Dans un peu plus d'un mois, les cours reprendraient à Berkeley. Je passais de bonnes vacances, pour l'instant en restant dans le coin, mais j'avais prévu de m'offrir une virée quelque part, assez loin pour ne pas penser à cette nouvelle année scolaire qui approchait. Je devais déjà aller rendre visite à mes parents à Pittsburgh, en Pennsylvanie. Je n'aimais pas tellement cette ville, mais cela faisait trop longtemps que je n'avais pas vu le domicile familial, et j'avais beau aimer ma nouvelle vie, j'étais très attachée à mes parents. Enfin, pour l'instant, j'étais toujours à Berkeley et je ne savais pas quoi faire de cette belle journée d'été. Je serais bien allée à la plage, mais il faisait tellement beau qu'elle serait certainement bondée, et j'avais plutôt envie d'être au calme. Je décidai donc d'aller dans le parc de l'université. Celle-ci étant fermée pour les vacances, j'étais à peu près sûre de ne croiser personne.

Comme prévu, lorsque j'arrivai sur place, je pus constater que le parc était vide. Je pourrais bronzer et bouquiner à ma guise... Normalement. Je retirai ma robe pour me retrouver en maillot de bain. Ma peau avait pris une teinte dorée plutôt jolie, mais pas encore assez à mon goût. Et les UV, non merci ! Finir orange avec un cancer en prime, très peu pour moi. En plus, ça n'irait pas bien avec mon corps parfait. J'étalai ma serviette sur la pelouse et m'allongeai dessus sur le ventre. La crème solaire, peut-être plus tard. J'allais sortir un magazine (de mode, évidemment) lorsque j'entendis quelque chose. Je me stoppai net, espérant que ce ne serait pas un étudiant. Ou plutôt pas une étudiante. Un garçon canon ne m'aurait pas dérangé, cela va de soi. Je regardai autour de moi et vis que quelqu'un s'approchait au loin. Quelqu'un qui ne m'était pas inconnu... Et c'était bel et bien un garçon canon. Maxence de Lacroix. Cela faisait des mois que j'avais croisé son regard pour la première fois, et je n'étais pas près de l'oublier. Quoique ce n'était pas tellement son regard qui m'obsédait, mais plutôt son corps de dieu grec. Un petit séjour dans mon lit aurait peut-être aidé à le faire sortir de ma tête, mais j'avais beau toujours me montrer sous mon plus beau jour en sa présence, il ne fléchissait pas. Cela commençait à être vexant à force. Enfin, il valait bien quelques efforts. Je me retournai sur le dos, histoire de mettre tous mes atouts en valeur, et attendis le plus patiemment que je pouvais. Autrement dit, si je n'avais pas été allongée, j'aurais été en train de trépigner. Me voir en petite tenue le ferait sûrement changer d'avis...

J'aimais être seule. Oui, c'était un fait, j'aimais la solitude. J'étais pourtant d'un naturel sociable, enfin tout dépendait encore de qui j'avais en face de moi, mais j'appréciais être entourée de gens beaux et agréables. Seulement, il m'arrivait de ne plus supporter tout ce bruit. En effet, ce n'était pas tellement le comportement de l'être humain qui me dérangeait, mais plutôt sa capacité à générer du bruit sans arrêt. C'était fatigant, et j'avais les oreilles sensibles. Là, dans ce parc presque désert, je revivais, bien que le silence ne soit pas complet. Je pouvais me détendre et réfléchir. J'étais moins irritable. Et puis ce soleil... Mon dieu, qu'est-ce que j'aimais le soleil. Et qu'est-ce que j'aimais le corps de ce Maxence. Vive la France..

- Heum… Bonjour ? Excuse-moi ? Wouhouu !

Réflexe. Mes yeux s'ouvrirent en un millionième de seconde. Un peu comme si mes paupières avaient sursauté. En tout cas, le moins que l'on puisse dire, c'est que j'avais une belle vue de là où j'étais. Pour la première fois, ce Français qui hantait mes nuits daignait m'accorder un minimum d'attention. Enfin, le "qui hantait mes nuits" était peut-être un peu exagéré. Ce qui était sûr, c'était qu'il les rendrait bien plus belles s'ils les passaient à mes côtés. Maintenant qu'il était là, si près de moi, je n'en avais plus aucun doute. Je me redressai sur les coudes, pas vraiment à l'aise dans cette position d'infériorité.

- J’ai fait tomber ma bille, t’es allongée dessus. Tu voudrais bien te lever un moment s’il te plaît ?

Pendant un instant, je crus que c'était une blague. Je haussai un sourcil, mais compris bien vite en voyant son sourire embarrassé que ça ne devait pas en être une. Par contre, c'était fort probablement une excuse pour venir me parler. L'excuse la plus ridicule que j'aie jamais entendue, mais qui eut au moins le mérite de m'amuser. Un rire cristallin sortit de ma bouche (oui, même mon rire était parfait), et j'adressai un sourire malicieux à mon interlocuteur. Je soulevai mes fesses en m'appuyant sur les coudes (un peu de gainage ne fait jamais de mal) pour que le dieu en face de moi puisse récupérer sa bille, si bille il y avait. J'étais aux anges. Il avait donc fini par craquer après tout ce temps d'attente. Heureusement que je n'avais pas lâché l'affaire. Je pris ma voix la plus sensuelle possible pour lui dire :

- Tu la vois quelque part ?

Je le fixais. Non seulement parce que j'en avais envie (cela faisait partie de ma tactique depuis bien longtemps, et ça avait toujours marché jusque-là), mais aussi parce que je ne pouvais pas m'en empêcher. Même s'il n'était pas envisageable qu'il s'en aille sans demander son reste, je préférais savourer cet instant. J'imaginais déjà sa main se glisser sous mon dos pour attraper ladite bille, encore une fois si cette dernière n'était pas le fruit de son imagination. Il effleurerait ma peau et ce serait le comble. Cette journée s'annonçait bien, et elle risquait d'être la plus belle depuis un bon bout de temps...