On dit parfois que les opposés s'attirent. Azuria et moi en étions la preuve. Notre rencontre date de l’université. Moi j'étais du genre rebelle, quelque peu solitaire, bagarreur, têtu et mystérieux. Elle c'était la fille douce par excellence, calme et gentille mais tout autant solitaire et mystérieuse que moi. Une bousculade, une dispute. Il a suffi d’un rien et pourtant c’est là que j'ai su : cette fille allait changer ma vie. Jamais auparavant je n'avais ressenti ça. Elle m'avait tapé dans l'œil et il fallait à tout prix que je la connaisse. J’étais le genre de mec à tout faire pour obtenir ce qu’il souhaite. Seulement voilà, la demoiselle n'avait pas gardé un très bon souvenir de moi, voire même pire que cela. Mais j'étais déterminé à l'avoir, jamais d’ailleurs je n'avais tant voulu une fille. C'était probablement le fait qu'elle m'évite et me rejette qui m'attirait encore plus. Puis petit à petit, elle s'est laissée aller, en arrêtant de me fuir et en me faisant confiance. On était toujours tous les deux, à vrai dire elle était la seule à qui je pouvais parler sans avoir peur d'être jugé. Elle se fichait de ce qu’on pouvait dire sur moi ou de l'apparence que je me donnais. Elle savait qui j'étais et ça lui suffisait amplement. Puis les sentiments sont arrivés, me prenant par surprise. Je me suis mis à l'aimer, moi qui n'avais jamais aimé une fille. C'était fou, insensé. Je ne désirais plus qu’une chose : qu’elle m’aime elle aussi. Et ce jour tant attendu arrive. Azuria était désormais mienne. On formait sûrement le couple le plus inattendu de toute l’université mais je m'en fichais royalement, seule elle m'importait. Tout se passait pour le mieux entre elle et moi. Puis...elle m'a avoué qu'elle était malade, et ce jour-là j'ai bien cru que la Terre s'était dérobée sous mes pieds.
« Tu es...malade ? Oui... depuis que je suis toute petite j'ai une maladie de cœur. Ce n'est pas aussi grave que ce que tu penses, mais il faut juste que je fasse attention. Je... je dois te laisser, excuse-moi je... Blake ! ». Cette annonce m'était parvenue comme un électrochoc. Je n'aurais pas dû réagir ainsi je le savais, mais le coup était trop fort, trop violent pour que je puisse l’encaisser. Je ne lui en voulais pas, après tout comment le pouvais-je ? Elle n'avait pas demandé à avoir cette foutue maladie ! Elle avait beau me dire que ce n'était pas grave je savais qu'elle me mentait, qu'elle essayait de me préserver pour ne pas que je m’inquiète. Ma peur de la perdre s'était dès lors accentuée. Je la voyais désormais si faible, si fragile. Après cette révélation, j’ai commencé à être distant avec elle, sans même savoir pourquoi. Je fuyais sûrement. Même aujourd'hui je n'avais pas la réponse à cette question, bien que le traumatisme qu’a entraîné la mort de ma sœur fût très probablement la cause de tout ceci. Alors un jour j’ai pris la de partir et de changer ma vie du tout au tout.
« Je pars Azuria… Comment ça tu pars Blake ? Je ne te comprends pas... Je me suis engagé dans l'armée, je pars en Afghanistan dans une semaine, je suis désolé... Quoi ? Dis-moi que c'est une blague, que ce n'est pas vrai ? Comment tu peux me faire ça hein ? Comment peux-tu vouloir partir du jour au lendemain ? Je vais faire comment sans toi moi ? - la prenant dans ses bras -
Pleures pas petit ange, tu t'en sortiras sans moi j'en suis sûr. Blake... - encadrant le visage d'Azuria avec ses mains -
Je te promets qu'un jour je reviendrai et qu'on se retrouvera de nouveau. Ce n'est pas un adieu, juste un au revoir, je t'en fais la promesse. ». Je lui avais délicatement embrassé le front et j'étais parti... Comme un lâche. Je l’avais laissé en sachant qu'elle avait besoin de moi, en sachant qu'elle était fragile. J'avais fui, tout simplement... J'avais déjà perdu ma petite sœur, je ne voulais pas la perdre elle également. Rien qu'à cette idée mon cœur se serrait dans ma poitrine. Mais j’ai compris bien trop tard que c'était en partant que je la perdais, et non l'inverse…
« J'ai longtemps parcouru son corps, effleuré cent fois son visage. J'ai trouvé de l'or et même quelques étoiles en essuyant ses larmes. J'ai appris par cœur la pureté de ses formes, parfois je les dessine encore, elle fait partie de moi... »
Jamais je n'avais pu l'oublier. Il ne s'était pas passé une seule journée sans que je ne pense à elle. Sans que je ne revois ses longs cheveux bruns tombant en cascade sur ses épaules, sans que son odeur de vanille vienne me chatouiller les narines comme si elle était près de moi, sans que je n’imagine ses beaux yeux fixant les miens ou sans que je ne repense à son sourire et à son rire. Elle me manquait, indéniablement. J'avais eu besoin de partir pour comprendre à quel point je la voulais. Alors j'étais revenu... J'étais enfin de retour dans cette ville aux milles souvenirs. Je n'avais qu'une hâte : la retrouver. Mais je n’étais plus le même homme. La guerre m’avait changé. Elle avait fait de moi un fantôme, une ombre perdue tentant de s’en sortir. J’étais dangereux. Pour elle et pour les autres. Alors j’étais prêt à la laisser, à abandonner à nouveau celle que j’aime pour la préserver. Mais cela s’annonçait bien plus difficile que prévu…