Le Manhattan Lounge… le lieu 100% masculin, macho et dégradant pour les femmes par excellence de tout San Francisco… devinez qui vient d'y faire une entrée remarquée ? Gagné, c'est bel et bien Sydney. N'étant ni homo ni danseuse, elle n'a pourtant aucune raison d'y faire un tour, seulement tout le monde sait qu'elle n'est pas du genre à se contenter des lieux de rencontre et de fêtes habituels… en fêtarde aguerrie, la réceptionniste et secrétaire de Berkeley a le goût de la nouveauté. Elle n'était pas encore tout à fait accoutumée à l'immense ville californienne, mais autant dire que les lieux de débauche, de drague et fortement alcoolisés moyennant quelques beaux garçons dont elle pourrait abuser du portefeuille étaient les premiers qu'elle avait repéré en arrivant.
La miss Khelos s'était donc pointée sur les coups de 22h en soudoyant le videur puisqu'elle s'était faite passer pour une des nouvelles employées… il faut dire que vu son corps, la blondinette n'avait eu aucun mal à lui faire avaler ce bobard : robe courte jusqu'à mi-cuisses de couleur verte, des petites bottines brune de l'excellente maison Chanel, un grand collier doré, un maquillage léger puis une touche de parfum… Le type l'avait reluqué sans se priver, attirant ainsi un sourire arrogant sur le doux visage de Sydney.
Une fois à l'intérieur, elle déposa une main sur sa hanche et commença à jeter un coup d'œil autour d'elle pour s'imprégner de l'ambiance. Lumières basses, alcool à gogo, des poufs qui se frottent contre une barre métallique ou contre les clients eux-mêmes… pas de doute, elle comprenait mieux l'indice de fréquentation du club. La belle blonde en conclut d'un simple regard que la majorité des clients étaient soit des groupes d'hommes pour un enterrement de vie de garçon, des PDGs venus se détendre après une grosse journée de travail, des époux infidèles qui fantasment pour oublier le thon qui leur a passé la bague au doigt, des étudiants qui… Des étudiants ?! La secrétaire haussa un sourcil en voyant un jeune homme qu'elle connaissait bien, chevauché par une des plus belles danseuses de la boîte qu'elle avait pu observer jusqu'ici. Alban. Celui-ci ne l'avait pas encore vu étant donné que ses yeux semblaient scotchés sur une poitrine à demi-nue qui ne cessait de le provoquer. Un sourire sur les lèvres, l'égyptienne marcha dans sa direction.

"Eh, toi, tu dois aller sur scène !
- Désolée, trésor, je ne suis pas de service ce soir… ce joli petit postérieur a d'autres projets qu'augmenter la taille de ta bourse… Sans arrière-pensée." ajouta-t-elle en mimant une mine de dégoût après s'être rendu compte de la connotation involontaire de sa réponse.

Oui, elle venait d'envoyer balader un des gérants de la boîte sans le savoir… à croire que tout le monde ici la prenait pour une habituée. Beaucoup de femmes s'en seraient senties insultées mais Sydney, elle, préférait y voir de la flatterie : évidemment qu'elle avait de quoi exciter tout ce beau monde. Arrogance et narcissisme, quand tu nous tiens…
Bref, une fois arrivée à la table d'Alban, elle tapota sur l'épaule de la danseuse sans pour autant s'intéresser tout de suite au jeune homme.

"Fin du numéro, chérie, tu peux aller agiter ta cellulite ailleurs.
- Pour qui tu te prends, toi, laisses-moi bosser !
- Va voir le vieux bedonnant là-bas… ton déhanché spécial "chienne en chaleur" fera merveille. Entre gras-doubles, vous vous comprendrez !"

Dire ce qu'on pense dans les termes exacts de sa pensée sans même chercher à enrober, c'était quelque chose qui pouvait en vexer plus d'un… preuve en est de cette danseuse qui prit une mine outrée en descendant des cuisses d'Alban pour filer sans demander son reste. Un air satisfait flotta sur le visage de Sydney qui haussa un peu le menton avec un air dédaigneux puis se concentra enfin sur l'objet de sa venue.

"Alban Saint-Rémy… pourquoi ne suis-je même pas étonnée de te trouver ici ? J'ai failli m'ennuyer dans les autres boîtes, toute seule… quel manque de galanterie."

La jeune femme se laissa tomber sur le divan de cuir à ses côtés puis déposa doucement ses jambes fines sur les cuisses de l'étudiant en cinéma, dans la plus naturelle des décontractions qui soient.

"Alors, quoi de neuf à LuxureLand ? Tu viens juste pour t'occuper ou tu as une cible en vue…?" lança-t-elle d'un ton intéressé en regardant autour d'elle pour voir si Alban avait repéré une conquête potentielle parmi le staff du club.

La relation qu'entretenaient Alban et Sydney était aussi étrange qu'amusante. Pour faire court, l'un et l'autre convoitaient respectivement quelque chose chez l'un comme chez l'autre. Pour Sydney, elle voyait Alban comme l'un de ces nombreux riches élèves au physique décidément très agréable et au tempérament assez sulfureux pour se laisser embobiner par les charmes féminins… ou au moins assez longtemps pour en retirer une somme suffisamment conséquente de leur indécent compte en banque. Quant à Alban, il voyait chez Sydney une de ces nombreuses jeunes femmes à la plastique de rêve et qui serait sans doute encore plus désirable et sensationnelle une fois nue dans ses draps qu'habillée sur ses genoux. L'une pour l'argent, l'autre pour le sexe… quels points communs auraient-ils, alors ? Il faut reconnaître que la jolie blonde a-do-rait le côté et la réputation de brise-cœur que se baladait l'Oméga. En effet, passionnée de potins et d'anecdotes croustillantes sur tout le monde, elle était totalement fan des coups fourrés que l'étudiant faisait à ses conquêtes pour profiter d'elles avant de les laisser tomber comme de véritables chiffons. Quant à lui, il aurait le loisir de se dire que Sydney devait bien être l'une des seules secrétaire d'Amérique à être aussi canon, débridée et attachante… bien loin des stéréotypes de vieilles filles coincées derrière leur bureau à concentrer exclusivement leur libido sur leur souris d'ordinateur.
Les jambes étendues sur les cuisses du beau jeune homme et confortablement installée sur le divan, elle prit un petit air à la fois mesquin, supérieur et coquin dont elle avait le secret en entendant l'invitation à peine déguisée qu'Alban lui fit… quand ce type vous invite à passer chez lui, ce n'est pas pour discuter charité ou argent. La seule charité qu'il fait, c'est de donner un orgasme à une fille de passage… avec un tel comportement qu'elle appréciait énormément de sa part, elle était tout aussi certaine de ne pas se laisser avoir pour tomber dans ses bras. Plus elle le voyait briser des cœurs et plus cela la confortait dans la résistance qu'elle lui opposait. Silencieuse au départ, la fashionista suivit le trajet de la main de son interlocuteur qui semblait vouloir d'ores et déjà passer à l'attaque. Elle se laissa faire en lui adressant un regard empli de suffisance et d'amusement taquin.

"Tu réalises que tu t'engages en sens interdit, trésor…?"

Visiblement non, dans la mesure où il lui chuchotait doucement à l'oreille tout en tâchant de se frayer un chemin sous sa robe. L'espoir fait vivre, c'est sans doute l'une des choses qui lui plaisaient le plus chez Alban. Sa ténacité, sa démesure et son talent pour envoyer ses conquêtes sur les roses après les avoir jeté sur son lit. Elle tourna doucement la tête vers lui et enroula un bras autour de sa nuque… sa bouche frôla presque la sienne tandis qu'elle lui adressait un air aussi provocateur que détaché à la fois.

"J'en ai autant à ton service : en comparant la fouille du videur à l'entrée et ce que tu essaies de manigancer pour me peloter, je peux d'ores et déjà t'annoncer qu'il est bien plus doué que toi pour le domaine tactile. Tu devrais lui demander des tuyaux, ça pourrait te servir…"

Oui, la répartie, elle n'en manquait jamais et en toute circonstance ! La réceptionniste repoussa la main d'Alban au niveau de son genou puis croisa sa jambe fine de façon suffisamment ferme par-dessus afin de bloquer ladite main. D'accord, elle aurait aussi pu la retirer pour de bon, ça aurait été plus simple. Mais prendre son ami au piège ainsi, c'était tellement plus amusant et excitant à la fois… ils aimaient se chauffer autant que se parler, de toutes manières. Elle attrapa le cocktail de l'étudiant et le descendit d'un trait avant d'hausser un sourcil.

"De toutes manières, on passe toujours une bonne soirée avec moi… puis soyons francs : tu as encore toutes tes chances pour trouver une pauvre désoeuvrée en manque d'affection ou de cash qui cédera aussi bien à ton charme qu'à ton porte-monnaie… non, je ne parle pas de moi : on ne couchera pas ensemble ce soir, alors arrêtes de me regarder comme ça ! ajouta-t-elle avec un léger sourire. Pour ta gouverne, les clubs de strip-tease sont souvent pleins à craquer d'hommes désespérés prêts à dépenser des sommes folles pour coucher avec des femmes qui dans la rue ne leur donneraient rien même s'ils faisaient la manche. Les pigeons rêvés pour une fille en manque de fonds…"

Sans s'inquiéter plus que ça de la main d'Alban qu'elle tenait toujours coincée entre ses jambes au niveau de son genou, elle regarda ailleurs avant d'attraper une mèche de ses cheveux avec un petit air absent tout à fait craquant et "innocent".

"Dis-moi, ta dernière pauvre fille abandonnée dans le caniveau remonte à quand ? Je suis en manque de potins, t'es comme mon magazine people préféré… bien que je ne te dévore pas de la même façon…"

Et une provocation supplémentaire, une ça marche ! Jouer avec le feu, c'est tellement plaisant, surtout quand l'homme en face a du répondant comme Alban.