Le calme…une fois n’est pas coutume, Savannah avait décidée de passer son temps dans une bibliothèque remplie de livres mystérieux, anciens et tout un tas d’autres choses. Dans cet endroit particulier, on ne trouvait pas les derniers ouvrages sortis au salon. Bien au contraire, quasiment personne ne soupçonnait l’existence de ce lieu. C’était cette unique raison qui attirait la jolie brunette, ici. Elle savait pertinemment qu’elle n’allait pas être dérangée. Du moins, normalement…Ignorant ce qui allait se passer, la jeune femme entreprit de faire le tour des rayons et sortit un livre d’une étagère. Ensuite, elle se posa sur une table et ouvrit le livre. Elle était complètement plongée dans sa lecture qui s’avérait de plus en plus passionnante au fil des pages. Elle ne remarqua pas qu’une personne s’était glissée dans la bibliothèque. Elle ne fit pas attention non plus quand l’inconnu l’observa attentivement. Elle ne vit pas que cette silhouette appartenait à son passé.

Ce n’est que, quand le garçon, fit du bruit que l’étudiante fit volte-face, surprise. Quand elle le reconnut, ses yeux s’agrandirent encore plus et manquèrent de se remplir de larmes. Jefferston…Que faisait il ici ? Elle avait tant redouté ce moment. Elle ne l’avait pas vue depuis si longtemps…quatre ans. C’était beaucoup trop long. Ils étaient inséparables, unis comme les doigts de la main et pourtant quand elle dû s’en aller, elle ne lui fit pas ses adieux. Elle était partie comme une voleuse. Une larme roula sur sa joue pour se cacher loin des regards indiscrets, loin de son regard. Soudain, elle ne comprit pas vraiment ce qui se passait. Son ami d’enfance lui prit la main qui provoqua une décharge dans son cœur et l’entraîna vers la porte de sortie mais trop tard…le cliquetis de la porte se fit entendre. Doucement, elle comprit en particulier à la douce expression qui sortit de la bouche du Sigma. Ils étaient enfermés. Lui et Elle. Deux personnes qui avaient passés leurs temps à se fuir. Un silence pesant, étouffant s’empara de la pièce. L’oméga rangea son livre et s’apprêta à parler mais les mots restèrent bloqués dans sa gorge. Elle ferma les yeux rassemblant le courage qu’il lui fallait et ouvrit la bouche.

« Jefferston…je suis désolée. Sincèrement désolée de n’avoir pas eu assez de courage pour te faire mes adieux. J’ai dû te faire autant de mal qu’à moi si ce n’est pas plus. Je m’en veux. Sincèrement, j’aurais voulu que les choses se passent autrement…tu dois me détester et c’est compréhensible…Mais… »

C’était dur. Bien plus dur que ce qu’elle aurait pu imaginer. Comment lui expliquer un acte qu’elle ne comprenait pas elle-même ? Elle baissa la tête, fuyant son regard. Qu’allait il dire. Elle redoutait un peu sa réaction. Certes il allait mal réagir, il ne fallait pas être stupide, ni trop rêveuse mais jusqu’à quel point ? Elle se torturait l’esprit et le silence n’arrangeait rien. Comment faire face ? Elle n’était pas préparée à ces retrouvailles, surtout qu’en ce moment, beaucoup de choses étaient sur sa liste de tâches importantes…La jeune femme se laissa tomber sur un fauteuil pas loin d’elle. Elle sortit un objet de sa poche, se focalisant sur lui plutôt que sur l’être qui l’observait. Les larmes menaçaient de couler à chaque instant qu’elle pensait au passé. Elle devait souffrir autant que lui dans cette histoire. Elle s’était infligée la même douleur qu’elle lui avait infligée. Ce jour là, elle avait été bien stupide. Elle tendit la main dans le vide avant de la laisser tomber. Inutile, jamais elle ne retrouverait Jefferston…du moins pas si facilement. La souffrance, la tristesse, la nostalgie étaient ses meilleures amies dans cette situation…

Elle planta son regard dans le sien avant de le détourner une nouvelle fois et de cacher sa tête avec ses bras. Pourquoi ? Pourquoi ne disait il rien ?

« Jeff…Pourquoi ce silence ? »

Aussi étonnant que cela puisse paraître, la jeune femme fut étonnée par le ton froid qu’employa son ami d’enfance. Comme si elle espérait que tout s’arrange d’un coup de baguette de magique, évidemment ce n’était pas le cas. Comment l’être après ce qu’elle lui avait fait ? Certaines choses ne s’effaçaient et sa lâcheté faisait partie de ces choses là, de ses souvenirs indélébiles qui peuvent marquer à jamais. Savannah resta là sans bouger, espérant d’autres paroles de la part de celui qui avait partagée une bonne partie de sa vie, de son enfance, de la part d’un être qu’elle avait aimée mais qu’elle avait trahie. Puis le garçon s’approcha d’elle, sans doute interloqué par la pose qu’elle venait de prendre. Dans un effort extrême, ils ne se touchèrent pas. L’oméga releva la tête, fixant un point invisible à l’autre bout de la salle, tout en écoutant son compagnon.

Il voulait connaître la vérité, il voulait savoir ce qui avait passée son amie à s’en aller, sans un mot, sans un regard pour lui…quoi de plus normal ? Quoi de plus douloureux que de repenser à cet évènement de sa vie ? Elle se souvenait de la longue nuit qu’elle avait passée à pleurer quand ses parents lui avaient annoncés sa décision de quitter la ville. Pour son bien disait ils. Foutaise ! Elle savait que c’était autre chose. La ville était synonyme de souvenirs douloureux pour sa mère, souvenirs que cette dernière voulait fuir. Et ça, qu’importent les sentiments de leur seconde fille. Ils avaient décidés, tout comme ils avaient décidés de l’envoyer étudier à Berkeley. Elle avait appris à détester son père pendant toute une année et encore aujourd’hui, elle ne le portait pas vraiment dans son cœur. La demoiselle revint au présent puis soupira.

« Ce qui s’est passé, hein ? Pourquoi cette question ne m’étonne t-elle pas….Mes parents ou plutôt ma mère en est responsable. Du moins, c’est que je m’amuse à me dire alors que je suis aussi coupable qu’elle. Coupable de ne pas avoir pu refusée ce déménagement, coupable de ne pas m’être interposée, coupable de ne pas t’avoir dis adieu…coupable de beaucoup de choses…Mais tu l’as dis toi-même le mal est fait alors même si je te disais la vérité, si je t’avouais le fait que je n’aime pas dire adieu, que c’était bien trop dur pour moi…est ce que tu me pardonnerais plus facilement ? J’en doute énormément… »

A quoi bon faire semblant ? Au fond, la jolie brune savait que quoiqu’elle fasse, jamais ils ne retrouveraient leur relation d’antan alors autant jouée franc jeu. Ça ne servait à rien d’être hypocrite dans ces moments là….Le silence reprit ses droits. Ne supportant pas cette proximité avec le Sigma, la jeune femme s’écarta brusquement puis se leva pour faire face à son ami d’enfance, plantant son regard dans le sien, tentant de lui faire comprendre des choses qui n’arrivait pas à franchir ses lèvres. Elle ferma les yeux, le toucha furtivement avant de retirer sa main. Puis lui tourna le dos pour se retrouver derrière un rayon. Elle se laissa tomber. Puis recommença à parler tant qu’elle le pouvait maintenant qu’il était hors de son champ de vision.

« Comme je te l’ai dis, je m’en suis énormément voulue ce jour là. Pour deux raisons, celle de t’avoir abandonnée sans aucune explication et celle de ne pas avoir laissée mes sentiments s’exprimer. Car vois tu, à ce moment là, je ressentais bien plus qu’une simple amitié pour toi mais jamais je ne te l’ai dis. Pourquoi ? Simplement parce que je savais que toi, tu ne ressentais pas la même chose. Et ça, c’était vraiment dur à vivre. Alors j’ai préférée me taire car je ne voulais pas te perdre. Jefferston, tu m’as fais beaucoup de mal mais tu ne l’as jamais su. Maintenant, tu es au courant de ce que je ressentais. Je t’ai dis le pourquoi de ma fuite. Les cartes sont entre tes mains…fais ce que tu veux, à présent. »

Sa tirade terminée, la jeune femme attendit...quelque chose; attendit de voir la réaction du jeune Sigma. Peut-être trop abasourdi par la nouvelle qu'il venait d'entendre enfin, c'était fait. A vrai dire, l'étudiante ressentit un soulagement. Comme si, un poids énorme s'était retirée de sa poitrine. Elle l'avait dit, enfin maintenant, elle n'avait plus rien à regretter.

Il était obstiné, c’était certain. Il voulait vraiment savoir la vérité. Sans savoir qu’il allait blesser son amie, si elle était encore son amie bien évidemment. Après tout, ils avaient passée leurs temps à se fuir parce que la brunette ne voulait pas être confrontée à lui. Trop de souvenirs allait l’accabler si elle le voyait. On dit que le passé nous rattrape toujours ? C’était clair. Elle avait passée son temps à l’ignorer et comble de l’ironie, c’était avec lui qu’elle était coincée dans cette bibliothèque. Le temps de dire la vérité était arrivé mais elle n’était pas prête. Enfin, il le fallait. C’était sa dernière chance de le retrouver ou de rester en bons termes avec lui.

« La vérité ? Je vais te la dire. Pourquoi ne t’ai-je pas écris une lettre ou te téléphoner ? J’allais dire quoi ? Ça n’aurait strictement rien changée au problème. Et puis de toute manière, il y avait une lettre pour toi. Je l’avais posée dans la maison au bois, dans le jardin, là ou on passait beaucoup de temps, étant enfant. Mais visiblement, tu n’as pas été cherché trop loin. Je suis revenue quelques semaines après, mes parents devaient aller voir où en était la vente de la maison. J’ai été voir si la lettre n’était plus là. Mais, à ma grande surprise, elle n’avait pas bougée de place et la poussière s’était emparée de l’enveloppe. Ce jour là, j’ai eu les larmes aux yeux et je l’ai brûlée…J’avais prévu d’aller te rendre visite mais franchement, je n’ai pas pu. Bref, tu peux me traiter de menteuse, tout ce que tu veux…ça ne change rien. Bref, mon père a trouvée un travail à San Francisco alors on est partie là bas. Pour des raisons de travail mais aussi, parce que je voulais entrer à Berkeley. C’est tout. Mon père m’a laissée le choix de rester ici ou de partir avec eux. Par égoïsme, j’ai choisi d’aller avec eux. Maintenant, tu es libre de me détester…Car même si je te dis que je suis sincèrement désolée, je sais que le pardon n’est pas facile à accorder. »

Voilà, elle l’avait dit. Les mots qu’elle avait volontairement coincés dans sa gorge étaient sortis. Elle ne pouvait que s’en vouloir maintenant. Il allait la détester. Lui crier dessus puis essayerait de casser la fenêtre pour ne plus la revoir. Elle imagina parfaitement la scène mais bien vite, elle redescendit brutalement sur terre à cause des paroles que venait de prononcer Jefferston et surtout par le fait, qu’il l’appelle Sav’… Un nom qu’elle n’avait pas entendu de sa bouche pendant si longtemps. Ce fut l’effet d’un électrochoc. Et la suite n’arrangeait rien. Il l’avait aimé et le pire, c’est qu’elle avait remarquée son attitude mais ne pensait pas que c’était vraiment le cas. Elle avait laissée passer sa chance. Quelle idiote, elle faisait ! C’était officiel. Que faire ? Rester là à bouger sans rien faire ? Crier ? Hurler ? Pleurer ? Elle ne savait pas. Elle ne savait plus... Elle hésita puis ouvrit la bouche, la referma. Complètement choquée, abasourdie, elle se leva, sortant de sa cachette le regardant droit dans les yeux.

« Tu m’aimais ?... Et je n’ai jamais voulu le croire…c’était trop beau…irréel. Je suis une idiote, j’ai gâchée sans doute l’une des plus belles histoires d’amour qui m’aurait été donnée de vivre…j’ai gâchée une amitié par pur égoïsme… et j’ose te demander de me pardonner… Je me déteste… »

Ces mots maladroits lâchés, elle s’effondra sur le sol. Cachant son visage, cachant sa douleur qui se lisait dans son regard. Elle ne savait pas quoi faire. Elle ne savait plus que dire, que faire. Elle était perdue et souffrait de l’intérieur. Son cœur menaça de sortir de sa poitrine. Elle avait l’impression de suffoquer. C’était atroce. Elle ne voulait pas montrer qu’elle était si mal. Soudain elle se leva d’un bond et sans l’avertir le prit dans ses bras. Son contact…elle l’avait tant attendue. Elle ferma les yeux pour ressentir encore mieux cette étreinte qu’elle avait tant rêvée. Qu’elle avait tant voulu revivre. Des larmes coulèrent discrètement.

« Je suis désolée mais j’aimerais restée un peu comme ça. Croire que tout est réglé. Je veux espérer que cette illusion est réelle. Je ne t’ai jamais oubliée…je suis désolée de t’avoir fait tant souffrir…et de peut-être ouvrir de nouveau une plaie qui s’est cicatrisé avec beaucoup de mal… Désolée »

Elle le lâcha après quelques minutes passées à son contact mais resta proche de lui, proche de ce regard qui l’avait hantée pendant des années. Proche de lui.