aura cherché. Je l'attrapais par le col de son T-shirt et le plaquais violemment contre le mur à côté de nous. « Tu vas la fermer crétin ?! » Je m'apprêtais à lui donner un coup en pleine figure quand...

… Alcide s’interposa entre Samuel et Edward, retenant de la main droite le poing de l’Irlandais qui allait entrer en collision avec le visage de Salaun.

Après la journée qu’il avait passée, van Stexhe n’avait pas besoin de voir deux amis qui lui étaient chers se mettre à se battre pour des broutilles.
Tout avait commencé par un réveil difficile. Mauvaise date, mauvais souvenirs. Les yeux à peine ouverts, l’homme n’avait pas pu trouver le sommeil. Il devait être aux environs de trois heures du matin. Il n’avait pas fait fort la veille, loin de là, c’était même ce qu’on pouvait appeler une soirée relativement calme. Lucie n’avait pas passé la nuit dans son loft… peut-être que sa présence à ses côtés aurait permis au professeur de se reposer un peu plus, au moins mentalement.
Trois heures du mat’, donc. Alcide avait tourné en rond jusque huit heures. Il avait avalé des litres de café, avait grignoté des tas de chips et de chocolat, avait mangé un sandwich au jambon avec un chocolat chaud en regardant à la télévision toute une série d’émissions et de séries stupides… Si Lucie l’avait vu, elle l’aurait engueulé, sans doute. Mais c’était sa manière de se guérir.
À huit heures, van Stexhe s’était douché, en prenant bien son temps. Il avait massé les parties douloureuses de son corps. La nuque, surtout. L’effet canapé, ça. Puis il s’était habillé pour aller donner cours. Costard gris et chemise noire aujourd’hui. Aucune trace de couleur sur lui. Pas en un jour pareil.

Avec tout ce qu’il avait avalé avant huit heures, il n’avait pas voulu manger ce matin. Il n’aurait pas pu, de toute manière.
Tout indiquait que cette journée serait pourrie. Normal, c’était la date d’anniversaire d’Ana. Elle devait sans doute fêter ses quarante-sept ans quelque part en Espagne. Elle avait peut-être un mari et des enfants. En tout cas, il y avait de fortes chances pour qu’Ana ne pensât pas à Alcide. Pas après tant d’années. Mais lui ne pouvait s’en empêcher. Chaque année, à cette date-ci, il était morose, irascible et pas très engageant. Pour un professeur, c’était loin d’être idéal. Toutefois, il était obligé d’assurer ses cours de la journée.

Durant la matinée, après sa première heure de cours avec un auditoire d’étudiants de deuxième année, Al avait une heure de pause. Elle tombait bien. Il avait tout fait pour que son humeur ne vînt pas entacher le déroulement du cours, mais il avait éprouvé le besoin de souffler un peu. La salle des professeurs était le lieu privilégié pour cela. Et comme Edward avait une heure de battement en même temps que lui, van Stexhe avait pu passer un peu de temps avec lui. Il avait même pu apercevoir son ex-femme et leurs deux enfants, les jumeaux. La dénommée Sarah était plutôt jolie et son tailleur élégant mettait en valeur ses jambes longilignes. C’était la première vision vraiment agréable de la journée, mais Ed avait vite rappelé Al à l’ordre. Premier vrai sourire de van Stexhe de cette journée.
S’il n’avait pas oublié son portable chez lui, peut-être Alcide aurait-il pu recevoir un petit message de Lucie, qui lui aurait donné le sourire, mais il avait suffi d’être distrait en plus d’être de mauvaise humeur.

Après deux autres heures de cours, Alcide était rentré chez lui. Pour manger un morceau et pour reprendre son portable. Merde. Même pas un petit SMS de la jeune fille. L’humeur était noire, de retour. Elle attendait peut-être qu’il fasse le premier pas. Mais aujourd’hui, il ne le ferait pas.

Il avait fini ses cours pour la journée et n’avait rien d’autre à faire aujourd’hui. Alors, oui, il avait accepté de passer la soirée avec O’Malley. Oh, pas une soirée bien arrosée, non, le genre plutôt soirée calme, avec discussions entre mecs. Van Stexhe ne lui avait jamais parlé d’Ana… mais ce soir, peut-être qu’il le fallait. La partie sombre du passé du professeur de psychologie…

Mais la vie en avait décidé autrement. Dans le bar où les deux hommes avaient pris place, Samuel avait fait irruption, le sourire en coin et l’air d’avoir envie de se fritter avec Edward. Ce n’était pas le moment, certainement pas. Et au vu de ce que Salaun disait, il était évident que l’homme voulait énerver O’Malley. Non, van Stexhe n’avait pas besoin de ça en plus du reste. C’est pour cela qu’il retenait le poing d’Edward.

"Hey, du calme, les gars !" Tenant toujours le poing d’Ed, Alcide se glissa entre les deux hommes, pour les séparer du mieux qu’il pouvait. "Bordel, on est entre adultes, alors vous réglez ça entre adultes, comme des adultes."

Bon, ce n’était peut-être pas la meilleure manière d’aborder le problème, mais Alcide n’était pas vraiment dans une forme olympique pour les négociations. Il aurait même plutôt tendance à être assez mauvais là-dedans, aujourd’hui. La faute à pas de chance…
En tout cas, la situation lui déplaisait. Sa tempe battante en était un signe visible. Et s’il fallait que cela dégénère entre Edward et Samuel, sans s’en rendre vraiment compte, van Stexhe venait de se foutre en pleine ligne de mire… de l’un comme de l’autre.

L’ex enseignant avait besoin de se changer les idées, de penser à autre choses que sa vie devenue plus que misérable. Il ne voulait pas retomber dans l’alcool, il ne voulait pas s’infliger ça et encore moins à ses enfants. Il fallait donc qu’il trouve une autre façon de se détruire. Alors, marchant de rues en rues, il finit par bousculer une personne sans le faire exprès. Près à s’excuser, il vit que la personne en question pourrait finalement lui être très utile. Edward lui avait déjà mit une raclée, donc s’il pouvait le mettre KO ça serait encore mieux. Commençant directement le chercher, il savait qu’il partirait au quart de tour. Se retrouvant plaqué au mur, Samuel avait une sorte de boule au ventre. Il appréhendait de recevoir une pluie de coups, mais en même temps il n’attendait que ça. Voyant le poing de l’homme se lever, Samuel hésita à fermer les yeux. Non, il valait mieux qu’il voit le premier coup venir, ça serait sans doute mieux. Seulement au lieu de voir le poing d’Edward s’abattre sur lui, Samuel vit Alcide s’interposer. Non mais qu’est-ce qu’il faisait lui ? Pourquoi retenait-il le poing de l’irlandais ? Sam fronça les sourcils n’appréciant pas du tout ce que son ami venait de faire. D’accord c’était son ami, mais ce soir, il ne voulait pas de ça, il voulait clairement qu’on lui colle une bonne raclée. Se retrouvant avec Alcide devant lui, Samuel fronça encore plus les sourcils et soupira bruyamment. Poussant Alcide sur le côté, Sam fronça les sourcils.

On n’a pas besoin de toi jouant les Saint-Bernard ce soir.

Il savait qu’il allait dire des choses qu’il ne devrait pas dire, mais il avait ce besoin de se laisser aller. Il reposa donc son attention sur Edward.

On est entre adultes, deux adultes qui savent ce qu’ils font, alors autant en finir maintenant.

S’avançant jusqu’à l’homme, il se planta devant lui, sourire aux lèvres.

Je dois me mettre à parler de Maxence pour que tu oses faire quelque chose sans qu’Alcide s’interpose ?

Il avait toujours ce sourire ironique qu’il savait énerver Edward. Seulement il avait besoin de ça pour pousser l’homme à bout. Il se laisserait totalement frapper, il n’opposerait aucune résistance et s’il pouvait aussi trouver une façon d’énerver encore plus Alcide, ça ferait qu’ils seraient à deux contre lui ce qui serait encore mieux du point de vue de Samuel.

Je sentais bien qu'Alcide n'était pas au meilleur de sa forme, même s'il n'avait pas trop eu l'occasion de m'en expliquer la raison. Et comme je voyais qu'il était hésitant quant à tout me raconter, comme si les souvenirs allaient faire surface à nouveau pour le détruire un peu plus, je décidais de passer la soirée avec lui, afin qu'on se retrouve tous les deux à parler de tout et de rien, au cas où il aurait besoin de se confier à moi. Je ne voulais pas le savoir par curiosité, même si c'est ce que l'on aurait pu croire en me connaissant. Non, ce que je voulais avant tout, c'était qu'il aille mieux en ayant quelqu'un qui puisse tendre l'oreille et la main vers lui. J'adore Alcide quand il est de bonne humeur, joyeux, gamin, drôle et un peu fou. Et, comme notre amitié ne se résumait pas qu'aux beuveries entre collègues – chose qui, auparavant l'a été lorsque nous nous connaissions peu –, nous avions appris pas mal de choses l'un sur l'autre, si bien qu'une certaine complicité et confiance avaient pointé le bout de leur nez. Donc ce soir, on ne boira pas. On se retrouva uniquement entre potes. C'était bien parti... jusqu'à ce qu'un crétin de breton vienne nous emmerder.

Cette scène me donnait un sentiment de déjà vu, et pour cause, il y a quelques jours, nous nous étions battus. En rentrant, j'avais ressenti une légère peur. Peur de moi-même. En effet, lorsque j'avais finalement frappé Samuel, ma haine contre lui avait été si grande que j'avais eu l'impression d'être une furie, d'exploser. Je lui donnais des coups, encore et encore, et j'ose penser que si personne ne nous avait arrêté, je l'aurais vraiment amoché de façon telle qu'il aurait été méconnaissable aux yeux de ces gamins. Je détestais perdre ainsi le contrôle de moi-même. J'en avais discuté avec Maria en rentrant. Aujourd'hui, j'en voulais encore énormément à l'homme, même si ma rage était moins grande que dans le feu de l'action. Haine qu'il commençait peu à peu à raviver en me lançant des remarques. Du coup, je le plaquais contre le mur, dans le but de lui donner une nouvelle raclée. Heureusement, Alcide m'en empêcha. En effet, je le sentis retenir mon poing. Je continuais de fixer Samuel avec un air très mauvais.

À ma grande surprise, le français poussa notre ami en lui lançant une remarque peu sympathique. Il n'était pas dans son état normal lui non plus. Il cherchait clairement à se faire taper dessus. Cette pensée me surpris tant que je me concentrais dessus, ne prêtant pas énormément d'attention à sa nouvelle remarque. Les sourcils toujours froncés, je ne montrais plus grand signe de violence. Je me contentait d'afficher un regard interloqué. « T'as bu ou quoi ? » J'espérais pour lui que non. Il avait beau me faire la morale sur l'alcool, il valait mieux pour lui qu'il n'en reprenne pas une seule goutte. En effet, si cela arrivait, il perdrait bien plus de choses que moi. Mes yeux bleus ne le quittaient pas une seule seconde. Ce n'était pas le Samuel que je connaissais, là, maintenant. C'était comme s'il avait appris une terrible nouvelle et qu'il réagissait un peu comme moi face à la mort de mon frère aîné. C'est à dire qu'il se montrait désagréable, voir même méchant, cherchant un peu la bagarre à tout le monde et n'importe qui.

« Qu'est-ce qui t'arrive Samuel ? », lui demandais-je avec un sérieux sans nom. Je tournais légèrement la tête vers Alcide pour le regarder, comme si j'arriverais à déceler une réponse dans ses yeux marrons. Mais rien. J'aurais espéré qu'il en savait plus que moi. Mais ce n'était visiblement pas le cas. Je tâchais que garder ma rancœur pour moi le temps d'une soirée. Je préférais savoir ce qui le poussait à réagir comme ça. J'espérais tout aussi qu'il était sobre. Car sincèrement, cette envie de chercher la bagarre relevait un peu de l'attitude que peut avoir un homme qui vient de se saouler tout seul, dans un bar. Un soupir s'échappa de mes lèvres. Samuel ne semblait pas vouloir coopérer. Non, ce qu'il voulait, c'était me pousser à bout, me donner une envie folle de le frapper. Je ne le ferais pas. Du moins, j'essaierais de garder mon calme. « Laissez tomber, quoi que tu dises, je ne te frapperais pas. Explique nous plutôt ce qui t'arrive, tu veux ? », lui lançais-je en reposant mes yeux bleus sur sa personne.

Quoi qu’il soit en train de se passer, ça échappait à la logique d’Alcide. Pourquoi Samuel venait dans ce bar ce soir ? Que pensait-il trouver ? Et pourquoi venait-il provoquer Edward alors même qu’ils s’étaient frittés tous les deux quelques jours plus tôt, à peine ? Non, cela n’était pas normal. Et vraiment, c’était d’ores et déjà désagréable.
Van Stexhe s’était interposé pour éviter qu’Ed et Sam ne se tapent dessus, lui il était partisan de la discussion, en toutes circonstances, alors, évidemment, il était plutôt disposé au pacifisme… Mais Salaun venait de… c’était quoi ça, au fait ? Une insulte ? Un saint-bernard, c’était ce gros chien énorme avec un petit tonneau accroché au cou, non ? Beethoven… Loin d’être l’animal préféré d’Alcide, en réalité, mais il ne releva pas. Ça lui fit juste penser, une fraction de seconde durant, qu’il devrait aller chercher bientôt le chiot qu’il allait offrir à Lucie.

Et Samuel poussa Alcide sur le côté, pour voir O’Malley droit dans les yeux, selon toute apparence. Les paroles de Salaun firent tiquer atrocement van Stexhe. Putain, mais à quoi il jouait, là ? Edward savait se montrer raisonnable, mais il ne fallait pas trop le chatouiller non plus…
Ce qui énervait Alcide, dans l’attitude de Samuel, c’était qu’il avait tendance à intégrer Al dans ses histoires. Enfin, dans leurs histoires. A présent, van Stexhe n’était plus qu’une sorte de limite anti-débordements. Merci mon pote, c’est vraiment sympa de me considérer comme ça. Et le sourire mesquin de Sam n’arrangeait rien.

Demeurant silencieux, les sourcils froncés et le regard noir, le professeur de psychologie fixait Samuel, tandis qu’Edward commençait à le questionner. Le comportement de Salaun était tel qu’il était presque évident qu’il n’était pas dans son état normal. Et pour avoir reçu quelques confidences quelques jours plus tôt, Alcide se mit à craindre le pire. Avait-il appris pour Lucie et lui ? Avait-il parlé à Antoine et Lucie ? c’était peut-être ça… et ça s’était mal passé… Oui, ça expliquait le côté « différent » qu’arborait Samuel ce soir.
Bordel, si c’était ça, Alcide allait devoir en discuter avec Lucie. Et lui dire qu’il était au courant de certaines choses. Et ça allait impliquer une conversation longue et pleine de rancœur. Ainsi que l’abstinence pour ce soir.

Edward essaya alors de négocier, non sans avoir regardé Al avant. Mais van Stexhe ne bougeait pas. Il réfléchissait, essayait d’analyser la situation, de comprendre ce qui se passait. À partir de ce comportement quasiment auto-destructeur de Samuel, Alcide tentait de mettre de l’ordre dans les pièces du puzzle. Si ça c’était mal passé avec ses enfants, Sam agirait-il comme cela ? Ne serait-il pas plutôt en train de se faire consoler par sa chère et tendre ? A moins qu’elle ne soit pas disponible ce soir. Il suffisait de pas grand-chose, pour tomber dans la déprime, Al était bien placé pour le savoir. Mais, bizarrement, voir Salaun agir comme cela et réfléchir à cette attitude, ça pouvait faire passer ses propres soucis personnels au second plan. Ça pourrait, plutôt…. Enfin, ça aurait pu…

Toutefois, ce soir, c’était un jour un peu particulier. Et la morosité de van Stexhe l’empêchait d’analyser correctement les données qu’il avait à sa disposition. Il retenait surtout qu’il était un chien et que son rôle entre Sam et Ed se résumait au rôle d’un objet. Une barrière.
Peut-être que c’était comme ça qu’Ana l’avait perçu, plus de vingt ans auparavant, quand elle était partie. Si c’était ça, alors le problème, c’était lui. Et il n’avait rien à foutre dans ce monde s’il était un boulet pour les autres.

Relevant soudain le menton, l’homme plongea des yeux couleur havane dans ceux, bleus, de Salaun :

"Je me fous de savoir ce que tu veux, Samuel. Tu viens t’incruster ici et tu cherches à provoquer Edward. Moi ça me gonfle. Tu parles d’un comportement d’adulte ! Va t’automutiler, tant que tu y es, et reviens nous voir quand tu seras un peu plus raisonnable."

Sur le coup, Alcide avait utilisé un ton très froid. Mauvaise journée oblige, il lui était difficile de ne pas considérer l’intrusion de Samuel et son attitude comme une cause de son impossibilité de parler à O’Malley de ce qu’il avait sur le cœur. Ok, Sam n’allait pas bien depuis qu’il était au chômage… mais cela ne faisait pas de lui le centre du monde.

Pressant son index droit sur le sternum de Samuel, Alcide commit alors une erreur énorme, surtout vis-à-vis de Lucie, même si elle n’était pas là :

"Idiot ! Tu es tellement braqué sur tes problèmes et tellement centré sur ta petite personne que tu n’as même pas remarqué que ta fille était plus heureuse avec moi qu’avec toi !"

Van Stexhe savait très bien qu’il n’aurait pas dû dire ça… et dès que ses mots eurent franchi ses lèvres, il ne put s’empêcher d’en ajouter une couche malgré tout, parce que ça le soulageait de sa propre souffrance d’infliger ça à Salaun.

"Tu n’imagines même pas comme le « saint-bernard » lui fait plaisir. Dans tous les sens du terme."

Jamais ça n’aurait dû se passer comme cela. Alcide et Lucie avaient discuté du moment où ils annonceraient la nouvelle à leur entourage… et là, Al venait de tout lâcher, dans le but de faire endurer à Samuel une douleur que lui-même n’en pouvait plus de porter.

Le français savait qu’il ne devait pas se comporter ainsi, ça n’était pas dans sa nature, seulement ce soir il avait besoin qu’on le frappe. Besoin d’avoir mal pour oublier toute la détresse qui le prenait et qu’il l’amenait toujours plus bas. Seulement Alcide semblait vouloir les aider l’un comme l’autre. Pour le coup Samuel lui en voulait. Alcide était un homme bien, vraiment, il était un véritable ami pour Samuel. Mais ce soir, il aurait préféré que son ami le frappe plus qu’il ne prenne sa défense. Le poussant sur le côté, il ne voulait pas lui faire de mal, il préférait provoquer Edward qu’il avait vu démarrer au quart de tour. Seulement en quelques secondes le vent changea de direction et ça Samuel ne l’avait pas prévu. L’irlandais semblait vouloir savoir, comprendre. Il semblait vouloir aider Sam, ce qui d’ailleurs déstabilisa ce dernier. Pourquoi est-ce que cet homme tout d’un coup voulait bien prendre sa défense et qu’il voulait bien même l’aider. Là Sam était perdu et ça le mit finalement encore plus en colère contre lui-même. Il cherchait à ce qu’Edward lui fasse mal alors que ce dernier voulait l’aider. Sam se maudissait et il aurait dû partir, laisser les deux hommes seuls et chercher d’autres personnes pour faire le sale boulot. Mais comme le vent avait tourné, ce fut Alcide qui reprit le flambeau et qui décida alors de prendre la parole. Voyant également l’homme se rapprocher Sam eu un instant peur. Il n’avait jamais vu Alcide ainsi et là il se demandait vraiment s’il n’allait pas perdre un membre, voire sa tête. Fronçant les sourcils, Sam resta bête en entendant parler de sa fille Lucie. Seulement en entendant les derniers propos de l’homme, Sam fronça les sourcils de colère et se rua sur Alcide.

Espèce d’enfoiré !

Lui qui faisait confiance à Alcide, le voilà en train de coucher avec Lucie. Rien que d’avoir des images qui lui arrivait en mémoire le fit envoyer son poing au visage de l’homme. Ah bah finalement la bagarre pourrait commencer. Samuel continua de frapper Alcide, mais ce dernier semblait bien plus animé que lui et Sam se retrouva vite sans défense. Comme face à Edward, il se rendait compte qu’il ne faisait pas le poids, en tout cas pas dans l’état dans lequel il était présentement. Essayant de se débattre pour mettre une raclée à l’homme, il sentit ses côtes lui faire mal à nouveau. Apparemment il venait de se prendre un coup dans les côtes et il sentit sa respiration se couper quelques secondes avant qu’il n’essaye à nouveau de reprendre le dessus. Seulement maintenant il voulait être frappé et ne plus se défendre.

La situation commençait sérieusement à m'échapper. Mes yeux bleus ne quittaient pas ceux Samuel, dans la mesure où j'avais besoin de comprendre ce qu'il lui arrivait. Pas par curiosité. Non, à mon plus grand étonnement, j'avais une petite envie de le soutenir que, je tiens à préciser, je ne dévoilerais jamais à voix haute. Et puis quoi encore ? Je rappelle qu'il a tenu des propos qui m'ont fortement blessé et qui m'ont fait assez perdre confiance en moi, déjà que ce n'était pas parfait de ce côté là. Bref... j'arrivais à me calmer et c'était déjà un bon point. Peut-être pourrions nous discuter tous ensemble pour comprendre un peu mieux ce qu'il pouvait bien se passer dans la vie et dans l'esprit de Salaun.

Mais, à ma grande surprise, la situation dégénéra de façon surprenante. Jamais je n'aurais crû cela imaginable. Premièrement, Samuel qui pousse Alcide, par mauvaiseté. De la part du français, c'est étonnant. Soit. Deuxièmement, Van Stexhe qui ouvre ainsi sa gueule par énervement. D'habitude, il sait garder son sang froid. Troisièmement ? Une révélation, suivi d'une bagarre. Bon Dieu ! Tout à basculer en quelques secondes à peine. Mon ami commença à lui parler de sa fille et pendant un instant, je n'ai pas réussi à comprendre, j'étais incapable de faire le lien. Qu'est-ce que Lucie venait faire dans l'histoire. Je m'immobilisais un instant, entre les deux hommes. Les sourcils légèrement froncés, marquant l'incompréhension sur mon visage, je tournais la tête vers Alcide qui reprit bien vite la parole. « Tu n’imagines même pas comme le « Saint-Bernard » lui fait plaisir. Dans tous les sens du terme. » Et là, les pièces du puzzle s'assemblèrent. Mes yeux s'écarquillèrent. L'étudiante ? La fille d'un ami ? Lucie ? Il se tapait Lucie Salaun ! C'était donc ça ! Putain de merde...

J'essayais de tout comprendre. Comment Alcide avait pu faire ça ? Enfin... s'ils sont tombés amoureux, pourquoi pas, mais merde, si Maria est au courant... Samuel s'est déjà fait viré pour avoir eu une histoire avec une étudiante. Alcide aurait le droit au même jugement. Enfin, je pourrais peut-être faire pression auprès de ma future femme dans la mesure où, bien qu'elle ait su que j'avais eu deux aventures avec deux élèves différents, elle avait refusé que je démissionne. Nous avions finalement passé cette histoire sous silence. Mais si ça venait à se savoir, elle aurait de gros problème pour avoir fait preuve de favoritisme. Elle avait beau dire le contraire, c'en était. Bref, tout ceci était trop compliqué. Pourquoi nous, les hommes, nous sommes incapables de garder notre braguette fermée lorsqu'une petite minette de la vingtaine s'approche de trop près ? Merde alors ! De plus, Alcide ne l'annonçait pas du tout comme il le fallait. Enfin... on ne balance pas à un père une parole du genre « Je saute ta fille, et elle est trop bonne ! ». Non, je me mettais à la place de Samuel, je pouvais comprendre que ce dernier se soit ainsi jeté sur son ami pour le frapper.

Je restais un instant immobile, observant la scène. Oui, j'étais assez choqué par ce que je venais d'apprendre, et je sentais fortement les ennuis arriver. Un soupir. Je secouais négativement la tête. Il fallait que j'intervienne, sinon, ils allaient vraiment se faire mal. Je tentais donc de m'interposer. Et alors que je m'approchais apparemment de trop près, je me pris un coup en pleine figure, précisément au niveau de la tempe droite. J'étais incapable de dire à qui appartenait le poing, mais c'était bel et bien le risque à prendre de vouloir séparer deux hommes qui se battent de façon très violente. Je basculais donc un peu en arrière, une main sur la blessure. Je soupirais. Bande de couillons ! Et je revenais à la charge. Cette fois-ci, j'attrapais Alcide, et je réussis à lui faire lâcher prise. Je l'obligeais à se relever, Samuel fit de même, bien qu'on pouvait lire dans ses yeux qu'il voulait foncer de nouveau dans le tas. Je me plaçais entre les deux, les bras tendus l'un vers l'autre, prêt à agir. Je sentais un liquide chaud couler de mes narines, en un petit filet. Voilà, je saignais du nez à présent, à cause du coup que je m'étais pris à la tête. Néanmoins je les regardais à tour de rôle. « Vous allez vous stopper un peu merde ?! » Je ne pouvais définitivement pas prendre parti là. En temps que père, je me devais d'être du côté de Samuel. Mais ce dernier était plus que désagréable en ce moment.

Pourquoi dire cela ? Franchement, Alcide n’en savait trop rien. C’était sorti tout seul, il avait besoin de le dire depuis trop longtemps. Porter ce secret commençait à devenir trop difficile. Et ce soir, les conditions étaient toutes réunies pour que l’homme ne puisse pas se contrôler.
Dès le moment où ses paroles étaient sorties de sa bouche, van Stexhe avait su qu’il avait commis une erreur et qu’il n’était pas près d’arriver, le moment où il pourrait essayer de réparer ça…
Samuel et Edward savaient tous les deux à quel point Al aimait les femmes et le sexe. Alors, forcément, maintenant qu’il était évident pour les trois hommes que le professeur de psychologie se tapait la fille de l’ancien professeur de philosophie, eh bien Salaun et O’Malley devaient forcément trouver qu’Alcide était encore un pire salaud que ce qu’il avait laissé voir jusqu’alors.
Pourtant, quand il avait parlé de ça avec Edward, il n’avait encore jamais couché avec Lucie. Et quand il avait répondu aux questions de Samuel, quelques jours avant celui-ci, eh bien Alcide avait été franc, sans en dire trop, il avait tout de même parlé de la manière dont il vivait ce qui lui arrivait. Il avait même eu l’impression que Sam comme Ed avaient été heureux pour lui, d’une certaine façon.

Et là, oui, il avait merdé. D’ailleurs Salaun lui disait qu’il était un enfoiré et lui fonçait dessus, littéralement. Alcide ne put éviter le premier coup qu’il reçut, mais il y répondit tout de go, frappant n’importe où, sans viser nulle part. Si Samuel pouvait finir par l’assommer, alors Al allait pouvoir ne plus penser trop pour ce soir. C’était ce qu’il lui fallait. Alors il frappait en tous sens.

"Voyons, beau-papa…"

Van Stexhe était provocateur et goguenard, certes, mais c’était voulu. Il ne cherchait plus qu’une chose : passer ses nerfs sur Samuel et se calmer grâce à cette dépense énergétique physique. Alcide frappait, parfois dans le vent, parfois dans des parties du corps de Salaun. Ou de quelqu’un d’autre, au fond, il n’en savait rien, il ne regardait pas trop ce qu’il faisait. Il cherchait juste à éviter quelques coups et à en placer certains, de son côté.
O’Malley intervint alors et s’interposa à son tour, comme Alcide l’avait fait plus tôt. Il leur disait d’arrêter, de stopper tout ça. Van Stexhe se dégagea de la poigne d’Edward en faisant un vif mouvement d’épaule. Il serrait les dents et avait toujours les sourcils froncés. Et il était prêt à continuer à frapper. Bon, son poing droit lui faisait un peu mal, parce qu’il avait dû taper dans quelque chose de dur, sa mâchoire allait bleuir un peu aussi, et son nez avait émis un son de craquement lorsque le poing de Samuel s’était écrasé dessus. Se passant le dos de la main juste sous les narines, il vit qu’il saignait un peu, comme Edward, mais cela restait raisonnable.

Levant alors les yeux vers Sam, Alcide hésita une ou deux secondes. Il pouvait lui balancer son poing dans la gueule, à nouveau, ou essayer de parler. Mais là, franchement, il était difficile de se décider rapidement. Haussant les épaules, il finit tout de même par dire :

"Tu as bien vu que Lucie était heureuse ces derniers temps… je ne suis pas un salaud avec elle. Mais si tu tiens à me sauter dessus, vas-y… je m’en fous. J’ai une très bonne infirmière à domicile depuis un mois."

Le ton était apparemment calme, mais Alcide tenait à ce que Samuel sache que, d’une manière ou d’une autre, il pouvait faire ce qu’il voulait, ce n’était pas les coups que Salaun lui collait ou lui collerait qui allaient changer quelque chose. Van Stexhe n’allait pas modifier son comportement pour lui. Ni lâcher Lucie pour faire plaisir à son père. Ce n’était même pas la peine d’espérer.
Peu lui importait que Samuel lui en veuille ou se mette à lui chercher des noises. En se lançant dans sa relation avec la jeune fille, Alcide avait pris conscience de ce qu'il prenait comme risques. Il ne voulait pas perdre l'amitié de Salaun, mais si c'était le prix à payer pour pouvoir rendre Lucie heureuse et être heureux avec elle, alors tant pis pour l'amitié.